Simon Delétang, planches de salut
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À partir de la fin des années 1960, quelques centaines d'étudiants, militants d'organisations de la gauche non parlementaire séduits par le maoïsme, décident de « s'établir » comme ouvriers en usine et d'y inscrire leur activité militante. Robert Linhart fait partie de ceux-là. Il est embauché comme OS sur le site de Citroën de la porte de Choisy, l'une des pires entreprises en matière d'organisation du travail et de répression antisyndicale. Il y restera une dizaine de mois, avant de s'en faire licencier.
De cette expérience, Robert Linhart tirera un ouvrage de témoignage et d'analyse, paru en 1978 : L'Établi. Un nom qui se réfère à la fois au statut de ces militants devenus pour un temps ouvriers, et à la table de travail fabriquée sur mesure par un ouvrier proche de la retraite, qui retape les portières de voitures endommagées avant de les renvoyer à la chaîne, et que le grand patron viendra humilier.
Cinquante ans après cette expérience et quarante ans après la parution du livre, Oliver Mellor met le texte en scène avec la Compagnie du Berger (d'Amiens), pour une pièce éponyme et très fidèle au texte, jouée au théâtre de l'Épée de bois à la Cartoucherie de Vincennes (Route du Champ de Manœuvre, Paris 12e).
Elle se veut d'abord, comme le livre, une description de l'univers de l'usine, de la chaîne. À peine entré dans la salle du théâtre et avant même l'arrivée des acteurs, les spectateurs sont projetés dans un univers de métal et soumis au bruit sourd, régulier, des tôles que l'on frappe. Linhart, campé par Aurélien Ambach-Albertini, découvre peu à peu le travail de ceux qu'une hiérarchie réduit à « rien » du fait de leur absence de diplôme ou de leur origine : la majorité de ses collègues de chaîne sont des travailleurs immigrés venus d'Algérie, de Pologne, d'Italie… Il découvre la difficulté des gestes en dépit de leur caractère répétitif et déshumanisé.
Mais il observe aussi les résistances au quotidien. Celles de la solidarité entre ouvriers, celles de la minute gagnée pour fumer une cigarette, celle qui se joue dans les vestiaires, le soir, lorsque chacun se nettoie et troque son bleu contre un vêtement de ville…
Linhart, lui, est aussi entré à l'usine pour… la révolution. Il se syndique à la CGT, dont le responsable se bat pour faire reconnaître ce qui le tue à petit feu comme maladie professionnelle, de même que nombre de ceux qui ont subi les peintures et autres produits chimiques des années durant. L'ancien étudiant, qui fait circuler livres et journaux, hésite à arracher du temps, le soir, après le labeur, à ceux qui ont hâte de quitter les lieux.
Jusqu'à l'annonce par la direction d'heures supplémentaires non payées. Pour faire payer aux ouvriers la grève et les avancées de 68. C'est alors qu'ils décideront la grève, pour laquelle Linhart propose une lecture critique du rôle de la CGT. Pour lui et ses quelques camarades qui organisent l'action au café des Sports, celle-ci passera par un « comité de base ». Au-delà de la grève, ce sont les méthodes répressives qu'il décrit avec précision : pressions particulières sur les femmes et les travailleurs immigrés (en particulier par des petits chefs, souvent anciens militaires attachés à l'Algérie française), usage de la force brutale de milices patronales, rôle du syndicat patronal qu'est la CFT… Les ouvriers, cette fois, ne gagneront pas cette lutte, mais auront relevé la tête.
Olivier Mellor a su donner à voir ce moment d'histoire chez Citroën par une mise en scène sobre, alternant lectures au micro et jeux de rôles, jouant des lumières et du son, entre guitare électrique et pièces d'Erik Satie… La pièce se joue jusqu'au premier juillet.
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