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EXTRÊMES DROITES

Macron reprend les thèses de l’extrême droite et instrumentalise l’immigration

18 septembre 2019 | Mise à jour le 19 septembre 2019
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Macron reprend les thèses de l’extrême droite et instrumentalise l’immigration

« Les bourgeois n'ont pas de problème avec ça : ils ne la croisent pas. Les classes populaires vivent avec ». C'est ce qu'a déclaré Emmanuel Macron lundi 16 septembre au sujet de l'immigration. Pour substituer aux questions sociales un fantasme identitaire.

Vous voulez faire passer une réforme sociale ou économique injuste et impopulaire ? La recette, certes éculée, reste simple : détourner les mécontentements. La cible : les migrants. De nouveau ce 16 septembre, Emmanuel Macron a en effet mis en avant la question de l'immigration. Et l'on aura du mal à croire qu'il s'agit là d'un simple hasard de calendrier.

Occulter le social

Alors que le gouvernement entend faire adopter sa réforme des retraites qui augmentera la durée de travail, réduira le montant des pensions et fera du « point » une variable d'ajustement budgétaire rendant ce montant aléatoire, il sent monter les inquiétudes et les colères bien au-delà des seules classes populaires.

Déjà, en décembre dernier, répondant aux mobilisations des Gilets jaunes par son projet de « grand débat », le locataire de l'Élysée avait annoncé faire de l'immigration, pourtant absente des sujets de revendications, l'un de ses cinq chapitres. Il ressortait ainsi du chapeau un thème que la question sociale, revenue au centre du débat, avait sinon éclipsé du moins marginalisé. Et d'utiliser la même logique dans sa « Lettre aux Français » en début d'année, en leur proposant de se prononcer sur l'idée de quotas de migrants.

Cette fois, c'est en faisant de l'immigration un sujet de débat à l'Assemblée nationale le 30 septembre puis au Sénat le 2 octobre qu'il espère occulter la question sociale.

Sur le terrain de l'extrême droite

Hors de question, selon le chef de l'État, de laisser ce sujet régalien à l'extrême droite, dont il a fait son seul et unique adversaire électoral espérant ainsi à la fois oblitérer toute alternative de progrès social et se présenter comme le rempart face au pire.

Dès lors, pour prétendre dégonfler l'audience de cette extrême droite, tout se passe comme s'il était préférable de reprendre ses thèses à son compte et de les mettre en œuvre plutôt que d'en montrer l'absurdité et l'extrême nocivité.

Adoptée en août 2018, la loi Collomb sur l'asile et l'immigration renforçait déjà les mesures de contrôle et de sélection des migrants, augmentait la durée de rétention, multipliait les possibilités d'expulsion… Emmanuel Macron a cette fois annoncé vouloir durcir davantage le droit d'asile. Transformant les demandeurs en autant de suspects potentiels.

Discours identitaires

« Les bourgeois n'ont pas de problème avec ça : ils ne la croisent pas. Les classes populaires vivent avec ». « Ça », dans la bouche présidentielle, c'est donc l'immigration. Transformée en « problème » pour les « classes populaires ».

Mais les immigrants ne sont plus seulement présentés comme des concurrents économiques directs notamment sur le « marché » de l'emploi et en quête d'aides sociales multiples, et ce en dépit de toutes les études montrant l'apport de l'immigration à l'économie nationale. Marc Fesneau, ministre des Relations avec le Parlement, va en fait jusqu'à évoquer l'« insécurité culturelle » qu'ils représenteraient dans « la France périphérique ».

À ceux qui souffrent des politiques gouvernementales et patronales, l'ennemi est désigné. C'est le migrant. Érigé non plus seulement en concurrent, mais en danger identitaire. Dans la droite ligne de l'invention de Nicolas Sarkozy d'un ministère de l'Immigration ET de l'« Identité nationale ». Ou du changement de dénomination du commissaire européen en charge des « Migrations, Affaires intérieures et Citoyenneté » devenue celui de la « Protection du mode de vie européen », au singulier

Ceux qui prétendent combattre l'extrême droite s'acharnent donc à en banaliser la sémantique. Pourtant, les évolutions politiques de plusieurs pays européens (Autriche, Pologne, Hongrie…) comme des États-Unis, d'Israël ou du Brésil montrent où mène la substitution des fantasmes identitaires aux revendications sociales. Ce sont bien sûr les migrants qui en paient le prix le plus élevé. Mais c'est la société tout entière qui subit alors l'injonction à la suspicion généralisée, la relégation de la diversité, culturelle ou politique, l'étiolement de la démocratie, l'étouffement des droits et du droit.