Louvre : une grève capitale pour les salariés du musée

« Les personnels ont décidé de ne pas lever le préavis de grève et de se remobiliser aujourd'hui, en attendant d'avoir enfin des réponses de la part du Louvre qui soient à la hauteur de nos attentes », a déclaré Élise Muller, du syndicat SUD Culture, à la sortie du musée. Les agents en grève protestent contre les problèmes de sous-effectif, la dégradation du bâtiment ou la hausse des tarifs pour les non-Européens.

Des alertes anciennes, rendues visibles aujourd'hui

Si la grève intervient dans un contexte très médiatisé depuis le spectaculaire cambriolage du 19 octobre 2025 qui a mis à nu les dysfonctionnements en matière de sécurité notamment, les revendications des agents sont loin d'être nouvelles. « Le monde entier nous regarde aujourd’hui, mais nous alertions déjà bien avant. Cela fait plus de vingt ans que nous mettons en exergue les problèmes de sûreté et d'effectifs », rappelle Yvan Navarro, co-secrétaire général de la CGT Culture. L'actualité récente qui touche le musée le plus visité du monde modifie également le rapport de force des employés : « D'abord le cambriolage, puis l'inondation au Louvre constituent des symptômes, mais aussi des leviers pour montrer qu'il n'est pas question d'être sacrifiés sur l'autel des coupes budgétaires », ajoute-t-il.

Une mobilisation rare et unitaire

La grève se distingue aujourd'hui par son ampleur. Près de 300 personnes étaient présentes ce matin lors du vote de reconduction. Christian Galani, représentant CGT, précise : « Ce sont 300 mains qui se sont levées, issues de tous les services », donnant à penser une mobilisation encore plus forte partout dans le musée. « Le Louvre se met rarement en grève de manière aussi massive. La dernière fois, c'était en 2013 », souligne Yvan Navarro. Une mobilisation importante qui rassemble les organisations syndicales CGT, SUD et CFDT dans une lutte commune. Une unité qui témoigne d'une solidarité forte autour des revendications des salariés pour l'amélioration de leurs conditions de travail.

Cette grève pourrait également servir d'exemple. Ce matin, devant le Louvre, des représentants des équipes de l'Opéra Garnier sont venus à la rencontre des journalistes pour dénoncer à leur tour leurs conditions de travail et évoquer la possibilité d'une grève. Une hypothèse qui alerte le co-secrétaire général de la CGT Culture : « Est-ce que les autres musées suivront ? Nous ne le souhaitons pas particulièrement. Nous préférerions que le symptôme du Louvre soit suffisant pour éclairer le parlement et le gouvernement sur la nécessité d'apporter des mesures et des réponses pour l'ensemble des musées nationaux ».

Budgets contraints et direction absente

Cambriolage, inondation, tensions quotidiennes avec le public et parcours interminables pour les visiteurs : les récents événements illustrent, selon les syndicats, les effets concrets des manquements du musée. Sur le terrain, la pression est constante. « Il y a énormément de souffrance au sein des collectifs de travail. Quand vous subissez dix, vingt, trente micro-agressions par jour, le ministère nous répond d'aller porter plainte. Mais ce n'est pas notre rôle », dénoncent-ils.

Les syndicats pointent enfin une rupture du dialogue social avec la direction du musée. « Nous n'avons pas été reçus une seule fois depuis le dépôt du préavis de grève », déplore Valérie Baud, représentante CFDT, rappelant des revendications salariales anciennes restées sans réponse. « La réponse de la direction, c'est le mépris et le silence », ajoute Alexis Fritche, secrétaire général Culture CFDT.

La direction du Louvre a quand même indiqué une ouverture partielle du musée. À l'approche des fêtes, la poursuite de la grève place désormais l'État face à ses responsabilités, sous le regard d'un public mondial. Une lutte unitaire appelée à se poursuivre en l'absence de dialogue avec la direction.

Emil Dromery