14 février 2022 | Mise à jour le 14 février 2022
La CGT se porte candidate aux premières élections des travailleurs des plateformes, prévues du 9 au 16 mai, pour porter les revendications des livreurs. Le début d'une campagne inédite et atypique, aux multiples inconnues.
C’est un vote inédit et hors des clous du dialogue social habituel. Du 9 au 16 mai 2022 auront lieu les premières élections professionnelles d’une partie des travailleurs des plateformes : d’un côté, les chauffeurs VTC (Uber, Bolt, Freenow…) ; de l’autre, des coursiers qui pédalent pour Uber Eats, Deliveroo, Frichti, etc. Leur particularité ? Ils exercent sous statut de micro-entrepreneurs, et non de salariés. Malgré plusieurs décisions de requalification en CDI, dont un arrêt « Uber » de la Cour de cassation en 2020, et un projet de présomption de salariat à l’échelle de l'Union européenne, le gouvernement refuse toujours de reconnaître l’existence d’un lien de subordination entre ces travailleurs et les plateformes.
La CGT y va pour porter les revendications
La CGT a décidé de se soumettre quand même aux suffrages des livreurs deux-roues, lors de ce scrutin électronique à un tour, sur sigle. « Nous demandons à ce qu’ils soient représentés par un CSE, comme tous les salariés, plutôt que de faire l’objet d’une représentation « à côté » et donc d’un tiers-statut, explique Fabrice Angéi, référent au bureau confédéral de la CGT. Mais on a décidé d’y aller malgré tout pour porter leurs revendications. » Elles ne manquent pas : rémunération minimale, droit aux congés, meilleure prise en charge de la santé et de la sécurité au travail dans un métier fortement accidentogène, etc.
Une mobilisation difficile à construire
La campagne qui démarre s’appuie sur huit syndicats de livreurs affiliés à la CGT (à Paris, Bordeaux, Lyon, Nantes, Toulouse, Cherbourg, Limoges et Poitiers), en plus des unions locales et départementales. La semaine des élections, est prévue la mise en place de bureaux de vote mobiles dans les rues. La principale difficulté tient à la mobilisation des travailleurs précarisés, très éclatés, dans un métier au fort turn-over, pour qui le dialogue social semble très loin des préoccupations quotidiennes. « Une part importante des travailleurs, les plus précaires, sera exclue du vote car sans-papiers, déplore aussi Ludovic Rioux, du syndicat des coursiers de Lyon. Quand on bosse avec le compte de quelqu’un d’autre, on n’aura pas accès à des identifiants. »
C’est la mobilisation de ces travailleurs qui a permis que ces élections aient lieu, aussi imparfaites soient-elles. Fabrice Angéi, secrétaire de la CGT
Par ailleurs, l’issue même du scrutin et la suite du processus comporte de nombreuses inconnues. À moins de trois mois du vote, le gouvernement doit encore trancher des points par ordonnance, et non des moindres : périodicité des négociations, conditions de validité des accords et de leur extension aux plateformes non-signataires, etc. Même le nombre de représentants que les organisations syndicales pourront mandater et leurs moyens ne sont toujours pas connus…
Reste que la campagne s’inscrit dans la volonté des derniers congrès de la CGT d’accompagner les micro-entrepreneurs subordonnés à leurs donneurs d’ordre. Le travail via les plateformes numériques participe de mouvements plus larges – externalisation, précarisation, mise en concurrence des travailleurs… – à l’œuvre dans de multiples secteurs. « Et c’est la mobilisation de ces travailleurs qui a permis que ces élections aient lieu, aussi imparfaites soient-elles », conclut Fabrice Angéi.