Hôpital public : un démantèlement programmé ?
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Avant tout, il y a les salaires. Et leur faiblesse. Mais aussi les conditions de travail qui se dégradent. Un cocktail déjà explosif. À cela s’ajoute encore le sentiment de ne compter pour rien, d’être méprisé. « Qu’on nous écoute sur notre métier, déjà ce serait un premier pas », lâche Véronique, infirmière de nuit au centre de soins de suite et de rééducation Les Sorbiers à Issoire (Puy-de-Dôme). Pour se faire entendre, Véronique et des dizaines d’autres salariées de cet établissement médical du privé à but lucratif ont choisi la bonne voie : s’organiser syndicalement. « Fin 2017, j’ai vu débarquer des infirmières et des aides-soignantes du centre des Sorbiers qui venaient chercher de l’information pour monter un syndicat », se souvient Jacques Cocheux, secrétaire général départemental CGT et coordinateur régional Auvergne santé, action sociale.
Depuis le rachat des Sorbiers par le groupe ORPEA et sa filiale Clinea, en 2016, rien ne va plus. La nouvelle direction met fin aux accords et usages d’entreprise en vigueur jusqu’alors dans le centre de soins et de réadaptation… sans les dénoncer dans les règles. Sur leur fiche de paie, les salariées ont la mauvaise surprise de constater la suppression de la prime d’assiduité – l’équivalent d’un mois de salaire en moyenne. Au quotidien, c’est encore la suppression de la subrogation et du jour de carence qui coincent… Ces maigres bénéfices laminés par Orpéa, sans que la direction n’ait daigné en informer les salariées mettent le feu aux poudres. Le 9 février, 38 des 51 salariées des Sorbiers se lancent dans une grève originale : trois quarts d’heure de grève avec un sit-in dans le hall.
L'avantage ? Un impact minimum sur les salaires – déjà peu élevés – et une opportunité pour interpeller les médias et politiques locaux. Les deux équipes qui se croisent, celle du jour et celle de nuit, se passent aussi le relais dans les débrayages qui courent tous le mois de mars. « Un jour, en fin de journée, les deux débrayages ont coïncidé, soit 1h30 de grève durant laquelle, on n’était pas censé répondre aux coups de sonnettes des patients », explique Aurélie. « Officiellement, ce jour-là, il y avait 100 % de grévistes. Mais ces salariées ont suffisamment d’humanisme et de professionnalisme pour ne pas laisser tomber les malades », reprend Jacques Cocheux. On ne peut pas en dire autant de la direction, capable de laisser le centre sans encadrement ni gestion durant l’heure et demi de grève.
« Un manquement grave à la sécurité des patients », pour le responsable CGT mais qui n’étonne même plus les « filles » des Sorbiers. Toutes racontent les cas limites avec la mise en danger d’autrui. « Un patient qui fume sous trois litres d’oxygène ça n’alerte pas ma direction », s’insurge Véronique. « Malgré nos demandes pour prendre en charge rapidement une hypothermie très grave chez une petite mamie, le médecin a tardé à poser un diagnostic. Pire, les cadres doutaient de notre parole, relativisaient en accusant notre thermomètre d’avoir des problèmes… » Emmenée en urgence à l’hôpital, la vieille dame est malheureusement décédée.
Chez ces professionnelles, le ras-le-bol est général. Manque totale de considération de la hiérarchie et conditions de travail délétères, il faillait dire stop et agir. « Ils prennent les patients pour des clients. On est dans une logique d’hôtellerie et nous on nous demande de les servir sans réfléchir », résume Juliette, aide-soignante.
ORPEA, qui appartient à un fonds de pension étranger, pousse jusqu’au bout la logique libérale, multiplie les intimidations syndicales et refuse le dialogue social. Même la médiation avec la préfecture et les politiques locaux ne donnent rien. « C’est un dossier qui est suivi de près par les services de l’État, notamment en raison de la population accueillie par l’établissement », confirme le sous-préfet, Tristan Riquelme dans une interview au journal La Montagne. Depuis le début de leur mouvement de grève, des vigiles – parfois avec un chien – font la ronde, jour et nuit, devant la clinique. Ambiance…
Cela n’a pas empêché l’organisation d’élections professionnelles pour désigner les déléguées du personnel, préalable, selon la direction à toute reprise de négociations. Dont acte ! Les salariées se sont lancées dans l’aventure syndicale avec pugnacité. Et, aidées par Jacques Cocheux dans la préparation du protocole électoral, elles organisent leur première élection de DP, avec un vote prévu le mardi 17 avril.
Devant un ordinateur, dans les locaux de l’UL d’Issoire, les filles sont attentives à traquer le moindre vice de procédure. « Il faut veiller à avoir le quorum pour être élu au premier tour », résume Aurélie. « Et pour ça, mobiliser le maximum de salariées », complète Caroline.
Les fondamentaux syndicaux sont bien assimilés. Résultat aujourd’hui, 17 avril. À suivre.
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