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RÉFORMES 2018

Grève, mais de quoi on parle ?

9 avril 2018 | Mise à jour le 11 avril 2018
Par | Photo(s) : DR
Grève, mais de quoi on parle ?

Deuxième semaine depuis le début du conflit des cheminots et quatrième journée de grève. Toujours mal nommée « grève perlée » ou « tournante » par la plupart des médias, le mouvement social des cheminots est certes inédit mais tout à fait légal. Petite mise au point lexicologique.

La grève ? Mais quelle grève ? Dans leur grande majorité, les médias désignent les modalités originales du mouvement cheminot en ajoutant au mot grève l'adjectif « perlée ». Une référence aux « privilèges » supposés des agents de la SNCF ? Ou une manière détournée pour exprimer l'illégitimité de ce formidable mouvement social qui se met en place par tous ceux qui, parfois sans nuance (voir Le pompon de M. Pont), dénient aux salariés le droit de se défendre et de se battre pour un service public de qualité.

Car voilà, la grève, ce beau mot qui désigne tout à la fois le bord de mer et « la cession concertée et collective du travail dans le but d'appuyer une revendication professionnelle » est certes un droit reconnu par la Constitution – arraché après des années de luttes – mais aussi juridiquement très encadré.

Pour lutter contre des grèves qui seraient totalement incontrôlables – et sans doute aussi terriblement efficaces –, le droit du travail précise les contours légaux de la grève.

Elle doit remplir des conditions cumulatives telles que :

  1. l'arrêt total du travail même pour une courte durée. Elle ne peut donc pas prendre la forme d'un simple ralentissement dans l'exécution du travail ou d'une exécution partielle de celui-ci ;
  2. des revendications professionnelles comme le salaire, les conditions de travail, les primes, les horaires, etc.
  3. une concertation des salariés : la grève doit être collective, elle ne peut pas être exercée par un seul salarié à moins que ce dernier soit le seul salarié de l'entreprise ou que celui-ci participe à une grève nationale.

C'est pourquoi la grève sauvage (déclenché hors d'un mot d'ordre syndical), tournante (qui affecte divers ateliers ou catégories du personnel de l'entreprise), surprise (déclarée sans préavis ni avertissement), politique (sans but professionnel), la grève du zèle (application à la lettre tous les règlements, afin d'en ralentir le plus possible l'exécution du travail) ou perlée (ralentissement de la cadence du travail sans qu'il y ait d'arrêt complet) sont autant de formes de grève considérées comme illégales.

En l'état, les deux jours d'arrêt de travail, complet, collectif, basé sur des revendications professionnelles des cheminots n'ont donc rien de perlé ni d'illicite, contrairement à ce que certaines prises de parole politiques ou médiatiques laissent entendre à longueur de temps.

À l'heure où ces lignes s'écrivent, le mouvement des cheminots semble prendre une autre tournure : celle d'une grève reconductible votée par l'assemblée générale des cheminots de la gare du Nord à Paris, malgré les mots d'ordre nationaux. Elle aussi tout à fait légale. À suivre…