La sidérurgie souffre, des propositions existent
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« On a déjà plusieurs fois eu l’occasion de partir, mais on est restés. Cela montre notre attachement… » Embauché il y a plus de vingt ans chez Ascométal à Leffrinckoucke, près de Dunkerque, Christophe (prénom modifié) vit son troisième redressement judiciaire en dix ans. Ce jeudi matin il participe, ainsi que quasiment tous ses 166 collègues, à l’assemblée générale organisée par l’intersyndicale (CGT, CFDT, CFE-CGC). Le redressement judiciaire a été prononcé fin mars, plaçant dans l’inquiétude les 1 100 salariés du groupe répartis dans le Nord, la Moselle, la Meurthe-et-Moselle, la Loire et les Bouches-du-Rhône. Des élus CGT venus de l’Est et du Sud sont d’ailleurs présents aujourd’hui à Leffrinckoucke, pour témoigner de leur propre situation et soutenir leurs camarades nordistes.
Ascométal, spécialisé dans les aciers spéciaux pour l'industrie pétrolière et gazière, le nucléaire, l’automobile, l’aéronautique ou encore les éoliennes, a appartenu au géant nationalisé Usinor, privatisé en 1995, avant de connaître une succession d’actionnaires. L’actuel, Swiss Steel, a racheté le groupe en janvier 2018. A Leffrinckoucke, son arrivée a été précédée de quelques mois par la fermeture de l’aciérie, puis suivie en 2020 par celle du laminoir. A Hagondange, « cela s’est relativement bien passé les deux ou trois premières années, témoigne Yann Amadoro, secrétaire CGT du CSE. Puis, à écouter nos dirigeants, une accumulation de malchance – le Covid, la crise des semi-conducteurs, la guerre en Ukraine… – a entraîné des déficits. » Jusqu’aux premiers bruits, il y a un peu plus d’un an, que Swiss Steel cherchait à vendre Ascométal. Puis l’annonce officielle, en décembre, de « négociations exclusives » avec l’italien Venete pour la revente des sites, sauf ceux de Leffrinckoucke et Fos-sur-Mer, pour qui « les options » étaient « encore à l’étude ».
A Hagondange, Venete s’était quasiment installé dans les bureaux de l’entreprise. « Tout le monde y croyait, mais ça a échoué », poursuit Yann Amodoro. Les offres de reprise seront closes le 27 mai, avant une audience au tribunal de commerce le 30 mai. Plusieurs dossiers de reprise partielle ont été déposés par Venete, encore lui, un autre italien, Marcegaglia, l’espagnol Sidenor, le fonds de retournement britannique Grey Bull… Une incertitude renforcée par des conditions suspensives posées par les candidats, mais également par des périmètres de reprise et des projets industriels parfois incompatibles entre eux.
A Leffrinckoucke, Sidenor, dont le PDG est venu sur place le 15 mai, annonce désormais reprendre 130 des 167 salariés (contre cent au départ) et créer treize postes administratifs. Une « avancée », certes, mais « insuffisante », commente Jean-Louis Clarys, délégué CGT, l’intersyndicale réclamant « zéro licenciement contraint ». Sidenor promet 22 millions d’euros d’investissements, et une soixantaine de millions d’euros d’apports de fonds, dont il espère la moitié en aides d’Etat. Mais à condition de pouvoir aussi racheter le site de Custines, dans l’Est, qui figure également sur la liste de Venete… Devant cet avenir très hypothétique, Philippe Verbeke, de l’union locale CGT de Dunkerque et de la fédération CGT de la Métallurgie, réclame que l’Etat prenne ses « responsabilités ». C’est-à-dire qu’il envisage une nationalisation, au nom de la «souveraineté industrielle » tant vantée par le gouvernement. Quelques jours avant les échéances de la fin du mois au tribunal de commerce, une nouvelle réunion est prévue la semaine prochaine au ministère de l’Economie.
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