Simon Delétang, planches de salut
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Si on osait, on dirait que Bertold Brecht, c'est comme le cochon : tout est bon. Il écrivait bien : « l'homme est bon, mais le veau est meilleur »…
Avec Dialogues d'exilés, une pièce peu montée, on se régale de sa plume, grave autant que drôle. Elle est à découvrir jusqu'au 26 mars au Lucernaire. Pour son propos d'abord : deux exilés allemands, Ziffel et Kalle, ayant fui le nazisme, devisent autour de chopes de bières sur Hitler (la réplique « Comment s'appelle-t-il donc au juste ? » claque régulièrement), la barbarie, la liberté d'expression ou le capitalisme. Pour son histoire ensuite : le dramaturge, déchu de la nationalité allemande sous le IIIe Reich, l'a peaufinée en exil, quinze ans durant. Pour la mise en scène enfin d'Olivier Mellor qui a eu la très bonne idée de mêler des chansons – du dramaturge bien sûr, mais aussi de Léo Ferré, Bernard Dimey, Jean Yanne voire Jesse Garon (et son tube « C'est lundi – ah ah ah ah ! ») – au texte tragi-comique de Brecht. Du coup, la douche froide fonctionne à plein. On passe sans cesse du rire au sérieux.
Sur le plateau, des fûts métalliques, une pompe à bière et plein d'instruments de musique. Les deux protagonistes, fort bien plantés par Stephen Szekely et Olivier Mellor, sont accompagnés par trois jeunes musiciens pleins d'allant. Tous les cinq servent brillamment la pièce, en portant haut les mots de Brecht qui résonnent encore et toujours. « Le passeport est la partie la plus noble de l'homme. D'ailleurs un passeport ne se fabrique pas aussi simplement qu'un homme (…) ».
« Si le capitalisme avait pu marcher sans le fascisme, il n'y aurait pas eu de fascisme. » Au cœur de réflexions les plus graves, les artistes n'hésitent pas à nous jouer une scène de beuverie hilarante sur « Un verre de ouatabada », la chanson loufoque de Raoul de Godewarsvelde (l'auteur de Quand la mer monte). Si une ou deux chansons sont peut-être de trop, le spectacle tient sacrément la route.
Dialogues d'exilés, de Bertold Brecht, mis en scène d'Olivier Mellor.
Jusqu'au 26 mars au Lucernaire. 53 – rue Notre-Dame-des-Champs – Paris 6e.
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