L’âme dans la toile

Lorsqu'il disparaît à l'âge respectable de 86 ans, Claude Monet a pris soin de poser une condition à sa donation à l'État de ses monumentales Nymphéas. Que soit achetée et exposée au Louvre une toile plus modeste, Femmes au jardin, qui unit dans son souvenir Camille, sa première épouse tant aimée, et son ami, le peintre Frédéric Bazille, fauché par la guerre devant Beaune-la-Rolande en 1870.

Avec le style élégant et vivant qui le caractérise, Michel Bernard ouvre son roman sur une scène poignante : le voyage que Georges Bazille effectue pour retrouver son fils, puis ramener son corps afin qu'il repose près de siens, à Montpellier. Manière d'évoquer et de faire revivre, sans artifices, ce grand jeune homme qui avait dédié sa vie à la peinture et s'engagea par patriotisme. Monet sait ce qu'il doit à cet ami proche : celui-ci, issu d'une famille aisée, a toujours encouragé et soutenu le peintre, lui achetant des toiles et allant jusqu'à lui offrir de partager son atelier, où ils forgeront une solide amitié. Renoir, mais aussi Manet et Sisley complétaient le groupe d'artistes qui côtoyait également Degas ou Pissarro.

Dans la seconde partie, le cœur de l'ouvrage est Camille, d'abord modèle, puis épouse de Monet, qui vécut avec lui une vie de bohème dans la difficulté, mais sans jamais se plaindre tant elle formait avec lui un couple complice et soudé.

La troisième partie se situe après la mort prématurée de Camille. Monet vit avec Alice, ex-femme de l'un de ses commanditaires ruiné qu'il épousera ensuite. Le couple s'installe à Giverny mais Monet n'oubliera jamais la douce et volontaire Camille, ni Frédéric, le jeune et moderne impressionniste aux longues jambes qu'il avait représenté dans son Déjeuner sur l'herbe.

Deux remords de Claude Monet, Michel Bernard.

Édtitions La Table ronde. 224 pages, 20 euros.