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SALAIRE

Dassault Aviation : le conflit social sur les salaires se durcit

20 janvier 2022 | Mise à jour le 20 janvier 2022
Par | Photo(s) : DR
Dassault Aviation : le conflit social sur les salaires se durcit

En grève depuis un mois pour des revalorisations de salaires, les salariés non-cadres de Dassault Aviation mobilisés sur la plupart des sites continuent de bloquer la production et les mouvements d'avions. Ils dénoncent les inégalités de traitement avec les salariés cadres et réclament 200 euros net d'augmentation.
« Deux-cent balles, ou pas de Rafale », « Pas de pognon, pas d'avions ». Sur les piquets de grève de Dassault aviation, les salariés ne mâchent pas leurs mots. Ni leurs actes : depuis début décembre, c'est la grève dure et aucun avion n'est sorti d'usine. Sur 7 des 9 sites de l'avionneur, les grévistes se relaient jour et nuit pour bloquer la production. Particulièrement mobilisés, les sites d'Anglet (Pyrénées-Atlantiques), de Mérignac (Gironde) ou d'Argenteuil (Val-d'Oise) où des barrages filtrants et feux de palettes ont été installés devant les portes des usines, où l'on dort sur place pour empêcher tout mouvement d'avions. « Les salariés sont très motivés à gagner leur revendication et ont tous en tête le dernier gros conflit sur les salaires d'il y a 20 ans : une grève de 11 semaines qui avait forcé la direction à accepter toutes les revendications, y compris le paiement des jours de grèves », relate Jean-Michel Harostegui, élu CGT du CSEC Dassault Aviation.

Pas d'obole, mais 200 euros net pour compenser deux années d'austérité

À l'origine de ce conflit social, les salaires qui stagnent. En particulier pour les non-cadres dont la rémunération se situe autour de 1700 euros pour des emplois pourtant très qualifiés (bac + 2 minimum exigé à l'entrée chez Dassault). À mettre le feu aux poudres, un accord salarial ratifié le 17 décembre par deux syndicats de cadres, la CGC et l'UNSA, qui entérine une augmentation générale de 1,8 %, jugée indécente par les non-cadres qui eux, réclament depuis quatre mois 200 euros net d'augmentation générale (soit environ 11 %). À juste titre si l'on considère que l'entreprise vient de signer un contrat de 16 milliards d'euros pour la fourniture de 80 Rafales aux Émirats arabes unis, qu'elle dispose de 4 milliards d'euros de trésorerie et de 30 milliards d'euros dans ses carnets de commandes. Après deux années de vaches maigres où les NAO se sont soldées par 0 % en 2020 et + 0,5 % en 2021, cette obole de 1,8 % pour 2022 couvrant à peine l'inflation de 2021 a eu l'effet d'une bombe. « La colère est d'autant plus virulente que le PDG lui-même avait promis de compenser généreusement les deux années d'austérité salariale et de crise sanitaire pendant lesquelles les salariés se sont adaptés à toutes les contraintes », précise Eric Lision, délégué central CGT.

Rejet de l'individualisation des salaires « à la tête du client »

De son côté, la direction de Dassault Aviation fait valoir qu'avec les 1,2 % d'augmentation individuelle (au mérite selon elle, mais à la tête du client selon les salariés) et les 0,5 % de prime d'ancienneté (qui est automatique), elle consent en réalité non pas 1,8 %, mais bien 3,5 % d'augmentation. À quoi s'ajoutent d'autres bonus : une prime Rafale de 500 euros brut, la participation aux bénéfices et l'abondement d'un Perco via l'intéressement.. « On peut tourner le Rubix Cube dans tous les sens, le compte n'y est pas pour les salariés qui ne sont pas dupes de cette politique d'individualisation des salaires et qui réclament des augmentations générales et non des primes à la tête du client ou des plans d'épargne qui ne sont pas du salaire », rapporte le délégué syndical.

Les faux-pas de la direction pour sortir du conflit

Alors que la grève se durcit et menace de durer, la direction a tenté une sortie de conflit mercredi 18 janvier, en convoquant à Mérignac les deux syndicats, CGT et CFDT qui contestent l'accord NAO du 17 décembre. Joint par la NVO au sortir de cette réunion, Eric Lision peinait à qualifier les propositions mises sur la table par Eric Trappier, le PDG de Dassault Aviation (également patron de la puissante fédération de la métallurgie, l'UIMM). « On nous propose toujours la même enveloppe, mais redistribuée autrement et des pseudo-avancées totalement absurdes ». Exemples en vrac : ajouter une clause de revoyure au cas où l'inflation dépasserait 1,8 % dans les mois à venir, mais avec cette contrepartie : en cas de baisse de l'inflation, les augmentations consenties seraient révisées à la baisse. Autre fantaisie : transférer une partie des primes de participation et d'intéressement et même une partie de la prime Rafale vers les salaires pour transformer les 1,2 % d'augmentation individuelle en augmentation générale. « Dans l'absolu, pourquoi pas, la CGT est favorable aux rémunérations socialisées, sauf que c'est techniquement impossible puisque ça relève d'une renégociation des accords que les syndicats de cadres signataires vont évidemment refuser », fait valoir Eric Lision.

Embrouilles, tambouilles et carabistouilles.

Bref, en guise d'avancées, la direction n'a pour l'heure proposé qu'un simple remaniement de l'enveloppe initiale : une augmentation toujours plafonnée à 3,5 %, dont seulement 1,8 % d'augmentation réelle. « Tambouille, carabistouilles, boutiquage et foutage de gueule », ont pour leur part riposté les salariés réunis en assemblée générale en visio, le 18 janvier, et qui, au vu de ce nouveau faux-pas en avant de leur direction, ont décidé de reconduire la grève et de l'amplifier. Peu mobilisés jusqu'ici en raison de carence de représentants syndicaux, les salariés du site d'Istres, en PACA, viennent d'ailleurs de se remettre en ordre de bataille. En attendant de nouvelles propositions, moins fantaisistes et plus réalistes que la direction pourrait annoncer lors d'une potentielle réunion la semaine prochaine.

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