13 juin 2025 | Mise à jour le 13 juin 2025
L'ancienne dirigeante syndicale Céline Verzeletti est citée à comparaître devant le tribunal d'Aix-en-Provence ce vendredi 13 juin pour injure publique par un ancien magistrat de la Cour nationale du droit d'asile, récusé pour ses prises de position xénophobes.
Ils osent tout. C'est même à ça qu'on les reconnaît. Céline Verzeletti, ancienne cosecrétaire générale de l'Union fédérale CGT des syndicats de l'Etat (UFSE-CGT) et à ce titre ancienne directrice de la publication du site cgtetat.fr est citée à comparaître vendredi 13 juin devant le tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence pour injure publique à l'égard de Jean-Marie Argoud, ancien président vacataire à la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Le tort de l'ancienne dirigeante syndicale ? La publication d'un article le 25 octobre 2023 dont le titre évoque la « récusation d'un magistrat administratif : quand un président vacataire aux relents homophobes, islamophobes et anti-immigration siège à la CNDA depuis 2021 ». De fait, l'article qui reprend un communiqué de presse de la CGT de la CNDA revient sur la récusation, fait extrêmement rare, de Jean-Marie Argoud. La CNDA, chargée de statuer en dernière instance du sort des demandeurs d'asile déboutés de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), précisant alors sobrement que « les prises de position publiques de Jean-Marie Argoud sur les réseaux sociaux sont de nature à créer un doute sur son impartialité en tant que juge de l'asile ». Plusieurs mois auparavant, ce magistrat affichait ouvertement sur les réseaux sociaux et sa page Facebook des propos homophobes, islamophobes et anti-immigration, pro-Algérie française. Des avocates officiant à la CNDA alertaient alors sur le fait que ses convictions politiques rejaillissaient en audience. Une avocate comptabilisant quarante-neuf rejets rendus sur les cinquante audiences où il avait jugé seul. Dans le numéro 08 de son trimestriel, la Vie Ouvrière revenait sur ce scandale qui avait remué la CNDA en octobre 2023. En outre, le conseil de déontologie du Conseil d'Etat avait rendu le 29 novembre 2023 un avis selon lequel « un magistrat qui œuvre principalement dans le domaine régi par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit s'abstenir de tout commentaire qui pourrait laisser croire que la nature de ses convictions serait un obstacle à une justice impartiale au seul service de la loi ». Dans son communiqué, la CGT de la CNDA soulignait aussi l'importance de préserver la collégialité du jugement présentée comme un garde-fou, alors que la loi « asile et immigration » a étendu le jugement unique.
Recours abusif à la justice
Presque deux ans plus tard, Jean-Marie Argoud saisit donc la justice pour injure publique envers un particulier. « Or, Monsieur Argoud n'est pas un particulier, mais un magistrat à ce titre soumis à un devoir de réserve. Cette procédure est à rebours de la liberté d'expression et est une forme d'instrumentalisation de la justice », plaide l'avocat Nicolas Verly, qui entend demander la condamnation de l'ancien magistrat pour recours abusif à la justice. De son côté, la CGT « toute entière est solidaire de Céline Verzeletti », « parce que la liberté d'expression n'est jamais acquise, parce que la lutte contre les idées d'extrême droite, le racisme, la LGBTQIA+ phobie et toutes les discriminations est d'une brûlante actualité ». Dans un communiqué, le syndicat dénonce et condamne « la multiplication des convocations, des mises en examen, des traductions devant les tribunaux – voire des condamnations – de militants du mouvement syndical, associatif et politique, dans un contexte où la France vient d'être épinglée comme jamais par la Confédération syndicale internationale pour non-respect des droits syndicaux ».