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INDUSTRIE

Quand les salariés dessinent l'avenir de leur entreprise

26 août 2014 | Mise à jour le 27 avril 2017
Par | Photo(s) : DR
Quand les salariés dessinent l'avenir de leur entreprise

Les emplois et les productions du site lot-et-garonnais du groupe Gascogne Wood sont menacés par le projet financier des nouveaux actionnaires. Les salariés de Marmande défendent un plan industriel fiable et rentable et le font savoir.

«ON A TOUT REFAIT NOUS-MÊMES »

Plan à l'appui, les militants marmandais expliquent leur projet pour l'usine lot-et-garonnaise. Les machines et les flux sont regroupés par logique de production. Ils se déploient autour d'un bâtiment de stockage central et de deux entrées, « pour être plus efficace tout en limitant le gaspillage de la matière première et la multiplication excessive des manutentions ».

Voilà pour la forme… Et le fond dans tout cela ? L'un ne va pas sans l'autre. Les propositions évoquent l'organisation de la production, les perspectives économiques et financières, les stratégies ­commerciales… Certaines fabrications, ­aujourd'hui sous-traitées, seraient réintégrées, tandis que les activités historiques seraient diversifiées pour compléter l'offre commerciale existante et ouvrir de nouveaux débouchés.

Objectif ? Maintenir l'intégrité du site marmandais autour de ses deux activités historiques – décoration avec la production de tasseaux et moulures, construction avec la fabrication de murs à ossature bois – pour continuer à bénéficier des savoir-faire et des synergies internes. « On connaît la matière première et les outils, on maîtrise la production, déclare Jean-Paul Pourredon, le délégué syndical CGT. Et, si la moyenne d'âge de l'effectif reste élevée – autour de 50 ans, NDLR –, elle constitue un potentiel supplémentaire pour le maintien et le développement du site. »

« NE LAISSONS PAS NOTRE AVENIR 
ENTRE LEURS MAINS SANS RÉAGIR »

Les 54 salariés de l'usine travaillent le bois depuis longtemps ; certains même avant le rachat du site par Gascogne Wood en 1991. Tous ont participé à l'élaboration du projet et ont été mis à contribution : « On a recueilli des informations auprès des agents d'entretien et de maintenance par exemple, précise Denis Fageole. Cette étape, celle de la collecte des données techniques, semblait la plus évidente mais elle n'était pas la plus aisée. » La difficulté est effacée cependant. Une de plus, car elles s'accumulent depuis l'annonce brutale, le 17 février, de la cession ou de la fermeture de l'usine : « On sentait que quelque chose se préparait : les discours de la direction qui tapent sur la branche bois, les investissements réalisés à la marge malgré les aides publiques, l'absence de plan de formation pour les effectifs marmandais, raconte Patrick Padovani, mais on était loin de se douter que la casse atteindrait un tel niveau. »

On a fait 
le boulot auquel auraient dû s'atteler 
le directeur du site et le directeur de la filière bois

L'atelier de Marmande représente pourtant 25 % du chiffre d'affaires de Gascogne Wood Products, la branche bois du groupe. Le site lot-et-garonnais affiche également une capacité de production loin d'être ridicule : plus de 23 millions de mètres linéaires, toute activité confondue.

La rentabilité n'est pas le problème, la profitabilité si. Le groupe d'investisseurs, qui contrôle Gascogne Wood depuis le 9 juillet, veut redresser les résultats de son activité bois. Mais l'objectif peut-il être atteint sans avoir à démanteler les activités existantes ni à fermer des sites (1) ? Oui. Les militants de Marmande en font la preuve depuis six mois : « Ça n'a pas été facile, ça paraissait même bizarre au début, mais on a fait le boulot auquel auraient dû s'atteler le directeur du site et le directeur de la filière bois du groupe », s'étonne Jean-Paul Pourredon.

UNE EXTENSION DU DOMAINE 
DE LA LUTTE ET DE LA SOLIDARITÉ

Il a fallu apprendre toutefois. Les négociations et les conflits sociaux ne sont pas inconnus des salariés marmandais. Mais là, il est question de projet industriel : « Où chercher, qui contacter, quels documents demander, comment les déchiffrer, de quelle manière travailler pour développer et défendre nos propositions ? Voilà les questions nouvelles auxquelles on s'est confronté, explique Denis Fageole. C'est simple, dans un premier temps, on ne savait pas ou plus quoi faire. »

L'union locale de Marmande et l'union départementale du Lot-et-Garonne se mettent dans la roue des militants pour leur permettre de relever la tête d'une part, pour leur apporter aide et soutien d'autre part. Elles accompagnent leur travail de fourmi à chaque étape : comité de liaison, table ronde en préfecture, interpellation des élus et des représentants de l'État locaux… « On a pu se former, gagner en confiance et renforcer la solidarité qui nous unissait déjà, ajoute-t-il. Le plus dur finalement consistait à extraire, depuis les documents papier que la direction a daignés nous transmettre, les informations qui démontraient la rentabilité du site, puis de les enregistrer sous forme électronique afin de les rendre lisibles. »

LES SALARIÉS CROIENT EN LEUR PROJET

Rien, vraiment, ne leur a été épargné… Mais les salariés marmandais tiennent bon. Ils croient en leur propositions qui ont d'ores et déjà séduit un repreneur potentiel reçu sur place : « Même si la cession ou la fermeture du site reste d'actualité, notre projet va dans le bon sens, conclut Jean-Paul Pourredon. On souhaite à présent le présenter à Dominique Coutière, qui chapote désormais Gascogne Wood, et lui prouver que la filière bois doit être maintenue à Marmande dans son intégralité. » La réponse pourrait venir le 29 août. Alors qu'ils partent en congés, les salariés marmandais doutent et sont inquiets. Mais ils sont prêts à faire feu de tout bois.