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Sapin, Goya, même combat

Jean-François Jousselin
20 juillet 2014 | Mise à jour le 30 novembre 2016
Par | Rédacteur
En cette période de festival, le Cercle des économistes tenait le week-end dernier ses quatorzièmes Rencontres économiques d'Aix-en-Provence. Une manifestation qui rassemble chefs d'entreprise, économistes français et étrangers, ministres, personnel politique, institutions internationales…

Elles étaient cette année consacrées à une question d'importance : le ralentissement sans précédent de l'investissement et sa nécessaire relance pour davantage de croissance. La tendance ne fait en effet guère de doute. Ainsi, selon une enquête de Standard & Poors, les dépenses d'investissement des 2 000 plus grosses entreprises européennes et américaines ont baissé de 1 % en termes réels en 2013 et devraient encore reculer cette année alors qu'elles ont accumulé quelque 4 500 milliards de dollars d'actifs liquides…

La situation est particulièrement préoccupante en Europe où, selon les chiffres d'Eurostat, le taux d'investissement des sociétés non financières pour l'ensemble de l'Union européenne accuse une chute de 16 % entre 2008 et 2013. Tandis que, pris globalement, l'investissement privé a reculé de 20 % à 15 % du PIB sur la même période. Quant à l'investissement public, son évolution n'est pas meilleure. Il décline régulièrement en Europe depuis quarante ans : il est ainsi passé de 4,5 % du PIB en 1970 à 2,5 % aujourd'hui…

Nul besoin de préciser que l'austérité imposée depuis la crise n'a guère arrangé les choses. Et que ce ne sont pas les filandreux débats sur l'orthodoxie budgétaire, l'imposition de règles d'or ou d'argent enserrant l'action publique dans un corset absurde qui risquent de nous tirer d'affaire. Le constat, en revanche, valide la démarche des syndicats européens qui portent un projet de sortie de crise qui permettrait, en relançant l'économie par un effort important d'investissement – 260 milliards d'euros par an –, la création de 11 millions d'emplois en dix ans. Un projet réellement européen dont il n'a évidemment pas été question à Aix. Il éviterait pourtant le piège du chacun pour soi, permettrait de doter l'Europe de nombre d'infra­structures qui lui manquent, d'améliorer les conditions de vie sur le Vieux Continent, mais aussi de consolider son marché intérieur dans des domaines stratégiques comme les télécoms ou l'énergie par exemple.
Sa réussite suppose quelques conditions. La première est que les syndicats, unanimes au plan européen, sachent aussi s'unir dans chaque pays pour décliner en termes concrets ces grandes orientations.

Elle passe aussi par le besoin impérieux d'une politique économique qui assure la promotion des capacités humaines et par des stratégies d'entreprise qui s'affranchissent de l'emprise de la finance et du diktat d'actionnaires avides. Ce qui exige une tout autre reconnaissance des autres acteurs de l'entreprise, à commencer par les salariés. Recommandons donc au gouvernement, à l'évidence en mal d'expérimentation sociale, d'essayer, comme le suggérait Jean-Marie Pernot dans un entretien au Monde, une recette allemande : la « codétermination », qui donne dans tous les conseils de surveillance des entreprises de plus de 5 000 salariés la moitié des sièges aux représentants des salariés. Ce serait, après l'adoption par notre voisin d'outre-Rhin d'un Smic, un bel exemple de coopération européenne et d'harmonisation sociale.

Las ! Nous n'y sommes pas encore. La seule contribution de Michel Sapin, invité vedette des rencontres d'Aix, s'est en effet, pour l'essentiel, résumée à une petite phrase : « Notre amie c'est la finance, la bonne »… Un prétendu bon mot qui me rappelle, je ne sais trop pourquoi, le Bécassine, c'est ma cousine chanté naguère par Chantal Goya…