Nous répondons à vos principales questions sur les impôts 2019
Avec le prélèvement à la source, beaucoup de choses changent pour vos impôts cette année ! Vous êtes perdu ? L’experte de la VO Impôts répond aux principales questions. Lire la suite
C'est un scandale financier aux petits oignons et gros détournement de pognon. Un cas d'école en matière de contournement à l'impôt pudiquement nommée « optimisation fiscale ». Un système classique de maquillage de comptes de résultats par le truchement duquel une enseigne transforme ses profits en pertes d'exploitation, avant de récupérer les bénéfices bien réels au sein d'une filiale basée au Luxembourg.
C'est fin 2014, à l'issue d'une expertise, que le comité d'entreprise de McDonald's Ouest parisien découvre le pot aux roses : un système de « redevances » pour droits à l'image de la marque et pour charges locatives à des taux exorbitants.
Par le truchement de ces redevances versées par ses filiales franchisées, McDonald's France transfère en moyenne 20 % de son chiffre d'affaires vers McDonald's Europe Franchising Luxembourg, sorte de holding employant une trentaine de salariés, mais réalisant, elle, 1,2 milliard d'euros et 540 millions d'euros de bénéfices net pour l'exercice 2014.
À l'époque, et malgré un dépôt de plainte par le comité d'entreprise auprès du procureur de la République de Versailles, les médias restent curieusement muets et la justice, aveugle.
Après cette première démarche infructueuse, le comité d'entreprise fait appel à une personnalité de la sphère politico-judiciaire : l'ancienne magistrate Eva Joly, aujourd'hui députée européenne des Verts/Alliance libre européenne (Vert/ALE), qui a fait de la lutte contre l'évasion fiscale son cheval de bataille. Vu l'ampleur de la « Big Mac arnaque », Eva Joly accepte sans ambiguïté de défendre le dossier porté par l'intersyndicale CGT/UNSA de McDonald's ouest parisien.
Comme elle n'en fait pas mystère, Madame Joly entend, bien sûr, rendre justice aux salariés abusés par leur employeur qui les prive, entre autres et depuis des années, de la prime de participation aux bénéfices.
À l'appui de ce dossier exemplaire en turpitudes, Madame Joly veut, dans le même temps, faire sauter le fameux « verrou de Bercy » qu'elle ne cesse de dénoncer depuis tant d'années. « Il est temps de fournir de nouveaux arguments pour forcer les gouvernements, les Parlements et la Commission européenne à mettre en lumière ces pratiques, à faire place à la transparence, à responsabiliser les entreprises qui font de l'évasion fiscale », déclarait-elle ainsi dans une interview accordée à Libération le 17 décembre 2015.
Coïncidence fortuite, qui place sous les meilleurs auspices les suites à venir de l'affaire McDonald's, celle-ci est rendue publique dans la foulée d'un autre scandale politico-financier, lequel a déclenché des torrents de « like » sur les réseaux sociaux : le 14 décembre, en séance nocturne à l'Assemblée nationale, le gouvernement a fait très discrètement retirer une mesure – qui avait été adoptée par les députés en première lecture – pour lutter contre l'évasion fiscale des grandes entreprises. Un micmac volte-face qui, réactivé par l'affaire McDonald's, n'est décidément pas près de passer aux oubliettes.
« Forcer le gouvernement », l'argument de Madame Joly, n'a quant à lui rien d'abusif au regard du manque à gagner vertigineux pour l'État français. État français qui contribue par ailleurs à la rentabilité de McDonald's via son dispositif CICE et autres allégements de cotisations sociales accordées chaque année à l'enseigne.
Gilles Bombard, le secrétaire général CGT et du comité d'entreprise de McDonald's Paris Île-de-France a trouvé l'erreur : « Nous irons au bout de la démarche engagée par tous les moyens militants et juridiques », assure le syndicaliste, qui a fait de la justice fiscale et de la revalorisation du travail son combat prioritaire. De la plainte déposée pour blanchiment de fraude fiscale, détournement de fonds, faux et usage de faux, abus de bien sociaux, il espère obtenir, a minima, un redressement fiscal. Mais aussi l'examen de la responsabilité pénale des dirigeants de l'entreprise. Sans quoi, le gouvernement devra assumer d'envoyer aux Français qui travaillent un message plus qu'indigeste : inacceptable.
D'une effarante simplicité, le système d'évasion fiscale mis au point par le géant de la restauration rapide consiste à tout simplement faire mentir les chiffres. Explications.
Quelle a été la genèse de votre découverte d'un système d'évasion fiscale et de détournement de fonds au cœur des comptes de l'entreprise ?
« Quand, en 2013, la CGT devient majoritaire au comité d'entreprise de MacDo Ouest parisien – qui regroupe 900 salariés de divers restaurants de Seine-Saint-Denis au sein d'une même filiale –, nous demandons des augmentations de salaire et la prime de participation obligatoire aux bénéfices de l'entreprise. Comme chaque année, la réponse est invariablement la même : pas de bénéfices, voire des comptes dans le rouge, ce qui nous étonne d'autant plus que les restaurants ne désemplissent pas ; nous savons par ailleurs que McDo ouvre chaque année 40 nouveaux restaurants. Avec des comptes dans le rouge ? »
Dès lors, l'intersyndicale CGT/UNSA décide de voter le déclenchement d'une expertise des comptes de l'entreprise. Le rapport qui nous est remis un an plus tard nous révèle deux choses importantes : que l'excédent brut d'exploitation est de 25 % du chiffre d'affaires, c'est-à-dire que l'entreprise est largement bénéficiaire, mais que ces bénéfices sont ensuite transposés dans une ligne de compte intitulée « autres charges », en l'occurrence, des frais de redevances pour droits à l'image de la marque d'une part et pour frais de loyer d'autre part.
Ces deux redevances cumulées représentant environ 22 % du chiffre d'affaires. C'est par le truchement de ces « autres frais » que les bénéfices sont transformés en pertes, avant d'être délocalisés hors de France où ils sont retraduits en profits.
En quoi estimez-vous frauduleuses ces redevances ?
Tout simplement parce que McDo est propriétaire des murs et du foncier de la plupart de ses restaurants qu'il concède en location-gérance. Et puis, les taux de redevance sont tout simplement exorbitants et nettement supérieurs à ceux appliqués à ses restaurants aux États-Unis. Mais ce qui crève les yeux dans le rapport d'expertise, c'est le jeu de ficelles par lequel McDonald's France fait remonter cet argent au Luxembourg, au sein de McDo Europe Franchising, une sorte de coquille vide qui ne possède rien, mais qui affiche un chiffre d'affaires de 1,2 milliard d'euros et 540 millions d'euros de bénéfices nets pour l'exercice 2014.
Le tout aboutissant à une imposition ridicule de 6 millions d'euros. En France, d'après les experts, McDonald's aurait dû s'acquitter d'environ 75 millions d'euros en impôts, rien que pour 2014. C'est autant d'argent qui ne contribue pas à nos caisses de protection sociale, qui n'est pas redistribué en salaires, qui ne finance pas nos services publics simplement parce qu'il échappe aux caisses de l'État. C'est pourtant bien en France, avec les moyens de la France financés par le travail des salariés français que ces bénéfices sont générés.
Qu'attendez-vous de la démarche judiciaire engagée et portée par Madame Eva Joly alors que le « verrou de Bercy » est toujours actif ?
Pour l'heure, le Parquet est saisi. Si le verrou de Bercy ne lui permet pas d'agir, nous poursuivrons la démarche en saisissant un juge d'instruction, d'où l'importance d'être assisté par quelqu'un de l'envergure d'Eva Joly. L'activité syndicale va aussi nous aider, et pas qu'un peu, puisque nous allons déployer en parallèle un grand plan d'action sine die pour mobiliser les salariés, alerter et informer l'opinion publique, jusqu'à produire un effet domino entre tous les scandales fiscaux similaires à partir de l'affaire McDo.
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