#MeToo va trop loin !
#MeToo exagère. C'est, par exemple, l'avis de Caroline Fourest, qui dénonce dans son dernier livre des excès tels que des amalgames, des accusations abusives, des procès médiatiques… Il ne s'agit pas de nier l'existence de certains abus, ni de piétiner la présomption d'innocence mais, sept ans après la naissance du hashtag qui a permis de fendre la chape de plomb qui verrouillait le viol et l'inceste, il reste encore tant à faire. Ne serait-ce qu'en septembre, l'actualité a été marquée par le procès des viols de Mazan (Vaucluse) où une femme a été droguée par son mari pendant près de dix ans afin de la faire violer par des dizaines d'inconnus. Septembre a vu aussi le lancement d'une enquête par le Conseil national de l'Ordre des médecins auprès des praticiens et internes sur les violences sexistes et sexuelles, suite à une succession de témoignages au printemps dernier. Sans oublier la vague #MeToo à l'œuvre chez les pompiers après la révélation d'une série d'affaires de viol et d'agression sexuelle au sein de la profession.
Inscrire le consentement dans la loi
Le garde des Sceaux, Didier Migaud, s'est dit favorable à l'inscription du consentement dans la loi, comme l'ont fait la Grèce en 2019, le Danemark (2020) ou l'Espagne, en 2022, avec la loi « Solo si es si » (Seul un oui est un oui). En Suède, deux ans après l'entrée en vigueur d'une loi similaire en 2018, les condamnations pour viol avaient augmenté de 75 %, alors qu'en France, selon le ministère de la Justice, elles ont baissé de 31 % entre 2019 et 2020. La proportion des viols pénalement sanctionnés s'établissant à… 0,9 % ! Ainsi, pour l'Institut des politiques publiques, dans une note récente, 86 % des plaintes pour violence sexuelle sont classées sans suite, un chiffre qui monte à 94 % pour les viols et s'accroît ces dernières années. « Trop de procédures sont classées sans suite pour insuffisance de preuves, c'est-à-dire qu'on n'est pas sûr qu'il y ait eu contrainte, menace, violence ou surprise, puisque c'est ce qui caractérise le viol aujourd'hui », explique Isabelle Rome, magistrate et ex-ministre déléguée à l'Égalité entre les femmes et les hommes, qui défend l'introduction du consentement dans la loi.
Continuer à lutter au travail
« Entendre que #MeToo va trop loin, c'est culpabilisant et insupportable, lâche Myriam Lebkiri, secrétaire confédérale et responsable du collectif Femmes mixité de la CGT. On a encore tant besoin que la parole se libère. La prise en compte des violences sexistes et sexuelles par les pouvoirs publics et dans les entreprises est un combat quotidien pour les militantes et militants. » Harcèlement moral sexiste et sexuel, agression sexuelle, viol… Selon la CGT, 30 % des salariées ont déjà été harcelées ou agressées sexuellement sur leur lieu de travail et 70 % déclarent n'en avoir jamais parlé à leur employeur. Pire, 40 % de celles qui ont osé le faire ont écopé d'une issue en leur défaveur : une mobilité forcée, voire un licenciement. À la veille du 25 novembre, Journée internationale de la lutte contre les violences faites aux femmes, il reste donc bien tant à faire…