Immigration : le choix de l'arbitraire
Cet article ouvrait pourtant la possibilité aux travailleurs sans-papiers exerçant dans des zones et des métiers en tension d'obtenir de plein droit leur régularisation en préfecture. Le gouvernement en avait fait la caution « sociale » d'un texte qui, par ailleurs, présente d'inquiétants reculs et durcit l'accès aux droits des étrangers. La régularisation par le travail est en réalité déjà possible via la circulaire Valls de 2012 mais pose un certain nombre problèmes. Fruit d'un rapport de force créé grâce aux grandes grèves de travailleurs sans-papiers menées par la CGT, elle reste diversement appliquée en préfecture où l'arbitraire perdure. Par ailleurs, elle laisse le pouvoir d'initiative entre les seules mains de l'employeur. Si celui-ci est réfractaire, les salariés n'ont pas d'autre choix que de se résigner à la clandestinité ou passer par la lutte collective pour obliger leur patron à négocier. La posture de la droite est purement idéologique : les élus Républicains instrumentalisent les débats pour chasser outrageusement sur les terres de l'extrême-droite, n'hésitant pas à reprendre son vocable, avec en ligne de mire les élections de 2027. Leur posture politique fait non seulement fi du réel mais ne sert qu'à diviser un peu plus le camp des travailleurs. On estime à plusieurs centaines de milliers le nombre de travailleurs sans-papiers en France. Ils occupent les postes les plus précaires et les plus pénibles dans des filières souvent en difficulté de recrutement. Les laisser sans droit revient à les laisser à la merci de leur employeur, ce qui tire les droits de tous vers le bas. Les syndicats, qui ont accompagné des centaines de grèves pour la régularisation de travailleurs depuis 2006, observent que l'obtention de papiers s'accompagne toujours d'avancées sociales dans les entreprises concernées. Débarrassé de sa peur, le salarié régularisé peut faire valoir ses droits ; ce rééquilibrage oblige l'employeur à respecter le cadre fixé par la loi. Critique face à cette loi régressive, la CGT restait vigilante quant aux manquements de l'article 3, qui ne sécurisait les travailleurs que sur une durée d'un an et les replongeait dans l'arbitraire préfectoral dès lors qu'ils ne s'inscrivent plus dans une zone ou un métier en tension. Au fond, l'article à l'image de cette loi profondément droitière, s'inscrivait dans une vision purement utilitariste d'une immigration par nature suspecte, qu'on prend et qu'on jette selon ses besoins, loin de toute considération humaniste. A la place, les demandes seront toujours soumises à la discrétion des préfets. L'arbitraire a de beaux jours devant lui.