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Afghanistan

« Non, les Talibans n’ont pas changé ! »

8 mars 2022 | Mise à jour le 8 mars 2022
Par | Photo(s) : Wakil Kohsar / AFP
« Non, les Talibans n’ont pas changé ! »

Sept mois après leur retour à Kaboul, les Talibans continuent de faire la chasse aux opposants, malgré leurs promesses de changement. Des syndicalistes, des journalistes afghans menacés de mort ont ainsi du être exfiltrés. Avec le concours discret de la CGT…
Difficile de voir en cette mère de famille nombreuse un quelconque danger. Encore moins une menace pour l'État. Et pourtant. Habiba, c'est son nom, était jusqu'à il y a quelques mois encore l'une des personnes les plus recherchée dans son pays, l'Afghanistan. Elle est en effet la vice-présidente du Nuawe, principal syndicat afghan et ami de longue date de la CGT. Une hérétique aux yeux des Talibans de retour au pouvoir à Kaboul depuis septembre 2021 pour qui le syndicalisme est incompatible avec la charia, la loi islamique.

« Les Talibans ont toujours combattu les syndicats et les syndicalistes »

« Les Talibans ont toujours combattu les syndicats et les syndicalistes », dénonce Habiba. Et quand en plus, comme c'est son cas, on « milite pour la démocratie mais aussi pour les droits et l'égalité des femmes », c'est sa propre vie qui se retrouve en sérieux danger. Exfiltrée précipitamment à l'automne dernier, Habiba est, depuis octobre 2021, réfugiée en France.
Une exfiltration possible grâce à l'entremise discrète de la CGT. « À force d'acharnement, nous avons réussi à établir des contacts directs avec des personnels de différentes ambassades, du Ministère des Affaires étrangères et on a ainsi pu obtenir quelques visas au compte-gouttes », précise Sylvain Goldstein, conseiller confédéral CGT pour l'Asie et la zone Pacifique. Compte-gouttes qui aura quand même permis le départ de « tous les responsables nationaux du syndicat ». Quant à ceux, hommes ou femmes, qui étaient toujours en province, « aucun n'a survécu », assène Sylvain. « Les Talibans n'ont pas changé du tout. C'est les mêmes », confirme Habiba, déjà témoin de leur arrivée en 1996. « Des loups déguisés en agneaux qui ne supportent pas que les femmes existent. »

Certains pays sont tentés de reconnaître le régime taliban

Lorsqu'on lui demande ainsi pourquoi elle a fui son pays, Shabnam, jeune femme d'une vingtaine d'année récemment arrivée en France, répond que c'est « à cause du football ». Pour autant, si elle faisait bien partie du club de foot féminin d'Hérat, troisième ville d'Afghanistan, ce qui est déjà en soi une insulte aux « valeurs talibanes », elle était aussi engagée dans le social et journaliste. Trois bonnes raisons pour fuir un pays où, dit-elle, « il n'y a plus d'éducation pour les jeunes filles, plus d'argent, plus de nourriture. Où les enfants meurent de faim et les femmes ne peuvent même pas s'habiller comme elles le veulent. Un pays dans lequel, si l'on ne se soumet à l'idéologie des Talibans, on court de grands risques ». Et pas qu'en tant que femme d'ailleurs. Un rapport des Nations unies sorti en janvier dernier parle de « centaines de personnes, fonctionnaires, policiers, anciens salariés des forces militaires étrangères exécutées ».
Une « folie » dont pourraient bien se rendre complices certains pays . En Chine, Russie, Pakistan et États du Golfe, mais encore Inde et pays d'Asie centrale -voire Norvège où une délégation des Talibans était reçue à Oslo il y a quelques semaines-, la question d'une reconnaissance du régime taliban est désormais sur les tables. « Ces pays ne pensent qu'à leurs propres intérêts et n'ont aucune considération pour la population afghane », proteste Habiba. « C'est comme s'ils voulaient que notre peuple soit réduit à néant. » Une reconnaissance qui aurait en effet tout d'un coup de poignard dans le dos pour les millions d'Afghans toujours sur place.