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Coronavirus

Chroniques du coronavirus : les éboueurs en colère

28 mars 2020 | Mise à jour le 30 mars 2020
Par | Photo(s) : Hugo Passarello Luna/AFP
Chroniques du coronavirus : les éboueurs en colère

Des éboueurs à Paris lors du quatrième jour du confinement décrété par le gouvernement pour contenir la contagion de la pandémie de coronavirus en France. Paris, France, le 20 mars 2020.

Comment les salariés et les militants syndicaux s'adaptent à cette réalité ? Ceux qui travaillent de chez eux, ceux qui sont tenus de se présenter à leur poste… Chaque jour, la NVO vous raconte le quotidien des travailleurs à l'heure du Covid-19. Aujourd'hui : les éboueurs.

À l'avant-poste de la bataille sanitaire engagée contre le Covid-19, les éboueurs ne sont toujours pas, pour la plupart, correctement équipés pour assurer non seulement leur protection, mais aussi celle de leur famille et la nôtre.

« On n'a pas attendu d'être considéré comme des “héros de la Nation” pour prendre conscience que l'on faisait partie des métiers d'intérêt public et être fiers de ce métier », affirme un salarié de chez Taïs, filiale de Veolia Propreté. « C'est fondamental pour la santé, l'hygiène et l'environnement des habitants, des citoyens, des villes et des zones rurales, qui représentent, après le BTP, l'un des plus gros gisements de déchets. »

Une activité « essentielle » sans protection

D'autant plus fondamental que, sans une collecte régulière de nos déchets, ce n'est pas seulement le Covid-19 qui trainerait dans nos rues, mais tout un tas de microbes en tous genres. Bref, un métier pour le moins insalubre dont on aimerait espérer que ses salariés disposent de « mesures de protection collectives et individuelles », telles que « des douches suffisamment nombreuses et un nettoyage journalier des locaux et des vêtements de travail, la fourniture de protection individuelle ».

Or c'est manifestement là que le bât blesse. « On n'a rien. Pas de gel, pas de masque, pas de vêtements à usage unique », détaille ce salarié. « Nous travaillons déjà en mode dégradé dans un contexte de non-crise, je vous laisse imaginer dans ce contexte de crise. »

« La plupart des salariés se baladent aujourd'hui sans masque, avec une tenue qui peut être déjà contaminée », confirme Rachid Yagoub, chauffeur de benne à ordures ménagères en Île-de-France et DSC déchets et collecte industrielle pour le groupe Suez.

Des protections pour pas un rond

Et d'ironiser sur les récentes mesures annoncées par sa direction la semaine dernière pour les 6 dépôts franciliens du groupe : deux personnes au lieu de trois dans la cabine pour bien être à un mètre de distance et interdiction d'arriver et partir tous en même temps pour éviter les contacts. « Des mesures qui ne coutent absolument aucun euro ! »

Une situation que de plus en plus de salariés ont du mal à accepter. Parce qu'ils vont désormais travailler la « peur au ventre en pensant à leur famille », mais pas seulement. Car la colère gronde parmi les éboueurs.

« Le président, le Premier ministre Édouard Philippe, le gouvernement parlent des médecins, des policiers, des infirmiers, des caissières et même des livreurs, mais jamais des éboueurs », constate amèrement Rachid. « C'est exactement le même mépris qu'ont nos actionnaires et nos patrons vis-à-vis de notre profession. »

Des  droits de retrait pour dénoncer les risques

Pas sûr, dans ce contexte, que les propositions faites ce 26 mars par deux députés Les Républicains, de la Manche et de Savoie, l'une, d'une « médaille de l'Épidémie » pour récompenser « ceux qui sortent de chez eux pour travailler », l'autre, de décerner la Légion d'honneur à ceux qui décèderaient du Covid-19 dans l'exercice de cette fonction, suffisent à remotiver les troupes.

« Le patronat n'a qu'à aller ramasser les poubelles s'il n'y a pas de risques », poursuit le salarié de chez Taïs . « On veut bien servir la nation, mais dans de bonnes conditions. Pas au détriment de notre santé et de celle de nos familles. » Résultats : les droits de retrait augmentent. « Individuel, parfois total sur un service, partiel sur un client ou une typologie de clients, par exemple, les hôpitaux… », énumère-t-il. « C'est le moment de se mobiliser. »