2 avril 2020 | Mise à jour le 2 avril 2020
Comment les salariés et les militants syndicaux s'adaptent à cette réalité ? Ceux qui travaillent de chez eux, ceux qui sont tenus de se présenter à leur poste… Chaque jour, la NVO vous raconte le quotidien des travailleurs à l'heure du Covid-19. Aujourd'hui : Natacha Pommet, la secrétaire générale de la fédération des Services publics.
Face à l'absence de réponse de la part de son ministre de tutelle, la fédération des services publics a maintenu son préavis de grève pour la période du 1er au 30 avril. Natacha Pommet, la secrétaire générale, explique pourquoi.
Le 24 mars dernier, la fédération CGT des Services publics annonçait un préavis de grève du 1er au 30 avril. Pourquoi ?
Natacha Pommet : Nous avons eu dès le début du confinement énormément de remontées de collègues nous disant être en difficulté face à des employeurs qui ne prenaient pas au sérieux ce confinement ou l'obligation de protéger les employés, qui les envoyaient au casse-pipes sans protections.
On a alors très vite saisi Olivier Dussopt [secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des comptes publics, NDLR] pour lui demander de sortir une circulaire contraignante en direction des employeurs pour les contraindre à fermer les services non essentiels et, pour ceux essentiels, à mettre à disposition des agents des protections suffisantes en nombre.
Devant l'absence de réponse, nous avons décidé de maintenir notre préavis de grève pour mars et d'en déposer un autre pour avril — il s'inscrit dans la continuité des préavis que la fédération dépose depuis le 5 décembre dans le cadre de la lutte contre la réforme des retraites. Ce n'est pas un appel à la grève, c'est un préavis de protection pour permettre aux agents de se mettre en sécurité lorsque toutes les autres voies, comme le droit de retrait, ont été épuisées.
Un préavis avec des revendications…
La première, c'est de sortir une circulaire claire et nette pour définir les missions essentielles à maintenir et que l'on ferme les autres. La deuxième, c'est que du matériel de protection soit fourni aux agents des missions qui restent ouvertes au public.
Ensuite, nous dénonçons les ordonnances qui sont sorties et contraignent les salariés à travailler plus longtemps sur une période beaucoup plus longue que la période de confinement, le gouvernement prévoit cela jusqu'au 31 décembre et portent également sur la prise de congés [qui peut aller jusqu'à 6 jours ouvrables, NDLR].
On rappelle quand même que là, nous sommes en confinement. Nous ne sommes pas en congés. Donc obliger les agents à prendre des congés pendant cette période, c'est inadmissible.
Interview exclusive de Philippe Martinez : avec le coronavirus, pas de confinement pour le social
Comment réagissent les militants à ce préavis ?
Les collègues sont très contents que la Fédération ait pris cette décision parce qu'au moins ils ont un moyen, face à des employeurs qui ne veulent rien entendre, de mettre la pression. Surtout, il y a des employeurs qui, voyant le buzz que cela a provoqué, se disent qu'il faut peut-être faire attention et ont commencé à fermer certains services qui n'étaient pas essentiels ou, tout au moins, à se retourner vers l'État pour lui demander de fournir des masques. Mais la situation est loin d'être réglée.
Les « héros » du quotidien sont oubliés ?
Je n'aime pas ce terme de « héros ». Cette espèce d'unité nationale dans laquelle a voulu nous mettre Emmanuel Macron, ce n'est pas vrai. Il n'y a pas d'unité nationale. On voit, comme la CGT le dénonce depuis longtemps, qu'il y a une société à double vitesse.
Entre une partie des gens qui peut se confiner, rester chez elle, et une autre qui doit aller sur le terrain. Et souvent, ce sont les agents les plus mal payés qui sont aujourd'hui envoyés au charbon sans aucune protection.
Dans l'Aveyron, sept salariés d'un Ehpad ont été diagnostiqués au Covid-19 et dans un autre, dans le Lot, comme il y a un résident malade, on demande aux salariés de rester confinés avec eux pendant quinze jours
Chez les éboueurs, certains ont des protections, d'autres non et on a des collègues qui tombent malades. En Haute-Garonne, des aides à domicile ont appris que plusieurs usagers auprès desquelles elles interviennent sont atteints alors qu'elles avaient juste un masque par semaine. Autant vous dire que le virus a bien voyagé…
On entend parler de « prime » à titre de compensation. Comment réagissez-vous ?
Pour la CGT, une prime à la mort, ce n'est vraiment pas ce que l'on souhaite. On a un gel du point d'indice depuis plus de dix ans dans la fonction publique et c'est de cela que l'on voudra discuter avec nos ministres à la fin du confinement pour qu'il y ait enfin un dégel de ce point d'indice.
Ce type de prime, ce n'est ni plus ni moins que la prime qui avait été offerte au moment du mouvement des Gilets jaunes. Si un agent se retrouve à l'hôpital avec des difficultés respiratoires et un impact réel sur sa vie je ne pense pas que cela soit utile. Cela montre toute la morgue de ce gouvernement. C'est insupportable.