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Transport aérien

Air France cloue son personnel au sol

6 juillet 2020 | Mise à jour le 6 juillet 2020
Par | Photo(s) : Patrick Chesnet
Air France cloue son personnel au sol

Rassemblement, appelé par les syndicats, devant le siège d'Air France, à Roissy, le 3 juillet 2020.

Vendredi 3 juillet, la direction d'Air France annonçait la suppression de plus de 7 500 emplois au sein de la compagnie aérienne, et de sa filiale Hop!, à l'horizon 2022. Oubliant au passage 1 800 salariés de Servair, autre de ses filiales, eux aussi concernés par cette restructuration. Le tout, malgré une aide de 7 milliards d'euros de l'État.

Plutôt remontés qu'ils étaient les salariés d'Air France assemblés ce vendredi 3 juillet devant le siège du groupe, à Roissy, alors que leurs dirigeants s'étaient quant à eux « délocalisés » à une vingtaine de kilomètres de là, à Montreuil, pour un CSE extraordinaire à l'issue duquel devaient être annoncées les mesures liées à la restructuration de l'entreprise.

« Dès qu'ils entendent parler de mouvement social, ils fuient leurs responsabilités », ironise Pascal qui, en trente ans de service à la maintenance d'Air France, a déjà connu neuf plans de départ volontaire depuis 2008 avec, à chaque fois, « une baisse massive des effectifs ».

L'emploi en ligne de mire

Cette énième mouture ne déroge pas à la règle. D'ici à 2022, c'est 6 560 emplois chez Air France (16 % des effectifs), et 1 020 autres chez Hop! (42 % du personnel) qui vont disparaître. Cela par la grâce d'« une pyramide des âges favorable » permettant de « nombreux départs naturels », dixit la direction.

« Pyramide des âges » où les plus âgés domineraient, ce qui n'est pourtant pas le cas de ces jeunes salariés de Hop! à Lille, dont le site est pourtant déjà fermé. Incompréhensible pour leur délégué, David Tabary, alors que cette filiale « est le plus gros prestataire de l'aéroport de Lille et qu'il est question de développer cet aéroport dont la concession vient d'être accordée pour vingt ans au groupe Eiffage [depuis le 1er janvier 2020, NDLR] ».

Surtout, avec cette fermeture, c'est « 50 emplois directs et autant d'indirects qui disparaissent dans la région et les places risquent d'être chères pour un reclassement chez Air France ».

Vers un modèle social low cost

« Ce qui s'opère là est la casse du modèle social d'Air France et la destruction organisée de la compagnie et du groupe », dénonce Karine Monségu, secrétaire générale de la CGT Air France. D'autant plus « scandaleux », selon elle, que les prêts du gouvernement, 7 milliards d'euros destinés à « maintenir les emplois », « vont servir à virer des milliers de personnes pour, après, quand l'activité va reprendre, remplacer ces salariés dont le socle social a été acquis de dure lutte par un modèle “low costisé”, avec des personnels moins payés, plus flexibles et des conditions de travail extrêmement dégradées ».

Crainte étayée par la volonté affichée de Ben Smith, patron « ultralibéral » nommé à la tête d'Air France en 2018, d'arriver à « un taux de rentabilité de 8 % pour Air France ». Impossible à tenir selon la syndicaliste au vu des coûts structurels de cette activité. Sauf à « précariser les employés ».

Servair touché aussi

Reste que l'addition, déjà salée, n'est pas tout à fait exacte. Car sont omis (volontairement ?) les quelque 1 800 personnels de Servair – sur les 6 500 que compte cette autre filiale d'Air France spécialisée dans le catering, le nettoiement ou l'assistance aux personnes –, qui vont aussi être poussés vers la sortie. « Et pas de plan de départ volontaire pour nous ! », fulmine Manuel Goncalves, délégué syndical central.

Appels d'air pour d'autres compagnies

Lequel prévient déjà des conséquences. « Avec la réduction de son offre de vols, Air France va en profiter pour augmenter ses prix mais, en même temps, réduire ses services pour les passagers », annonce-t-il. De quoi « créer des appels d'air pour les compagnies low cost qui, à défaut de services, proposent des prix plus bas », affirme le syndicaliste.

Pis, avec ces disparitions d'emplois, c'est également celles de nombreux savoir-faire qui sont à redouter. Qu'il sera pour le coup bien difficile de récupérer. « Nous devons nous inscrire dans la construction d'une convergence des luttes avec les salariés des autres entreprises également touchées par cette politique aujourd'hui menée au prétexte de Covid-19 », affirme Karine Monségu. Plus que nécessaire alors que la casse de l'outil Air France, comme désormais d'autres, est bel et bien entamée.