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EXTRÊME DROITE

« L’extrême droite se nourrit de l’abandon des partis à lutter contre le capital »

18 avril 2024 | Mise à jour le 18 avril 2024
Par | Photo(s) : Nadjib Touaibia
« L’extrême droite se nourrit de l’abandon des partis à lutter contre le capital »

Rassemblés le 16 avril à la Bourse du travail à Paris, plusieurs syndicats européens ont débattu de montée de l'extrême droite en Europe. Se posant en rempart contre le fascisme, elles prônent la construction d'alternatives communes de progrès social.

C'est un constat qui interpelle et inquiète le camp démocratique européen : partout sur le territoire de l'Union européenne, l'extrême droite monte en puissance. A moins de deux mois des élections au Parlement, l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) est créditée de 18 à 20% dans les sondages. En France, le Rassemblement national (RN) est en tête des intentions de vote. Idem, en Italie, gouvernée depuis deux ans par Giorgia Meloni et son parti postfasciste Fratelli d'Italia. Tous les sondages le disent : l'extrême droite pourrait réaliser une percée historique lors du prochain scrutin, du 6 au 9 juin, et remporter un quart des sièges.

« Les seuls phares stables face à une extrême droite très structurée »

Que faire dans les milieux professionnels pour contrer son influence ? Comment se coordonner autour de projets alternatifs ? Réunis à la Bourse du travail, à Paris, le 16 avril, la CFDT, la CGT, l'Unsa, la DGB allemande et la CGIL italienne ont débattu autour de ces axes de réflexion et de la dynamique de lutte à mettre en place pour le monde du travail. « Face à l'extrême droite, on ne peut pas avoir de défaillance, pas le moindre doute, parce que, eux, n'en ont aucun », affirme Dominique Corona, secrétaire général adjoint de l’Unsa. Dès lors, pour éviter qu'ils ne propagent leurs idées, « nous travaillons à démonter un à un leurs arguments de programme ». Selon lui, « les syndicats sont actuellement les seuls phares stables face à une extrême droite très structurée ». Le terrain, premier espace de lutte, doit donc être investi. Marylise Léon, numéro un de la CFDT, souligne l’importance d’informer les salariés, de former les militants et de mener des actions concrètes afin de démontrer que les politiques de l’extrême droite servent les intérêts du marché. Toutefois, « il est extrêmement difficile de contrer les sujets imposés par l'extrême droite », reconnaît-elle. « L'affaiblissement des partis a laissé le champ libre au Rassemblement National » et « très peu d'organisations politiques s'intéressent au travail », note la secrétaire générale. Même tendance en Italie, où « lors du précédent scrutin, 18 millions d'Italiens se sont abstenus. Le pays compte 7 millions de travailleurs pauvres. La précarité éloigne de la politique. Le travail doit être remis, pas seulement au niveau des droits, mais de son sens, au cœur des politiques », explique Maurizio Landini, du syndicat italien CGIL.

« On ne gagnera pas avec de simples discours moralisateurs »

Informer, sensibiliser certes, mais sur la base « d'alternatives de progrès, de perspectives sociales », souligne de osn côté Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT. Et d'évoquer les revendications de l'organisation pour des augmentations de salaires, l'accord arraché à la SNCF pour des départs anticipés qui prennent en compte la pénibilité, ainsi que l'opposition unie à la loi immigration. « Pour nous, cela a été un point de bascule : une loi écrite sous la dictée du RN et la fin de la digue construite depuis la Seconde Guerre mondiale entre les partis républicains et l'extrême droite. » Avant de poursuivre : « Le syndicalisme en tant que tel est un rempart contre l'extrême droite parce que nous permettons aux travailleurs de se rassembler à partir de leurs intérêts professionnels et de dépasser les mises en opposition factices. C'est d'ailleurs pour cela que nous sommes directement dans le viseur de l'extrême droite et que, lorsqu'elle arrive au pouvoir, la première chose à laquelle elle s'attaque, c'est les droits des travailleurs et leurs organisations syndicales. »

Pour autant, « on ne gagnera pas avec de simples discours moralisateurs », conclut Sophie Binet. « En 2002, l'extrême droite est arrivée pour la première fois au second tour de la présidentielle, après que le Premier ministre de l'époque, Lionel Jospin, a déclaré que l'État ne pouvait pas tout. N'oublions jamais que l'extrême droite se nourrit de l'abandon des partis à lutter contre le capital »