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Société

« On ne cautionne pas la violence, mais un jeune de 17 ans tué par la police, c'est traumatisant »

30 juin 2023 | Mise à jour le 30 juin 2023
Par | Photo(s) : DENIS CHARLET / AFP
« On ne cautionne pas la violence, mais un jeune de 17 ans tué par la police, c'est traumatisant »

La mort de Nahel à Nanterre (Hauts de Seine) a enflammé la région parisienne et beaucoup de villes dans tout le pays. La métropole lilloise n’y échappe pas. A Mons-en-Barœul, petite ville de 21 000 habitants, la mairie et la salle de spectacle ont été la proie des flammes. Reportage.

 

Une école et le pôle Santé Travail à Tourcoing, un centre social et un supermarché à Wattrelos, une station de métro, l’hôtel de la police municipale et une supérette à Lille… Dans la métropole lilloise, rien que pour la nuit de mercredi à jeudi, de nombreux bâtiments ont été incendiés, mais c’est à Mons-en-Barœul – 21 000 habitants – que les dégâts sont les plus importants. La salle de spectacle Allende, inaugurée en 2017, a été partiellement détruite, de même que le rez-de-chaussée de la mairie, le local du Centre communal d’action social et celui de la police municipale. La boutique d’un opticien a également été pillée. Ce jeudi matin, la police scientifique relèvait des indices et les agents municipaux posent de grands panneaux de bois sur la façade éventrée de la salle de spectacle. Alors qu’une odeur de brûlé plane sur le quartier, des habitants hébétés se sont spontanément rassemblés devant la mairie. « Mons-en-Barœul est une ville paisible, calme, mais on voit que ça peut sauter à tout moment », constate Malika (1). Elle est « triste » devant l’état de la salle Allende, qui devait accueillir un gala de danse ce week-end et ne rouvrira pas avant de longs mois. Mais elle n’oublie pas la mort de Nahel, à Nanterre : « on ne cautionne pas la violence mais un jeune de 17 ans tué par la police, c’est traumatisant. »

 

L’été dernier, un jeune tué par un policier de la BAC de Tourcoing

Un peu plus loin, trois ados collent leur visage contre les vitres de la salle, pour apercevoir le hall dévasté. « S’attaquer à des bâtiments publics, c’est pour que l’Etat réagisse », supposent Noah, Yvan et Yousef. Sur leurs écrans de téléphone, défilent les images de la nuit, mais également une enquête minutieuse sur la mort de Nahel, réalisée à partir des différentes vidéos disponibles, publiée sur le site Loopsider. « C’était juste un délit de fuite, ça ne méritait pas la mort, surtout pour un mineur », dénoncent-ils. Ils évoquent aussi la mort l’été dernier d’un jeune de 23 ans, au volant d’une voiture après une tentative d’échapper à un contrôle. Il a été tué par le tir d’un policier de la brigade anti-criminalité de Tourcoing. Mis en examen pour « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner », il invoque la légitime défense.

 

« On ne s’attendait pas du tout à ça »

Malika, qui travaille dans le social, pense que l’on « sait accompagner les personnes âgées, celles en recherche d'emploi, mais pas nos jeunes de 18-25 ans ». A Mons-en-Barœul, sur 21 000 habitants, un peu moins de la moitié vit dans des tours et des barres d’immeubles disséminés autour du quartier de la mairie, dont un peu plus de 8 000 en « quartier prioritaire de la politique de la ville » (QPV). « Les QPV se ressemblent : difficultés scolaires, chômage, sentiment d’être abandonné… », mais, relativise Malika, « on est très éloigné de ce que vivent certaines villes de région parisienne ».

« On ne s’attendait pas du tout à ça », commente Rudy Elegeest, le maire de Mons-en-Barœul, venu de la gauche mais rallié au macronisme. La veille en fin de journée, il n’avait décelé « aucun signe précurseur ». Très affecté, il déplore la destruction de la « maison commune des Monsoises et des Monsois ». « Choqué et effaré », Kevin Vaillant, conseiller municipal d’opposition (LFI), n’est cependant « pas étonné, vu le climat social et politique ». Face à cela, les centres sociaux et les maisons de quartier « n’ont pas assez de moyens », alors que « quand des activités sont organisées, on voit beaucoup moins de jeunes qui squattent », lâche-t-il en regardant partir Gérald Darmanin, venu délivrer un message de fermeté devant la presse.

 

(1) Prénom modifié.