Julien Pitard, éducateur de football
Julien forme les moins de 15 ans (U15, équivalente aux cadets) du Red Star Football Club, qui tous ne rêvent que d’une chose : devenir joueur professionnel et rejoindre un... Lire la suite
« Directement à la dernière mesure. Chut ! On écoute le basson et les violoncelles. Attention aux bois quand vous entrez ! Piano, piano… Il y a un passage que je voudrais un peu plus cantabile. Attendez, j'ai un doute sur une croche : les flûtes, qu'est-ce que vous avez à la mesure 32 ? »
Depuis une heure, la chapelle de l'école Massil-lon résonne des notes des Sept dernières paroles du Christ sur la croix, de Joseph Haydn (1732-1809). Au pupitre, Laurence Equilbey. Un mot, un geste de la main, un regard, un mouvement d'épaule, la sonorité de l'orchestre se fait plus ample, change de couleur, joue de contrastes multiples.
« J'associe le plaisir de la direction à celui du danseur, au sens d'être traversé par la musique. Beaucoup de gestes de la battue sont inspirés par les sons qu'on reçoit. » Fondatrice du chœur de chambre Accentus, il y a vingt ans, Laurence Equilbey a commencé la direction d'orchestre à l'âge de 18 ans.
« J'aime étudier une œuvre dans son ensemble, m'informer du contexte historique, politique, voir la manière dont les phrases s'articulent, comment les chapitres s'organisent, ce qui gouverne la forme. C'est important, car la projection de la forme est une des premières choses que doit ressentir le public. »
Formée à Vienne auprès de Nikolaus Harnoncourt, dont elle admire l'inventivité et l'imaginaire gestuel, Laurence Equilbey pense que le mythe du chef souverain, autoritaire et incontesté, appartient au passé. Les chefs actuels se montreraient plus humbles devant la partition, et la relation à l'orchestre serait « plus démocratique ».
« On arrive avec une vision de l'œuvre. Mais les musiciens ont aussi de la musique en eux, ce qu'il faut savoir recevoir, rassembler pour les amener où tu as envie qu'ils aillent. » Le regard du milieu sur les femmes chefs d'orchestre évolue, lui, plus lentement. Un jeune chef russe en 2013 : « Une jolie fille sur le podium, ça distrait les musiciens. » « Ce milieu reste très conservateur, très fermé, il porte en lui sa propre dégénérescence », juge Laurence Equilbey.
Le lendemain, dernière répétition avant le concert. Cherchant du regard son assistante dans les travées de l'église, « ça tourne ? », demande la chef, s'inquiétant de l'acoustique.
Revenant à la partition : « C'est bon pour Les Sept paroles, tout est calé ? » 20 heures. Tout de noir vêtue, un large sourire aux lèvres, elle serre la main du premier violon, salue le public qui l'applaudit, s'empare d'un micro pour présenter le programme.
« Dis, elle n'aurait pas changé de couleur de cheveux ? », demande une femme à son voisin. « Peut-être, répond l'autre. Chut ! Ça commence… »
Régulièrement invitée à l'étranger, Laurence Equilbey est l'une des rares femmes en France – avec Zahia Ziouani ou Claire Gibault – à être à la tête d'un orchestre. Selon la Société des auteurs et des compositeurs (SACD), seules 17 femmes ont dirigé un orchestre sur les 574 concerts programmés lors de la saison 2013-2014.
Pour qu'elles sortent de l'invisibilité, la SACD propose un indice de progression de 15 % à l'horizon 2018-2019.
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Reporter-photographe. Inquiet des difficultés traversées par le secteur et un grand nombre d’indépendants, le photographe de REA continue pourtant de croire à l’avenir de... Lire la suite