Renault : le mécontentement monte
Un accord de compétitivité pluriannuel (2017-2019) est négocié chez Renault qui promet 3000 embauches. Fabien Gâche, délégué syndical central CGT de Renault, explique où... Lire la suite
«L'ambiance est un peu morose. Malgré toutes les actions que nous avons menées pour dénoncer le PSE annoncé le 13 avril, la direction reste droite dans ses bottes.» Patrice Crosas, délégué syndical CGT chez Euronext Paris, était parmi les nombreux salariés qui ont manifesté devant le Palais Brongniart, ancien siège de la Bourse de Paris, le 18 juin (voir diaporama), à l'appel de l'intersyndicale CFDT-CFE/CGC-CGT-SPI pour protester contre le projet de PSE d'un tiers des effectifs français.
Le 13 avril, la direction du groupe Euronext, Bourse de Paris, annonçait un plan de licenciement massif de 101 postes sur les 353 que comptent les deux sociétés du groupe localisées à Paris, Euronext Paris et Euronext Technologies.
Cette décision choque à plus d’un titre. Il y a d’abord les résultats affichés: un chiffre d'affaires 2014 de 458 millions d'euros, en hausse de 18,6%, soit près de 4 fois l'objectif (5%); des volumes échangés sur les marchés au comptant d'Euronext en augmentation de 29% au cours du 1er trimestre 2015 (à fin mars) ; une marge opérationnelle à 45,8% au niveau du groupe (pour un objectif moyen terme de 45%) et 50% pour Euronext Paris; un résultat net 2014 en progrès de 35% ; le doublement du cours de l'action depuis l'introduction d'Euronext en juin 2014 et la 2e meilleure performance de l'indice SBF 120 (valeurs de l'indice SBF 120 regroupant les plus grandes sociétés cotées) sur les 6 derniers mois.
Et puis, il y a la façon: «La direction a annoncé et lancé le PSE alors que les IRP devaient déjà suivre la gestion du déménagement des locaux parisiens à La Défense, à la veille du mois de mai, et son cortège de jours fériés», explique le syndicaliste. Une façon subtile et efficace de compliquer l’action du CE qui, selon la procédure, doit être consulté.
Et de confirmer: «Nous nous sommes retrouvés complètement noyés par plusieurs consultations.» Malgré cela, le CE de Euronext Paris a rendu trois avis défavorables sur le PSE, le 22 juin, votés unanimement par les syndicats. «Nous avons tous rejeté le PSE et jugé les mesures proposées très insuffisantes par rapport aux moyens du groupe Euronext», explique Patrice Crosas. Nous avons voté contre le projet d'accord majoritaire, car c'était une fausse négociation; nous avons dit non aux nombre de postes supprimés, aux moyens alloués; et nous réfutons le prétexte économique au motif d'accroissement de la compétitivité». Une position d’autant plus compréhensible quand on sait qu’un salarié du groupe rapporte en moyenne 800000 euros par an à son entreprise.
Chez Euronext Paris, filiale où une cinquantaine de postes devraient être supprimés, le CE a pu signer un accord de méthode et fournir un rapport d'expertise donnant son avis négatif sur le PSE. «Ce rapport de l'expert nous est favorable car il montre les moyens économiques du groupe et nous permet de nous battre sur l'amélioration des moyens. Si nous obtenons de bonnes conditions de départ, cela bénéficiera également au PSE de la filiale Euronext technologies car la direction doit appliquer le même traitement aux deux filiales. On se bat sur deux fronts avec un objectif commun: améliorer les conditions financières du PSE et surtout réduire le nombre de suppressions de postes. C'est l'emploi qui prime».
En effet, le CE de la filiale Euronext Technologies, qui s’est retrouvé dans l’incapacité de faire valoir ses prérogatives de consultation, pourrait bénéficier des avancées octroyées à son homologue. À noter que chez Euronext Paris, l’intersyndicale a déjà obtenu une réduction de 50 à 41 postes supprimés et la création de 13 postes au reclassement.
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«Ce qui nous révolte, c'est que la direction utilise une procédure dite de “plan de sauvergarde de l'emploi” tout au contraire pour se débarrasser des salariés les plus fragiles et anciens de l'entreprise en leur versant le moins d'indemnités possibles, alors même que celle-ci gagne un fric fou. Pis, c'est nos impôts qui vont payer le plan social.»
En effet, étant donné que le groupe compte moins de 1000 salariés en Europe, l'entreprise n'est pas tenue d'offrir à ses personnels licenciés de congé de reclassement. Leur sort dépend de Pôle emploi.
«Ce sont les Assedics qui vont payer avec le CSP (le contrat de sécurisation professionnelle). Merci l'ANI, peste Patrice Crosas. Auparavant, il fallait recueillir l'avis du CE et la direction rechignant habituellement à nous transmettre les informations nécessaires, nous mettions des mois à boucler le dossier, ce qui finissait par obliger la direction à négocier».
L’ANI prévoit désrmais des délais: pour licencier moins de cent salariés – dans chaque entité juridique – comme c’est le cas chez Euronext, la procédure d'information-consultation doit se faire dans les deux mois, obligeant le CE à rendre un avis coûte que coûte. Reste que si la Direccte juge l'information incomplète ou que la procédure n'a pas été respectée, elle peut rejeter le PSE.
«Mais c'est à double tranchant», conclut, méfiant, le syndicaliste. Du coup, la prudence s’impose: «On attend de voir comment la direction va présenter son projet de PSE à la Direccte. Par ailleurs, Euronext tient à protéger son image. Les nombreux papiers que nous avons eus dans la presse pèsent. Et puis, des rendez-vous doivent avoir lieu avec le ministère du Travail…»