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2000  euros pour le rachat de 10 jours de congés de fin d'année des soignants

15 décembre 2021 | Mise à jour le 15 décembre 2021
Par | Journaliste
Anticipant un pic d’hospitalisations liées à la cinquième vague de Covid et face à une forte pénurie de personnels soignants durant la période des congés de fin d’année, le directeur général de l’AP-HP, Martin Hircsh, propose de racheter les congés de Noël des soignants.
L’offre parait généreuse: 2000 euros de salaire pour, non pas renoncer, mais juste reporter 10 jours de congés de fin d’année. De plus, la proposition se veut incitative et non autoritaire puisqu’elle ne s’appliquera qu’aux volontaires. Il n'empêche qu’elle résulte implicitement astreignante. En particulier pour les soignants les plus mal rémunérés , les plus exténués par 18 mois de pandémie et de carences de moyens, les plus désabusés par le déni de considération et l’absence de réponses aux alertes à l’effondrement de l’hôpital public, multipliées en vain depuis des mois.

Racheter les congés des plus crevés

Martin Hirsch le sait. Au micro de RTL le 13 décembre, il assume et avoue que le « plan blanc » déclenché en Île de France le 8 décembre ne suffira pas à « faire jaillir des infirmières » en nombre suffisant pour faire face au prochain pic de pandémie. D’ailleurs, il le concède: sa proposition de rachat de congés cible celles et ceux qui sont aujourd’hui « les plus crevés ». Autrement dit, les plus vulnérables et donc, les plus susceptibles d’accepter de renoncer à leur Noël en famille.

Au risque de mettre l’hôpital en carafe

Cynisme ou pragmatisme ? Charge à chacun d’en juger sur pièces. En ayant à l’esprit que d’après Martin Hirsch, les soignants que la population applaudissait aux balcons il y a deux ans seraient aujourd’hui considérés par les mêmes comme « des emmerdeurs » . Et d’appeler cette même population à soutenir les blouses blanches comme jadis afin qu’ils acceptent de sacrifier leurs congés à la bonne cause. Faute de quoi, « on risque de mettre l’hôpital en carafe », a prévenu le directeur de l’AP-HP.
En d’autres termes, le retour aux balcons en guise de réponse à une crise de l’hôpital public qui est pourtant bien antérieure à la crise sanitaire Covid. Crise durant laquelle ce même Martin Hirsch, si prompt aujourd’hui à culpabiliser les citoyens de leur ingratitude envers les soignants, aura poursuivi bonhomme la politique gouvernementale de restructuration de la santé publique, dont la fermeture de lits n’est que le levier le plus visible: 5700 en moins en France rien qu’en 2020, en pleine crise Covid. Avec des répercussions locales que la « population ingrate » n’imagine pas. Exemple au Kremlin-Bicêtre (Val de Marne) où il manque aujourd’hui 70 % des lits en neurologie pour traiter notamment les AVC, sans compter la zone Paris où il est désormais impossible de trouver un lit en neurologie.

Des pics d’hospitalisation ingérables

Emblématiques de cet effondrement de l’hôpital public, les vagues de démissions – inédites par leur ampleur – de soignants et d’internes révulsés par leurs conditions de travail et de salaire. Mais aussi, les innombrables tribunes de médecins laissées sans réponses par les pouvoirs publics. Le tout aboutissant à ce qu’il s’agissait pourtant d’anticiper: des pics d’hospitalisations désormais impossibles à gérer et moins encore à l’aube d’une cinquième vague de Covid.
Cerise sur le brancard, cette politique de la pénurie hospitalière amorcée en 2009 par la réforme « HPST » de Roselyne Bachelot, poursuivie et intensifiée par les gouvernements successifs (Marisol Touraine, Agnès Buzin, Olivier Veran) aboutit aujourd’hui à cette mesure désespérée: offrir à des soignants 2000 euros pour le rachat de 10 jours de leurs congés dans le seul but, urgent, « d’écoper les difficultés, comme un bateau dans la tempête », a avoué Martin Hirsch au micro de RTL. Tout est dit.