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Référendum

Kanaky : l’indépendance repoussée

7 novembre 2018 | Mise à jour le 7 novembre 2018
Par | Photo(s) : Nicolas Job / SIPA
Kanaky : l’indépendance repoussée

Le « non » l'a emporté dimanche 4 novembre en Nouvelle Calédonie lors du référendum sur l'indépendance. Mais la très fort percée des indépendantistes leur permet d'espérer la tenue d'un ou même deux autres référendums d'ici 2022.

Dimanche 4 novembre, la participation au référendum d'autodétermination en Nouvelle Calédonie a été massive : 80,6%. Le « non » à l'indépendance de la Kanaky l'a emporté, avec 56,4% des suffrages exprimés (soit un peu plus de 78.300 voix) contre 43,6%, mais l'écart est beaucoup moins important que ce que prédisaient les sondages. Aussi les indépendantistes pouvaient-ils se satisfaire de leur score.

Vers l'accord de Matignon de 1988Les années 80 ont été celles de tensions meurtrières entre descendants des colons et indépendantistes. Alors que ceux-ci bloquent fin 1984 l'exploitation du nickel et boycottent les élections territoriales, le 5 décembre 1984 des Caldoches assassinent dix Kanak dans une embuscade. En janvier 1985, Yves Tual, un jeune Caldoche , est tué. Des caldoches déclenchent des émeutes à Noumé. Le 12 janvier 1985, les indépendantistes Eloi Machoro et Marcel Nonnaro sont tués par le GIGN. L'état d'urgence est instauré.
En 1986, l'Onu réinscrit la Nouvelle Calédonie sur la liste des territoires à décoloniser, 39 ans après en avoir été rayée.
Le 22 avril 1988, l'attaque d'une gendarmerie par un groupe d'indépendantistes fait quatre morts. 16 gendarmes sont retenus en otages dans la grotte d'Ouvéa. Le 5 mai, l'armée et le GIGN donnent l'assaut : 19 preneurs d'otages sont tués dont certains assassinés après la fin de l'opération. Le 26 juin sont finalement conclus les accords de Matignon-Oudinot, qui prévoient un vote sur l'autodétermination dix ans plus tard et une politique de réduction des inégalités dont souffrent les Kanak.

Un long processus

Ce vote est en fait le fruit d'un long processus (voir ci-contre). En 1988, les accords Matignon-Oudinot, conclus entre les indépendantistes et leurs opposants sous l’égide du gouvernement de Michel Rocard, prévoyaient une période de développement de dix ans, assortie de garanties économiques et institutionnelles pour la communauté kanak, avant un référendum à venir sur l'autodétermination.

Dix ans plus tard, l’accord de Nouméa de 1998 entérinait, lui, le transfert de certaines compétences de la France à la Nouvelle Calédonie (en excluant les domaines régaliens de la défense, de la sécurité, de la justice et de la monnaie) et un référendum en 2018 sur l'indépendance, possiblement suivi de deux autres en cas de victoire du non. Ceux-ci peuvent avoir lieu d’ici à 2022, à la demande du tiers des membres du Congrès calédonien.

Des inégalités toujours criantes

D'ici là, souligne l'Union syndicale des travailleurs Kanak et exploités (USTKE, qui appelait au boycott du scrutin en critiquant la composition des listes électorales), beaucoup reste à faire en matière de développement et de réduction des inégalités entre Kanak et caldoches (descendants des colons).
Trente années de développement économique n'ont pas profité également à tous.Les Kanak représentent près de 40% de la population (contre 27,24% pour ceux d'origine européenne). Mais ils sont plus de 32,5% (contre 16,6%) à n'avoir aucun diplôme, 4,1% (contre 39,3%) à être titulaires d'un diplôme du supérieur, 2,7% (contre 19,6%) à accéder à un emploi de cadre. Les jeunes Kanak sont plus que les autres frappés par le chômage, lequel dépasse 35% chez les 15-25 ans.
17% des familles calédoniens vivraient sous le seuil de pauvreté. Ce taux atteint même 35% dans la province du Nord et 52% aux Iles Loyauté. L’écart entre les revenus des 10 % les plus riches et ceux des 10 % les plus pauvres est estimé à 7,9 (contre 3,6 en métropole), au détriment de la population kanak.

Quelles perspectives

Économiquement, le nickel représente une richesse économique et stratégique (dont l'extraction demeure polluante). Pour la France, la Nouvelle Calédonie en est le premier producteur, ce qui la place au sixième rang mondial. Mais la nécessaire diversification économique impose aujourd'hui d'autres investissements.
A la mi-décembre, le Premier ministre Édouard Philippe réunira à Paris un comité des signataires de l'accord de Nouméa « pour tirer collectivement les conclusions du référendum ». Puis en mai 2019 doivent se tenir des élections provinciales (dans les provinces du Sud, du Nord, et des Iles) et renouveler les élus Congrès, lequel élit le gouvernement collégial.

 

Quelques repères chronologiques– septembre 1774 : James Cook « découvre » l'archipel et le nomme Nouvelle-Calédonie.
– septembre 1853 : La France s'empare de la Nouvelle-Calédonie qui devient en 1864 une colonie pénitentiaire.
– 1878-1879 : Grande révolte kanak contre les colons.
– 1887 : mise en place du Code de l'indigénat.
– 1894 : La Nouvelle-Calédonie devient une colonie de peuplement, l'Etat français se proclame propriétaire de la majorité des terres, les Kanaks sont cantonnés dans des réserves.
– 1917 : Nouvelle révolte kanak
– 1931 : Lors de l'Exposition coloniale, des Kanak sont exposés au public dans des cages.
– 1972 : Le Premier ministre Pierre Messmer préconise une « immigration massive de citoyens français métropolitains » en Nouvelle Calédonie.
– 1975 : Création du Parti de libération kanak (Palika), puis en 1981 de l'Union syndicale des travailleurs kanaks et exploités (USTKE) et en 1984 du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS).