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LIBAN

Femmes debout

12 mars 2015 | Mise à jour le 15 mars 2017
Par | Photo(s) : AFP / Joseph Eid
Femmes debout

Les domestiques étrangères employées dans le pays ont créé leur syndicat pour mettre fin aux abus dont elles sont victimes. Une première dans le monde arabe.

Pour des employées de maison qui se sentent souvent isolées, la création d'un syndicat est une opportunité pour formuler des revendications communes.

Un syndicat, enfin ! Elles étaient environ 200 à participer, à Beyrouth, le 25 janvier 2015, au congrès fondateur du syndicat des travailleurs domestiques du Liban, sous le parrainage de la Fédération nationale des syndicats des ouvriers et des employés au Liban (Fenasol) et avec le soutien du mouvement syndical international. Camerounaises, Sri-Lankaises, Éthiopiennes, Népalaises…

Toutes migrantes, elles sont venues travailler au pays du cèdre, le plus souvent dans des conditions indignes. Selon l'organisation internationale du travail (OIT), le Liban compte à l'heure actuelle environ 250 000 travailleuses domestiques. Employées dans de riches familles libanaises, elles triment bien souvent pour l'équivalent d'une centaine de dollars par mois et sont, en toute légalité, corvéables à merci, lorsqu'elles ne sont pas insultées, battues et même violées… Des situations qui poussent même parfois certaines d'entre elles au suicide.

Selon l'ONG Human Rights Watch, une employée domestique mettrait fin à ses jours chaque semaine au Liban. En tant qu'étrangères, ces femmes non protégées par le droit du travail libanais, sont en proie, comme dans le reste de la péninsule arabique, au système de parrainage de la Kafala, une forme de tutelle appliquée dans plusieurs pays du golfe arabo-persique. Un dispositif qui prive les travailleuses de leur liberté en les interdisant notamment de changer d'emploi à leur guise.

La création du syndicat des travailleurs domestiques du Liban est la conséquence de l'entrée en vigueur, en 2013, de la convention 189 de l'OIT, relative au travail décent pour les travailleurs domestiques et qui prévoit notamment un jour de repos par semaine ainsi qu'un salaire minimum. « Un texte qui nous a donné le courage de nous organiser et de créer un syndicat », témoigne Gemma Justo dans le quotidien libanais Daily Star. Cette domestique philippine de 48 ans, arrivée au Liban à l'âge de 27 ans, ne boude pas son plaisir : « Le Liban est le premier à franchir le pas de la création d'un tel syndicat dans le monde arabe, même si nous sommes petites, c'est tout de même énorme ! »

Pour l'heure, le syndicat se heurte à l'hostilité du ministère du Travail libanais qui s'est opposé à sa création et l'a déclaré illégal. Dans un communiqué, les pouvoirs publics estiment en effet que l'instauration de nouvelles lois « serait mieux à même de répondre aux problèmes des domestiques plutôt que la création de syndicats qui les entraîneraient dans des conflits ».
Mais les travailleuses, elles sont bien décidées à faire vivre leur syndicat et peuvent en la matière compter sur des soutiens précieux.

« Ce syndicat est une opportunité pour les travailleuses qui se sentent souvent isolées de créer des liens et revendiquer sur des bases communes avec des salariés d'autres secteurs. La prochaine étape sera d'aider le syndicat à engager un dialogue constructif avec le gouvernement et les employeurs », estime ainsi Zeina Mezher, responsable du bureau de l'OIT à Beyrouth.