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42 %des Français considèrent qu’il n'y a pas trop d’immigrés en France

2 septembre 2021 | Mise à jour le 2 septembre 2021
Par | Journaliste
En réalisant un travail de compilation et de croisement des données issues de diverses enquêtes sur le sujet de l'immigration sur une période de 10 ans, le Centre d'observation de la société montre que l'évolution de l'hostilité des Français envers les immigrés s'inscrit tendanciellement à la baisse depuis 20 ans. Et de manière très nette.

Si 42 % des Français estiment qu'il n'y a pas trop d'immigrés en France, ce n'est pas le cas de 46 %, soit près de la moitié de la population, qui considèrent à l'inverse qu'il y a trop d'immigrés en France. Ces chiffres, qui émanent de la Sofres, ont été réanalysés par le Centre d'observation de la société . Ils sont à mettre en perspective avec les résultats des précédents sondages effectués par la Sofres depuis les années 2000 dans le cadre de son baromètre annuel sur l'image du Front national (aujourd'hui Rassemblement national) où la question « Y a-t-il trop d'immigrés en France ? » est systématiquement posée.

14 % de baisse de l'hostilité envers les immigrés

Des enquêtes encore plus anciennes situaient même le niveau à 65 % en 1989 et à 74 % en 1995…

Ainsi, au début des années 2000, le baromètre de la Sofrès relevait 60 % de réponses « d'accord » ou « plutôt d'accord » avec l'affirmation « Il y a trop d'immigrés en France ». En 2021, l'institut n'en dénombre plus que 46 %, en baisse de 14 % sur une période de 20 ans. Une décrue d'autant plus significative qu'elle s'inscrit dans un contexte où les attentats de 2015, cumulés au battage médiatique anti-immigrés entretenu, depuis, par de nombreux médias « zemmourisés » laissaient présager une remontée en flèche du rejet des immigrés. À la surprise générale, il n'en est rien.

Bien que la Sofres observe une remontée significative du rejet des immigrés entre 2010 et 2013 (54 % d'accord ou plutôt d'accord avec l'affirmation « il y a trop d'immigrés en France »), la tendance baissière constatée depuis la fin des années 2000 se confirme dans la période actuelle.

Afin d'éclairer cet apparent paradoxe, le Centre d'observation de la société a creusé le sujet et rassemblé les résultats de deux enquêtes supplémentaires : celle de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) et celle du Centre d'études de la vie politique française (Cevipof) sur les dix dernières années. Surprise, toutes deux confirment l'évolution constatée : une montée de la part de la population hostile à la présence d'immigrés au début des années 2010, suivie d'une baisse significative dans les années récentes (à partir de 2014).

Plus de compassion que de tensions

Plus surprenant encore, les enquêtes des deux instituts montrent que les attentats de 2015 n'ont pas influencé l'opinion des Français à l'égard des immigrés. À tout le moins, pas dans le sens attendu par les « leaders d'opinion anti-immigrés » qui plastronnent sur les chaînes d'info continue. Pour expliquer cette lame de fond, le Centre d'observation de la société avance l'hypothèse que les crises migratoires en Méditerranée auraient produit davantage de compassion que de tensions dans l'opinion. Hypothèse probable, mais qui reste à vérifier.

Ce qui est sûr, c'est que la tolérance des Français vis-à-vis des personnes d'origine étrangère s'accroît de manière significative. Cela est confirmé par les enquêtes de la CNCDH où l'on apprend que la part des sondés se disant « plutôt » ou « tout à fait » d'accord avec l'affirmation « l'immigration est une source d'enrichissement culturel » est passée de 50 % au milieu des années 1990 à 70 % en 2002. Et qu'elle oscille autour de ce chiffre depuis (61 % en 2020).

Une opinion publique très erratique

À l'aune de quoi, deux questions se posent : celle de la motivation de certains médias à se spécialiser dans le prosélytisme anti-immigrés (à quelles fins, qu'elles soient idéologiques, opportunément politiques ou économiques ?) ? Et celle de l'influence réelle ou supposée de ces médias « zemmourisés » ou « lepenisés » sur l'opinion publique qui, visiblement, n'accroche pas, ou alors, de moins en moins.

Pour tenter d'y répondre, le Centre d'observation de la société avance plusieurs hypothèses qui, même si pas nouvelles, ont le mérite de convoquer quelques leçons de l'« Histoire ». Exemple, au sujet de la mise en scène médiatique de l'hostilité envers les immigrés, l'Observatoire fait valoir qu'en période de chômage de masse, l'insertion professionnelle des personnes les moins qualifiées (nombreuses parmi les personnes d'origine étrangère) est plus difficile. C'est un fait établi de longue date. Et plus encore quand ces personnes sont concentrées sur un espace réduit du territoire, à l'instar de l'Île-de-France ou des grandes métropoles.

La peur pour moteur… à audience

Autre argument : face aux difficultés sociales de la population « indoor », les immigrés jouent « historiquement » (NDLR) le rôle de boucs émissaires. À ce sujet, l'Observatoire rappelle qu'activer les peurs est l'un des meilleurs moteurs à audience. Mais aussi l'un des meilleurs aiguilleurs pour polariser les opinions, notamment sur les réseaux sociaux. Ajoutons à cela la crise économique « qui joue beaucoup », en sens défavorable aux immigrés alors qu'à chaque reprise [économique, NDLR], « le débat sur l'immigration s'éteint, tandis que celui de l'insécurité prend le relai. Cela a été le cas au début des années 2000, constate l'Observatoire, en soulignant l'énorme responsabilité » des politiques et dune partie des « experts » appelés à commenter le sujet de l'immigration.

Quand les médias « zemmourisés » gangrènent l'opinion

Une part non négligeable de cette responsabilité dans l'entretien de l'hostilité envers les immigrés est d'ailleurs imputée aux médias (télé, radio, presse écrite) qui se donne pour mission de relayer les propos « anti-immigration » des « experts » et politiques afin de s'attirer les faveurs de ce qu'ils estiment être « l'opinion » des catégories populaires. Et qui, en crispant encore plus le débat, tendent à légitimer les positions xénophobes. En relevant cette instrumentalisation de l'opinion, le Centre d'observation de la société nous rappelle, implicitement, que – comme disait Pierre Bourdieu – l'opinion publique n'existe pas. Ou plus exactement que l'opinion publique est plus souvent le résultat d'une construction que l'expression d'une conviction.

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