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HOMMAGE

Je me souviens de Georges…

15 août 2016 | Mise à jour le 21 juin 2017
Par | Photo(s) : AFP
Je me souviens de Georges…

Dimanche 14 août 2016, Georges Séguy, ancien secrétaire général de la CGT de 1967 à 1982, est décédé à l’âge de 89 ans. Nous avons demandé à Alain Guinot, qui a été son jeune collaborateur, d’évoquer le souvenir de Georges et l’apport du camarade Séguy au syndicalisme en général, à la CGT en particulier.

Quand Georges Séguy m’a demandé de devenir son collaborateur en 1978, j’ai tout d’abord été stupéfait ! J’avais 28 ans à l’époque et me disais qu’il y avait tellement de militants plus capables et plus chevronnés, qu’il serait plus sage de regarder en cette direction. Mais c’était un choix clair et réfléchi de Georges. Faire confiance à la jeunesse aura marqué en permanence son parcours syndical !

Au début de son mandat de secrétaire général, après les événements de mai 1968, interpellé par le rapport entre la CGT et la jeunesse, il crée le centre confédéral de la jeunesse en 1969 et en confie les rênes à Jean-Luc Destrem. Après quatre années auprès de Georges, c’est à moi qu’il confiera cette responsabilité. Cet attachement à la place de la jeunesse dans le syndicalisme CGT marquera toute sa vie militante jusqu’à ce que la maladie le frappe.

Ainsi, il aura à cœur d’expliquer aux jeunes la résistance dans les établissements scolaires.
En 1982, en quittant ses responsabilités, il termine son discours à Lille en s’adressant aux jeunes par un appel : « Envahissez-nous ». Un clin d’œil malicieux, qui le caractérisait. Son successeur, Henri Krasucki, s’était engagé à l’époque à ne faire qu’un mandat.
Ces années auprès de Georges ont forgé en moi admiration, respect et profonde amitié.
En 1978, Georges place le congrès de Grenoble sous le mot d’ordre en forme de triptyque volontaire : audacieux, novateur et conquérant !

Profondément attaché à l’unité syndicale, il s’efforce de créer les conditions de ce rassemblement en cultivant des liens notamment avec la CFDT et Eugène Descamps. La rupture du programme commun, un an avant, l’amène à considérer que le mouvement syndical ne doit surtout pas reproduire la division politique et il propose de créer un comité national d’unité d’action. Malheureusement, bien que majoritaire et votée au congrès, la démarche n’aboutit pas. La CFDT ne saisit pas l’occasion, engagée dans son recentrage. En interne, le poids du débat politique et sa transposition dans la CGT fait avorter cette perspective unitaire pourtant si novatrice. Il en sera durablement affecté.

Cette expérience le renforcera dans son attachement à l’indépendance syndicale. Considérant que le syndicalisme a un rôle spécifique et unique dans la société, les décisions qui concernent la CGT doivent se prendre dans la CGT. Problématique concernant dans son esprit les rapports avec le parti communiste mais aussi avec tous les partis, le patronat et les gouvernements quels qu’ils soient.
Il n’a jamais confondu, d’ailleurs, indépendance et neutralité. Son attachement au parti communiste a été indéfectible, ce qui ne l’a pas empêché d’être critique en certaines circonstances.

À la CGT, il a toujours refusé l’entre-soi, privilégiant l’élargissement du corps militant en travaillant la diversité dans les organismes de direction de la confédération. Préférant la culture du débat à celle du clan ou de la fraction, voire des courants. En résumé, il aura porté une conception moderne du syndicalisme qui nous inspirera encore longtemps.

 

Alain Guinot