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CINÉMA

Je ne suis pas une statistique

28 octobre 2016 | Mise à jour le 12 décembre 2016
Par | Photo(s) : DR
Je ne suis pas une statistique

Le cinéma britannique a, de bien des manières, évoqué la gestion déshumanisée des services sociaux du pays. Mais c'est sans aucun doute Ken Loach qui a dénoncé cette maltraitance étatique avec le plus de constance. Avec Moi, Daniel Blake, il signe un manifeste sans équivoque.

De Looks & Smiles à Raining Stones en passant par Ladybird, Sweet sixteen ou My name is Joe et même dans le plus souriant La part des anges, les services sociaux britanniques, qu'il s'agisse des questions familiales, du chômage ou de la délinquance, proposent une politique « du chiffre » totalement déshumanisée et d'une absurdité que Kafka aurait pu revendiquer. Ken Loach, qui depuis toujours s'engage clairement aux côtés des plus fragiles et des exclus nous offre une nouvelle fois avec ce Daniel Blake le combat du pot de terre contre le pot de fer.

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En effet, la situation de ce charpentier veuf de 59 ans, est claire. Victime d'un grave accident cardiaque sur un chantier, il n'est plus en état de travailler. L'équipe médicale qui le suit est formelle. Or, l'agence pour l'emploi lui refuse l'allocation d'invalidité à laquelle il peut légitimement prétendre le considérant apte au travail d'après un questionnaire uniquement administratif. Daniel Blake veut faire appel, mais on le noie sous les procédures, les formulaires à remplir, les questionnaires par Internet (que cet ouvrier du bâtiment ne maîtrise pas) et il est sans cesse menacé de sanctions (financières) s'il n'obéit pas à des employés qui ont bien intégré la politique qui consiste à éliminer le plus de personnes possibles des aides sociales.

 

Si ça vous rappelle quelque chose, c'est que le système français applique de plus en plus les mêmes procédures qui ont pour objectif de rebuter les demandeurs et de les dégoûter de prétendre à la protection sociale. Ainsi, des millions d'euros d'allocations ne sont pas distribués et des milliers de personnes sortent des statistiques du chômage.

Pourtant, Daniel Blake est un homme au grand cœur qui va prendre sous son aile Katie et ses deux adorables enfants, alors qu'elle débarque juste de Londres s'étant vu attribuer un logement à Newcastle. Ils se rencontrent au bureau de chômage où tous deux sont confrontés à la même bureaucratie sourde et aveugle. N'ayant jamais eu d'enfants, Daniel adopte un peu cette famille encore plus paumée que lui, car malgré son courage, la jeune femme ne s'en sort pas, mais est prête à tout pour élever dignement ses enfants. Bricoleur émérite, Daniel répare par ci, dépanne par là et gâte autant qu'il le peut Katie et ses petits, mais lui aussi est sans ressources, alors que l'impitoyable machine à broyer les pauvres est lancée…

 

 

Moi, Daniel Blake est un cri de colère, la saine rébellion d'un gentleman octogénaire qui n'a pas l'intention de se taire devant la morgue des puissants et les injustices grandissantes. Vous n'oublierez pas Daniel Blake (excellent Dave Johns) ni Katie (Hayley Squires), pas plus que la scène bouleversante dans le local de distribution d'aide alimentaire où la scène finale, car pour les « gueux », il n'est pas de happy end.

 

Moi, Daniel Blake, réalisé par Ken Loach. 1 h 40.