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CINÉMA

Colporteurs d’images

28 juin 2017 | Mise à jour le 9 octobre 2017
Par | Photo(s) : Le Pacte
Colporteurs d’images

Agnès Varda photographie depuis près de sept décennies. JR promène depuis une quinzaine d'années son camion-photo dans tous les coins du monde où il colle ses portraits géants. Leur amour de la rencontre des gens simples, authentiques, donne à leur documentaire Visages Villages un goût de chemin des écoliers.

Elle a 88 ans, il en a 33. L'une photographie, l'autre aussi. Agnès Varda et JR signent ensemble un film tendre, humain, où la fantaisie voisine avec la gravité, la joie avec les larmes. Sillonnant les routes de France à bord de l'étonnant camion « cabine à photos géantes » de JR, le duo va faire halte dans les villages (à l'exception du port du Havre) et y proposer des photo-collages aux habitants.

Malgré leur allure de chemins de traverse, les étapes du périple de nos deux compères ne sont pas choisies tout à fait au hasard. Ici, la mémoire ouvrière des mineurs, là, le souvenir d'un ami et modèle d'Agnès Varda alors jeune photographe, ou bien cet insolite village en ruine sans avoir été achevé et encore le port de containers du Havre, lieu d'une précédente création de JR…

Tels des colporteurs de mémoire, Agnès et JR collectent en image celle d'un instant, passé ou présent, ou d'une histoire de vie. Un peu comme l'avait fait en 2012 Raymond Depardon, en solitaire, avec son Journal de France.

La magie de ces grandes images opère, chacune prend littéralement une autre dimension, mais aussi une autre profondeur en s'exposant au regard des autres. L'échange qui naît alors est un terreau sur lequel la cinéaste chevronnée et le novice vont semer des graines de matière à filmer. Poignantes ou drôles, mais toujours chargées de sens et au plus près des êtres.

Ils ont, l'une et l'autre, le sens de la proximité, du contact humain, du travail en équipe et un vrai respect pour ceux qui « œuvrent », que ce soit en produisant des fromages de chèvre, le son du carillon du clocher, la sécurité pour les travailleurs d'une usine, du soutien à des maris dockers…

C'est, au final, un film qui fait du bien, même si la séquence finale lors du voyage en Suisse nous fâche, non pas avec Agnès Varda ou JR, mais avec celui qu'ils étaient partis y rencontrer…

Reste qu'on a le sentiment d'un passage de relais entre deux générations, d'une transmission qui, dans le monde actuel, est un trop rare et bel exemple.

Visages VillagesEn salles le 28 juin, 1 h 30.