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DOCUMENTAIRE

Le Travail à la demande, ou la généralisation du travail à la tâche

22 mai 2021 | Mise à jour le 22 mai 2021
Par | Photo(s) : DR
Le Travail à la demande, ou la généralisation du travail à la tâche

Travail à la demande, documentaire de la canadienne Shannon Walsh, dresse un panorama glaçant de la logique mondialisée de la « gig economy », l'économie des petits boulots. Derrière le miracle des applications toutes puissantes des smartphones se cachent pourtant des travailleurs qui se battent pour de meilleures rémunérations et conditions de travail.

Aujourd'hui, que ne peut-on faire grâce à une application numérique ? C'est facile et en libre accès. Des repas livrés à domicile ou au bureau, des voitures avec chauffeur qui vous transportent à la demande, et même une plate-forme d'Amazon – qui non seulement peut vous vendre de tout – mais propose aussi d'accéder « à une main-d’œuvre mondiale, à la demande, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 ».

Créée en 2005, Mechanical Turk, également appelée « M Turk », vise en effet à faire effectuer par des humains, contre rémunération, des tâches dématérialisées plus ou moins complexes qui ne peuvent pas (encore ?) être réalisées par l'intelligence artificielle, par exemple l’analyse de contenu d’images, la traduction… « En 2025, on estime que plus d'un demi-milliard d'individus vivront de tâches issues des plateformes en ligne », pose, sobrement, un carton dans le récit documentaire.

Derrière le miracle de la technologie, une armée de tâcherons

Car le miracle de la « gig economy », qui génère un chiffre d’affaires de 5 000 milliards de dollars, en constante expansion, ne repose pas tant sur les prouesses technologiques de ce que l'on a dans la main que sur une armée de travailleurs précaires dispersés aux quatre coins du monde. Pour explorer ce formidable marché des petits boulots dissimulé derrière nos clicks, la documentariste canadienne, Shannon Walsh, a baladé sa caméra des États-Unis au Nigeria, de la France à la Chine, et rencontré celles et ceux qui, payés à la tâche, font tourner l’économie numérique.

Des rémunérations misérables

À San Francisco, le réfugié yéménite Al Aloudi et la californienne Annette, tous deux chauffeurs Uber appâtés par les promesses de liberté et de gains financiers – finalement bien moindres que prévu, puis presque nuls avec l'arrivée de la pandémie –, luttent pour se faire reconnaître comme salariés par la plateforme.

En France, aussi bien à Strasbourg qu'à Paris, Leila et quelques collègues livreurs à vélo, se lancent dans la même bataille contre Deliveroo, après l'accident fatal arrivé à l’un d’entre eux. Dans un quartier isolé de Floride, Jason le marginal tranquille raconte comment il se débrouille pour arracher à M Turk quelques dollars de plus, alors qu'à Lagos ou ailleurs en Afrique noire, d’autres « travailleurs fantômes » ultra-motivés décrivent un quotidien constamment soumis à leur écran pour ne rater aucune occasion de travailler.

Ces témoignages sensibles, sans pathos et entrelardés de réflexions d'experts du secteur, dressent un panorama à peine croyable de la division planétaire du travail tant il révèle son coût humain, mais aussi environnemental. C'est l'image qui ouvre le film : des millions de vélos urbains jetés dans une décharge de Shenzhen, conséquence de la concurrence effrénée entre loueurs.

Le titre anglais « The gig is up » (« la fête est finie » en anglais) résume la démarche de Shannon Walsh : lever le rideau sur les coulisses de l’expansion dérégulée de l’économie numérique, qui, derrière son image de modernité libératrice, constitue en fait un retour à des conditions d'asservissement d'un autre temps.

Accessible sur arte.fr jusqu'au 19 décembre 2021

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