Le Rassemblement national, un programme xénophobe
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Pour la première fois de son histoire depuis la chute du nazisme, l'extrême droite a réalisé, dimanche 1er septembre, une percée spectaculaire dans deux régions de l'ancienne RDA, à l'occasion des élections régionales partielles. L'Alternative pour l'Allemagne (AfD) a recueilli près de 28 % des voix (+ 18 points) en Saxe – à la frontière avec la Pologne et la République tchèque –, et 22,5 % (+ 11 points) dans le Brandebourg, la région de la capitale, Berlin.
Certes, il ne s'agit que de deux länder, soit 5,5 millions d'électeurs (12 % du corps électoral), mais le score qu'y réalise l'extrême droite n'en est pas moins inquiétant. À la fois pour ces régions, mais aussi pour le pays tout entier. D'abord, parce que depuis 1945, l'extrême droite avait été marginalisée dans le pays. Ce n'est plus le cas. Ensuite, parce que ce sont les nouvelles générations qui, lasses des politiques des partis traditionnels (la CDU d'Angela Merkel et son allié gouvernemental le SPD), en particulier dans l'ex-RDA, se sont laissées séduire par les sirènes nationalistes et la rhétorique raciste de l'Afd.
C'est que, trente ans après la chute du mur, l'ex-RDA continue d'être la laissée-pour-compte de l'Allemagne réunifiée. Selon un sondage paru à l'occasion du scrutin, 54 % des électeurs de Saxe et 51 % de ceux du Brandebourg considèrent que les habitants de l'Est sont traités comme des « citoyens de seconde zone ». De fait, jugées obsolètes, nombre d'industries ou d'entreprises agricoles ont été fermées dans les années 1990. Mais rien ne les a remplacées, créant à l'Est un chômage de masse qui ne dégonfle pas.
Plus qu'ailleurs, les jeunes actifs de ces länder subissent les effets des lois Hartz du début de la décennie 2000. Ce qui les oblige à multiplier les petits boulots mal payés, à accumuler les temps partiels imposés, bref, à devoir faire face à une précarité permanente. En outre, le différentiel de salaires entre l'Ouest et l'Est demeure important. D'où une migration des jeunes, ainsi que des plus qualifiés, vers l'Ouest. Ce qui accentue ce sentiment d'abandon.
Dans ce contexte, l'AfD n'a guère de difficultés à présenter les migrants comme les pires concurrents des Allemands – tant sur le marché du travail qu'en termes de nécessaire solidarité –, mais aussi comme autant de menaces existentielles sur « l'identité allemande ».
Une thèse que l'organisation d'extrême droite a largement développée à l'occasion de l'accueil massif par l'Allemagne de réfugiés fuyant la guerre et les atrocités en Syrie, en particulier depuis 2015, alors que le reste de l'Europe érige des murs ou réclame des « quotas » à la baisse.
Née en 2013, l'Afd n'hésite pas à présenter aux élections des candidats issus de l'aile identitaire, proches de milieux néonazis et favorables à une autre « politique mémorielle » de l'Allemagne ; et à une « homogénéisation ethnique de l'Europe ». Son dirigeant, Alexander Eberhardt Gauland, n'a pas davantage hésité, lors de la campagne des élections fédérales de 2017, à défendre « le droit d'être fier des performances des soldats allemands durant les deux guerres mondiales »…
Ce révisionnisme ne semble pas émouvoir outre mesure une grande partie de la nouvelle génération qui a grandi en Allemagne de l'Est. D'autant que la politique mémorielle y a été moins prioritaire qu'à l'Ouest. En fait, l'Afd s'appuie sur le rejet, légitime, des politiques sociales du gouvernement CDU-SPD, ainsi que sur le slogan « Terminons la réunification ! », pour déployer ses thèses.
À l'issue du scrutin, la CDU reste malgré tout en tête en Saxe et le SPD au Brandebourg. Ce dernier, sommé par une partie de ses adhérents de quitter la coalition gouvernementale, pourrait prendre cette décision d'ici la fin de l'année. De son côté, deuxième parti à l'échelon fédéral selon les sondages, le parti des Verts n'a pas réussi à s'imposer dans ces deux länder où il réalise un score de quelque 9 %. Le parti de gauche radicale Die Linke perd, lui, près de 8 points par rapport à 2014, ne totalisant que 10 % dans les deux länder.
Le prochain scrutin – qui verra les électeurs de Thuringe se rendre aux urnes le 27 octobre – est, dans ce contexte, attendu avec inquiétude. Reste que la mobilisation antiraciste s'organise. Quelque 35 000 manifestants ont ainsi défilé contre le racisme à Dresde, en Saxe, le 24 août dernier, à l'appel de syndicats, d’ONG, d’artistes ou de responsables politiques. Tous sont conscients que, sans une autre politique économique et sociale, l'extrême droite continuera sa dangereuse percée.
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