19 novembre 2015 | Mise à jour le 28 février 2017
Le 19 novembre 1915, Joe Hill, musicien et syndicaliste, entrait dans l'histoire populaire américaine. En 1971, le lien entre culture et résistance illuminait « Joe Hill » de Bo Widerberg. À revoir en salles.
Joel Emmanuel Hägglund, connu sous le nom de Joseph Hillström, et surtout de Joe Hill, fut l'ancêtre d'une lignée d'artistes engagés, de protest singers, qui va de Woody Guthrie à Bruce Springsteen, en passant par Bob Dylan, Joan Baez, Peter Seeger, Phil Ochs, Rage Against the Machine ou Public Enemy, pour ne citer quelques-uns des musiciens américains se reconnaissant dans son héritage.
Cet émigrant suédois, né en 1879, arrive aux États-Unis en 1902 avec son frère et exerce tous les petits boulots qui se présentent, voyageant de la côte Est à la côte Ouest. Une traversée du pays qui lui fera rencontrer les wobblies, militants du syndicat Industrial Workers of the World et faire sienne leur cause.
Poète, musicien et syndicaliste, Joe Hill témoigne, par sa courte mais intense vie, de ce que revendiquait le poème de James Oppenheim en 1911 : la volonté pour chacun d'avoir « Du pain et des roses », autrement dit, que l'humain, pour être complet, doit pouvoir accéder autant à l'alimentation qu'à une nourriture de l'esprit.
CRÉER, C'EST RÉSISTER
Le film de Bo Widerberg le traduit magnifiquement. C'est le syndicalisme dans sa pureté originelle, celui du militant qui défend les droits collectifs et aime à écouter de l'opéra ou à écrire de la poésie, qui mène une grève pour que les enfants aient un jour accès à la culture dont lui-même a rêvé…
Il est étonnant – et c'est la marque des grands films – de constater la saisissante actualité de ce film poétique, vieux de presque un demi-siècle, à la facture moins classique qu'il n'y paraît, illuminé par le regard bleu de l'acteur suédois Thommy Berggren qui s'est glissé avec grâce et intensité dans la peau de son personnage.
Il est question, dans Joe Hill, de misère, d'injustice, de lutte des classes, de travailleurs migrants… Et de l'incessant combat pour la dignité, mais aussi pour les roses de la vie : la musique, la liberté d'expression et d'organisation, la poésie et la liberté d'aimer. Des causes toujours actuelles…
Le 19 novembre 1915, il y a juste un siècle, Joe Hill criait « Feu ! » au peloton d'exécution devant lequel il avait été traîné, coupable idéal du double meurtre de commerçants, prétexte fort opportun à se débarrasser d'un militant encombrant.
Au terme d'une parodie de procès, Joe Hill, qui n'avait pas voulu dévoiler pourquoi il avait été blessé par balle – une affaire de femme dont, en homme d'honneur, il ne révéla pas le nom –, fut condamné et exécuté en Utah. L'État des mormons reconnut plus tard qu'il n'aurait jamais dû être inquiété.
Joe Hill, sur Allocine.com
La ballade de Joe Hill par Joan Baez
Extrait de La Ballade de Joe Hill :
« De San Diego jusqu'au Maine
Dans chaque mine et fabrique
Où les travailleurs défendent leurs droits
C'est là que tu trouveras Joe Hill… »