Gaza, non aux crimes de guerre israéliens
Le déménagement de l'ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem en violation du droit international a mis le feu aux poudres. Contre les manifestants palestiniens, l'armée... Lire la suite
« L'occupation continue de la Palestine par Israël et les colonies illégales sont les causes profondes du sort de ces travailleurs qui dépendent d'Israël pour leurs moyens de subsistance et des membres du ménage qui en dépendent à leur tour » : pour Sharan Burrow, secrétaire générale de la Confédération syndicale internationale (CSI), « ce n'est que lorsque la Palestine deviendra un État indépendant existant aux côtés d'Israël, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité de l'ONU, que son économie pourra prospérer et que son peuple n'aura plus à compter sur des emplois de qualité inférieure. »
Dans son nouveau rapport sur les travailleurs palestiniens en Israël et dans les colonies, la CSI met en cause « la dépendance des Palestiniens à l'égard du marché du travail israélien » du fait de l'occupation qui dure depuis bientôt cinquante-cinq ans. Celle-ci « les rend extrêmement vulnérables à de nombreuses formes d'exploitation ».
Les chiffres sont parlants. Ainsi, en 2019, le taux de chômage a atteint 25 % en Palestine : 15 % en Cisjordanie occupée et 54 % dans la bande de Gaza soumise depuis plus de quinze ans à un siège terrestre, aérien et maritime tout aussi illégal. Dans ce petit territoire gazaoui s'entassent deux-millions d'habitants dont plus des deux tiers sont des réfugiés. Du fait du siège, des produits essentiels continuent de manquer, jusque du matériel scolaire, l'électricité est limitée à quelques heures par jour dans le meilleur des cas et l'accès à l'eau potable est insuffisant.
La CSI le dénonce : « le salaire minimum moyen ne suffit en aucun cas à assurer un niveau de vie décent à une famille palestinienne ». L'occupation empêche toute économie viable d'exister et plusieurs dizaines de milliers de travailleurs palestiniens de Cisjordanie sont contraints de vendre leur force de travail dans des entreprises israéliennes notamment dans la construction, voire dans les colonies illégales sur des terres qui leur ont été confisquées par l'occupant.
Aucun permis de travail n'a en revanche été accordé à des travailleurs de Gaza depuis qu'Israël assiège le territoire.
Mais le permis de travail ne constitue pas une garantie de protection sociale. En réalité, « à peine 16 % des travailleurs palestiniens ayant un permis ont bénéficié de congés de maladie rémunérés » alors même que « les travailleurs palestiniens sont principalement employés à des emplois à forte intensité de main-d'œuvre, dangereux, difficiles et sales où le risque d'accident du travail est élevé (…) 59 % des travailleurs dans les zones industrielles travaillent dans des conditions dangereuses pour la santé sans disposer d'équipement de protection approprié (…) Il n'y a que 50 inspecteurs israéliens pour 14 000 chantiers de construction en cours en Israël (…) Seuls 3 % des travailleurs avaient à leur disposition un équipement de protection approprié ». En outre, « à peine 21 % ont bénéficié de congés annuels rémunérés » (source : BIT 2019).
Le rapport met aussi en évidence « l'humiliation d'avoir à faire la queue aux postes frontaliers pour entrer en Israël », des check-points militaires qui parsèment également l'intérieur du territoire palestinien lui-même. Il dénonce de même « le système oppressif de courtage de main-d'œuvre que de nombreux travailleurs sont encore contraints d'utiliser ».
La confédération syndicale internationale réclame donc la « fin complète du système de courtage de main-d'œuvre exploiteur » de même que le respect « des droits fondamentaux des travailleurs (…) y compris un salaire minimum adéquat, la santé et sécurité au travail et limites maximales des heures de travail, l'inspection du travail, la protection sociale, l'exigence de diligence raisonnable pour les employeurs ».
La confédération met aussi en évidence « les effets dévastateurs de la pandémie de coronavirus sur l'économie du Territoire palestinien occupé », lesquels « risquent fort d'accroître encore la dépendance envers Israël pour ce qui est des emplois, ce qui aura forcément une incidence négative sur les droits de la main-d'œuvre »
Là encore, les chiffres sont tragiquement parlants. « En avril 2020, plus de 453 000 travailleurs palestiniens avaient perdu leur emploi et plus de 115 000 familles ont ainsi basculé dans la pauvreté. La Banque mondiale estime qu'à cause de la pandémie, 30 % des familles de Cisjordanie vivront dans la pauvreté (…) Les chiffres révèlent une réalité encore plus rude pour les familles de Gaza, où 64 % des familles devraient basculer dans la pauvreté ».
À cela s'ajoute le refus par Israël de respecter le droit international également en termes de responsabilité sanitaire de l'occupant en territoire occupé comme le stipulent les conventions de Genève. Ainsi, si Tel-Aviv peut se vanter d'avoir vacciné une partie importante de la population israélienne et des colons en Palestine occupée, les autorités israéliennes n'ont en revanche fourni que quelques milliers de doses de vaccins pour les Palestiniens que ce soit à Gaza ou en Cisjordanie dont Jérusalem-Est, et en réalité essentiellement attribuées aux travailleurs qui se rendent en territoire israélien ou dans les colonies.
Pourtant, conformément aux quatrièmes conventions de Genève, Israël en tant que puissance occupante doit fournir à la population qu'elle occupe les vaccins en même quantité et qualité qu'à sa propre population, de même que les tests et toute forme de protection. C'est pourquoi la coordination européenne des ONG pour la Palestine et l'Association France Palestine Solidarité ont lancé un appel contre cet apartheid sanitaire, un appel adopté par le Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens dont, notamment, la CGT.
Au-delà, il est urgent de mettre un terme à l'occupation de la Palestine par Israël. La CSI continue d'en dénoncer l'illégalité, et de dénoncer l'illégalité des colonies. Elle souligne que « toute relation commerciale avec les colonies contribue à perpétuer leur existence, en violation du droit international » et que « conformément aux principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits humains, les entreprises et les investisseurs doivent cesser d'être complices de ces colonies illégales et mettre un terme aux activités qu'elles y déploient. »
Elle « appelle la communauté internationale à poursuivre ses efforts pour défendre la solution des deux États, basée sur les résolutions nos 242 et 338 du Conseil de sécurité des Nations Unies [qui s'appuient notamment sur le principe de l'illégalité d'acquisition de territoires par la force, NDLR] , et sur les frontières d'avant 1967, avec Jérusalem-Est en tant que capitale d'un État palestinien »
L'arrivée à la Maison-Blanche de Joe Biden a permis de ce point de vue une rupture avec la politique de son prédécesseur, pressé de violer lui-même le droit international pour soutenir ses alliés de droite extrême au pouvoir à Tel-Aviv. Donald Trump avait en effet souscrit à l'annexion illégale de Jérusalem ainsi que du Golan syrien par Israël, refusé de reconnaître l'illégalité des colonies et la nécessité d'un État palestinien dans les conditions précisées par le droit international. Joe Biden a en outre décidé de reprendre la participation américaine au financement de l'Unrwa (l'office des Nations unies pour les réfugiés palestiniens) qu'avait suspendue Donald Trump.
Reste que, contrairement notamment à la thèse que ne cesse de répéter Emmanuel Macron, l'établissement d'un État palestinien indépendant ne peut être soumis au bon vouloir de Tel-Aviv dans une négociation totalement asymétrique et donc ne peut être soumis à la seule négociation israélo-palestinienne si celle-ci se déroule en dehors du cadre des Nations unies et sans garantie sur l'application du droit international. Car les dirigeants israéliens le répètent : ils ne veulent pas d'un État palestinien, sinon réduit à peau de chagrin et morcelé, sans Jérusalem-Est, sans droit au retour pour les réfugiés et ils entendent annexer l'essentiel des colonies qui transforment le territoire palestinien en une série de micro-enclaves sans aucune continuité territoriale ni viabilité.
Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a défendu le 2 avril auprès de son homologue israélien la nécessité que les Palestiniens jouissent enfin de droits égaux à ceux des Israéliens, et qu'Israéliens et Palestiniens jouissent d'un degré égal de liberté, de sécurité, de prospérité et de démocratie. Un pas important. Pour autant, les mots ne suffiront pas. Pas plus que les condamnations verbales répétées de Paris ou de Bruxelles de la colonisation israélienne qui ne cesse de s'étendre.
Cela suffira d'autant moins que, à l'issue des élections législatives du 23 mars, les quatrièmes en moins de deux ans, Benjamin Netanyahu, inculpé pour corruption, a été de nouveau désigné le 6 avril pour former un nouveau prochain gouvernement. Il a déjà annoncé qu'il refusait la mission de la Cour pénale internationale censée enquêter sur les crimes de guerre et potentiels crimes contre l'Humanité commis par les responsables israéliens notamment lors de l'offensive meurtrière de l'hiver 2008-2009 contre la population de Gaza. Et en outre, faute de majorité absolue, il a tendu la main d'un côté à son ancien allié aujourd'hui concurrent Naftali Bennett, chef de file de la droite radicale et de l'autre au parti islamiste Raam (qui a remporté quatre sièges), tandis qu'il a négocié le soutien de l'extrême droite d'Itamar Ben Gvir.
Celui-ci a pourtant été inculpé plusieurs fois pour incitation au racisme et soutien au terrorisme anti-arabe. Il est ouvertement un disciple du rabbin Meïr Kahane, fondateur du parti anti-arabe Kach, considéré comme « terroriste » depuis l'assassinat par l'un de ses membres (Baruch Goldstein) de 29 Palestiniens à la mosquée d'Hébron en février 1994, en Cisjordanie.
Non seulement Benyamin Netanyahou continue à refuser un État palestinien et à intensifier la colonisation, mais son allié Itamar Ben Gvir réclame l'expulsion de Palestiniens d'Israël (en l'occurrence les descendants de ceux qui n'avaient pas été expulsés avant et pendant la création de l'État d'Israël puis pendant la première guerre israélo-arabe, entre 1947 et 1949).
C'est donc bien la question de l'impunité d'Israël et des sanctions pour y mettre un terme qui est en jeu pour que le droit international s'impose enfin.
Une première étape aura lieu lors des élections législatives palestiniennes du 22 mai prochain puis de la présidentielle du 31 juillet, Tel-Aviv refusant toute campagne et tout vote à Jérusalem-Est, en violation là encore du droit international, la communauté internationale est donc amenée à intervenir.
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