Grève féministe du 8 mars : « Ni objet, ni boniche, on veut l’égalité et le respect »

En ce début d'après-midi baigné de soleil, sur la Place Gambetta (Paris 20), des dizaines de milliers de personnes affluent pour le départ du cortège. Associations féministes, Syndicats et ONG s'apprêtent à battre le pavé ensemble pour cette journée de lutte pour les droits des femmes. Peu avant le départ, l'ambiance est déjà là : enceintes à fond et premières pancartes agitées, la victoire de l'inscription de l'IVG dans la constitution y est pour quelque chose. « Ce 8 mars a vraiment une autre saveur, c'est presque une célébration » lâche avec un grand sourire Nadia, 29 ans. À coté d'elle, son amie Laura, 28 ans, qui travaille en centre hospitalier partage sa joie mais nuance : « C'est super cette inscription de l'IVG dans la constitution, mais l'accès des femmes à l'avortement n'est pas garanti sur tout le territoire. » C'est d'ailleurs ce que dénoncent les professionnels de santé, d'un côté, le symbole de l'IVG constitutionnalisée – de l'autre, la réalité du terrain avec plus de 130 centres d'orthogénie qui ont fermé en France en quinze ans, selon le Conseil National de l'Ordre des sages-femmes.

Chez les syndicats rassemblés sous la mairie du 20^ème arrondissement, l'inégalité des salaires femmes-hommes est pointée du doigt, tout autant que l'inaction du gouvernement à ce sujet. « Toutes les entreprises qui ne respectent pas l'égalité femmes-hommes sur le plan salarial, doivent être sanctionnées. L'égalité salariale c'est maintenant, pas en 2186 ! », martèle la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet. Selon l'INSEE, avec 24,4 % d'écart de rémunération à temps de travail égal entre les femmes et hommes dans le privé, la France est parmi les pires pays européens en termes d'inégalités sur les salaires. Là où la moyenne européenne se situe à 15 %.

Un changement de mentalité 

Plus loin dans le cortège les messages militants ramènent vers l'actualité récente concernant les violences sexuelles et sexistes. « Je ne suis pas misandre, j'ai un ami homme », « Merci Judith ! » et « #MetooGarçon, on vous croit aussi. », c'est ce qu'on peut lire sur les pancartes directement fixées sur Emilie, 40 ans, travailleuse sociale. La militante se réjouit : « Je suis heureuse de voir qu'il y a plus d'hommes à la manifestation surtout par rapport au 25 novembre dernier (date de la journée d'actions contre les violences sexistes et sexuelles, NDLR). Il faut qu'ils participent eux aussi, pour dénoncer les inégalités. » Malgré cette unité autour de la danse et de chants militants, le défilé parisien ne se déroule pas sans heurts entre certains participants. C'est notamment autour du conflit Israël-Palestine que les tensions se cristallisent. Peu avant d'atteindre la place de la République, étape prévue pour le cortège, des invectives mais aussi des jets de bouteilles s'échangent entre des militant.es pro-palestiniens et le collectif juif « Nous Vivrons », (qui dénonce les viols commis par le Hamas le 7 octobre dernier). Plusieurs militants de l'association fondée juste après les attentats commis par le Hamas, seront exfiltrés avant d'atteindre la place de la République. En dépit de ces affrontements, la manifestation se termine à Place de la Bastille dans la bonne humeur. L'actrice Judith Godrèche se joindra à la toute fin de la manifestation pour rendre un hommage aux femmes tuées « parce que femmes.» Selon le collectif Noustoutes, en 2023, plus de 134 femmes qui ont été victimes de féminicides. Un chiffre qui ne baisse pas.