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LIVRE

Les échoués, roman des sans rien

27 octobre 2018 | Mise à jour le 26 octobre 2018
Par | Photo(s) : DR
Les échoués, roman des sans rien

Virgil, Chanchal, Assan et sa fille Iman ont quitté la misère pour le mirage d'une France, terre d'asile et pays des droits de l'homme… Troquant une mort certaine contre une survie aléatoire, disputant aux chiens errants le contenu des poubelles ou un abri précaire, ils sont Les échoués.

La Moldavie de Virgil est un pays exsangue, naufragé où pour survivre, « les pères jouaient les bêtes de somme sur les chantiers d'Europe, les mères vidaient les poubelles à Paris ou à Berlin » tandis que les enfants sont prélevés par la mafia pour la prostitution ou la vente d'organes.

Mousson, cyclones et tsunami ont laissé cinq cent mille morts bangladais l'année où Chanchal est né, prématuré, au pied de la machine à coudre dans l'usine où sa mère coud pour une misère. Chanchal signifie « sans repos », car il est celui « qui a été désigné pour l'exil » et sur lequel sont fondés tous les espoirs des survivants de sa famille. Il partira à 17 ans et parcourra 8 000 km en deux ans pour vendre des roses à Villeneuve-le-Roi.

Écartelée entre chefs de guerre et terreur d'État, la Somalie ajoute à ses souffrances la douleur infligée à ses femmes : Iman y a été excisée, son sexe a été cousu à l'aide d'épines d'acacia. Assan et Iman sont les seuls survivants de la folie meurtrière d'un enfant soldat qui, d'une rafale, a tué la mère et les deux petites sœurs d'Iman. Assan le pêcheur travestit alors sa fille en garçon « pour mettre des kilomètres entre elle et cette folie ».

Sans papier, sans droit, sans abri, unis par une même volonté de vivre, les quatre clandestins vont devenir amis de hasard et ensemble, tenter de s'inventer une vie entre les patrons voyous, les exploiteurs de tous poils et de toutes origines.

Longtemps grand reporter et reporter de guerre, Pascal Manoukian possède à la fois la connaissance du terrain et la plume littéraire qui donne chair à ces quatre personnages et réalisme aux divers contextes dans lesquels ils évoluent. Si la lecture des Échoués est âpre, c'est parce qu'elle ne dissimule aucun aspect du parcours et de la situation des sans-papiers en France.

NVO, la Nouvelle Vie ouvriere, le magazine des militants de la CGTLes échouésPascal Manoukian. Points Seuil. 285 pages. 7,50 €.

Extrait : « La plupart des négriers étaient des petits sous-traitants, œuvrant pour de grands groupes du bâtiment. Officiellement, par contrat, ils signaient une charte éthique et s'engageaient à respecter le droit du travail. Mais, à la lecture des devis, aucun service financier ne pouvait prétendre honnêtement ignorer les conditions faites aux sans-papiers. En réalité, artisans, promoteurs, fabricants, acheteurs, toue la chaîne tirait même profit du flot sans fin qui s'échouait ici tous les matins. »