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FESTIVAL

Avignon. Cumulus ou incendie ?

27 juin 2014 | Mise à jour le 25 avril 2017
Par | Photo(s) : DR
Avignon. Cumulus ou incendie ?

Le 24 juin se réunissait l'équipe chargée par 
le gouvernement d’une remise à plat 
du régime des intermittents du spectacle, l'inquiétude monte quant au bon déroulement du Festival d'Avignon. Sera-t-il in, sera-t-il out ?

Le Prince de Hombourg investira-t-il la Cour d'honneur le 4 juillet pour ouvrir le Festival d'Avignon ? La question taraude de part et d'autre, entendez le gouvernement, les Avignonnais, leur maire Cécile Helle, Olivier Py qui prend cette année les rênes de la manifestation, les festivaliers et bien évidemment les saltimbanques.

Le Prince de Hombourg, tout un symbole ! Il y a soixante-trois ans, Jean Vilar, avec la troupe du TNP, montait la pièce de Heinrich von Kleist dans la Cité des papes. Gérard Philipe jouait le rôle-titre et Vilar, le Prince électeur. En ce temps-là, le festival était bien jeunot, les annexes 8 et 10 du régime des intermittents, à peine en gestation, et les Avignonnais, pas forcément encore conquis par la bande de comédiens qui investissaient leur ville.

Les choses ont bien changé alors que la manifestation fête ses 68 balais, au point que le président de la République et le Premier ministre réitèrent leur attachement à la culture, histoire de calmer la colère des baladins. Mais la colère monte toujours, malgré les mesures annoncées par Manuel Valls, le 19 juin.

LA MENACE DE L'AGRÉMENT

Si le maintien du budget de la Culture est une bonne mesure tout comme la mise en place d'une équipe de travail (1) pour remettre à plat le statut des intermittents, « il faut que les propositions portées depuis plus de dix ans par les intermittents soient examinées », martèle Denis Gravouil, secrétaire général de la CGT Spectacle. Cette dernière appelle à poursuivre et à amplifier la lutte unitaire sous toutes ses formes contre l'agrément, probablement le 26 juin, de l'accord sur l'assurance chômage qui met le feu aux poudres.

Le préavis de grève est reconduit pour tout le mois de juillet et le 4, alors que les trompettes de Maurice Jarre devraient résonner dans le Palais, doit être une journée de grève massive dans tous les secteurs du spectacle, du cinéma et de l'audiovisuel.

CATASTROPHE ÉCONOMIQUE

« Nous ferons tout pour éviter l'annulation du festival, déclare Denis Gravouil. Nous savons bien que ce serait une catastrophe mais la grogne monte chez les intermittents. Ils en ont plus qu'assez d'être traités de privilégiés, alors que la majorité d'entre eux gagne 9 000 euros par an ! »

Aurélie Filipetti martèle, quant à elle, que la valeur ajoutée de la culture est sept fois supérieure à celle du secteur de l'automobile. Si Avignon est annulé en 2014, « les éditions de 2015 et 2016 seront aussi compromises », indique Paul Rondin, directeur délégué du festival.

Il y a onze ans, l'annulation avait engendré 23 millions d'euros de manque à gagner. Rappelons que le Vaucluse est un des départements les plus pauvres de France et que la non-tenue du festival serait effectivement un gouffre financier pour la ville et ses commerçants. Mais aussi pour les compagnies qui se saignent chaque année pour y monter leurs spectacles. « Je n'annulerai pas le festival. Ce qui s'est passé en 2003 ne se passera pas avec moi. Il est possible que nous ne puissions pas jouer, mais jusqu'à la fin nous n'annulerons pas », affirme Olivier Py. Le 23 juin, le bureau du Festival « off » d'Avignon a confirmé dans une lettre adressée au public que les compagnies monteraient bien sur scène du 5 au 27 juillet.

UN NOUVEAU DRAME À ÉVITER

Un des malheurs de notre époque est sûrement de tout voir par le prisme financier. En mars dernier, au lendemain des résultats du premier tour des municipales (où le FN arrivait en tête, avec 29,63 % des voix), une première menace avait pesé sur le festival, le directeur étant prêt à partir si un maire d'extrême droite prenait la mairie. Aujourd'hui, c'est l'agrément par le gouvernement d'un accord qui appauvrit davantage les précaires qui trouble les festivités.

Comme le dit en substance le comédien André Wilms, ce qui se joue dans cette bataille va bien au-delà des questions économiques, il en va du vivre ensemble, des valeurs véhiculées par Vilar ou Malraux, ces grandes figures de la Résistance. « Un luxe authentique exige le mépris achevé des richesses, la sombre indifférence de qui refuse le travail et fait de sa vie, d'une part,une splendeur infiniment ruinée, d'autre part, une insulte silencieuse au mensonge laborieux des riches. » à entendre Wilms lire un extrait de La part maudite de Georges Bataille, on prend de la hauteur (2).

 

(1) Animée par Hortense Archambault, ancienne directrice du Festival d'Avignon, Jean-Denis Combrexelle, conseiller d'état, 
et Jean-Patrick Gille, député et médiateur, 
elle se mettait au travail dès le 24 juin.
(2) Vidéo avec André Wilms sur les intermittents : André Wilms