6 juin 2025 | Mise à jour le 6 juin 2025
En même temps que se tenaient d'autres rassemblements dans cent soixante-cinq villes à travers la France, 250 personnes environ ont répondu à l'appel de la CGT, Force Ouvrière et Sud le 5 juin à Rennes, pour réclamer l'abrogation de la retraite à 64 ans, la préservation des emplois et des salaires. Reportage.
« Augmenter les salaires, retraites et minimas sociaux, c’est possible, c’est urgent », indique la banderole de tête du cortège, lequel attend de sélenacer. Le conducteur du véhicule remorquat la buvette àgalettes-saucisses manoeuvre tant bien que mal sur un bout de chaussée. Deux syndiquées CGT répètent les chants prévus aujourd’hui. «Il pleut déjà, ce ne sera pas de ma faute », blague l’une d’elles. Pas de doute, nous sommes bien à Rennes. Il est 11 heures. Quelque 250 personnes se massent place de la République, avant de marcher dans le centre-ville, direction l’esplanade Charles de Gaulle.
« Les gens se résignent peut-être, mais pas moi », assure Florence. « C'est possible de se mettre en grève, même juste le temps de manifester, pour ne pas perdre trop de sous. » Cette auxiliaire de vie sociale de 56 ans milite à la CGT Aide et soins à domicile 35 avec Laurence, une aide-soignante de 48 ans. Avec une troisième camarade elles vendent des pâtisseries et du café pour récolter des fonds. « Nous sommes censées travailler jusqu'à 67 ans pour espérer une retraite complète », déplorent-elles. C'est ce qui les a motivées à faire grève aujourd'hui. Hors de question d'être encore au travail à cet âge, et que le gouvernement recoure systématiquement au 49.3.
« Il faut se défendre en se syndiquant, on a le droit. On prend soin des autres, mais qui prend soin de nous ? » Laurence, aide-soignante
« Dans nos métiers, il y a beaucoup de temps partiel, subi ou pas, et beaucoup de fatigue », poursuivent Florence et Laurence. « Chez nous, pour un départ à la retraite, il y a neuf personnes déclarées inaptes. Déjà qu'un travailleur sur sept n'arrive pas à la retraite… » Sans parler des troubles musculosquelettiques, plus importants encore que dans les métiers du BTP, soulignent-elles. Elles pointent aussi le manque de budget alloué aux aides à la personne, même si l'Ille-et-Vilaine n'est pas le département le moins bien doté. « Il faut se défendre en se syndiquant, on a le droit. On prend soin des autres, mais qui prend soin de nous ? »
Jamais tombé du ciel…
« Je suis parti à la retraite pendant une manifestation à Paris », se souvient Daniel, ancien carrossier à l'usine Citroën de Rennes (aujourd'hui Stellantis) et militant CGT. C'était en 2005, il avait 57 ans. « Je suis là avec 100 % de retraite grâce aux luttes syndicales. Ce n'est jamais tombé du ciel. » Il se désole de la montée du vote d'extrême-droite chez les ouvriers, y compris chez ceux syndiqués à gauche.
L'annonce de l'adoption, quelques heures plus tôt, par les député.es d'une proposition de résolution portant sur l'abrogation de la réforme des retraites, déposée par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR), met du baume au cœur du cortège. Même s’il n’est pas contraignant, le texte, adopté par 198 voix contre 35, a pour ambition de peser sur le « conclave » sur les retraites. Pour l'heure, le Premier ministre François Bayrou écarte tout retour de l’âge de départ à 62 ans. Pas de quoi désespérer pour autant les maifestants, qui espèrent une rentrée sociale riche en mobilisations.