6 septembre 2013 | Mise à jour le 9 février 2017
Né à Téhéran (Iran) en 1973, Mana Neyestani est le fils d'une famille d'intellectuels – un père poète, enseignant la littérature tout comme sa mère. Alors que Mana poursuit des études d'architecture, son frère aîné, Touka, dessine pour la presse : « J'ai toujours dessiné, se souvient Mana, mais mon frère m'a beaucoup encouragé et c'est lui qui m'a présenté à des éditeurs ». Son livre Tout va bien ! décrit en un coup de crayon la situation politique en Iran.
Devenu dessinateur de presse, Mana Neyestani travaille pour différents journaux et notamment pour le supplément week-end d'une publication destinée aux enfants : La thématique décidée par la rédaction était « le cafard ». « L'un des dessins représente un cafard discutant avec un enfant, le cafard employant un mot azéri. Mais ce mot – et c’est dans ce sens que je l’ai utilisé – signifie aussi « quoi », dans le langage populaire en Iran ! »
Quiproquo
L'emploi de ce mot par un cafard a choqué les Azéris : « Ce fut une situation compliquée, un vrai cas d'école pour le journalisme en Iran. Je ne m'attendais vraiment pas à ça. Deux ou trois jours après la publication du supplément, des parents azéris ont appelé la rédaction en chef en disant qu'ils se sentaient offensés. C'est pourtant un mot commun, mais lorsque le rédacteur en chef m'a convoqué, j'ai promis que je ne recommencerai pas et que mon dessin ne cachait aucune arrière-pensée. Mais deux ou trois jours plus tard, il y a eu des manifestations parmi les étudiants azéris de l'université (sans doute organisées par le gouvernement d’Ahmadinejad NDLR) mais aussi au grand bazar, et cela a dégénéré en émeute. Dix jours plus tard, j'ai été arrêté avec l'éditeur du magazine. »
Malentendu, volonté d'utiliser ce dessin comme prétexte pour faire taire un jeune dessinateur visiblement peu favorable au régime d'Ahmadinejad ? Prétexte de la minorité azérie pour montrer sa colère ? « Cela demeure un mystère pour moi », avoue Mana Neyestani qui restera trois mois emprisonné au centre de détention 209 et qui est désormais réfugié en France.
Tout va bien ! de Mana Neyestani, Arte Éditions/Éditions çà et là, 22 euros.