Méditerranée, les nouveaux boat-people
Alors que des milliers de migrants, fuyant la guerre et la dépossession, meurent régulièrement en Méditerranée, l’UE envisage de nouvelles mesures où le sécuritaire... Lire la suite
Ce pacte menacerait, selon les assertions des droites dures et des extrêmes droites, la souveraineté des pays, placée de facto sous la coupe des Nations unies, pour décider de leur politique migratoire. S'ensuivraient, selon ces mêmes fantasmes, des vagues de migrants venant troubler le mode de vie occidental. « Une instrumentalisation qui ne résiste pas à la lecture », s'insurge Patricia Téjas, responsable du collectif migrants de la CGT.
Premier constat, le pacte de Marrakech n'a rien de contraignant. Il est d'ordre symbolique et constitue, selon le jargon onusien, un « soft law » (droit mou) qui recense une série de grands principes. C'est pourquoi la France peut le signer et conserver – en même temps – dans sa législation nationale un durcissement des politiques migratoires qui perdure, en 2018, avec la loi sur « l'asile et l'immigration ».
Ces vingt-trois objectifs sont disponibles in extenso sur le site des Nations unies
« Rien que dans son titre, l'esprit du pacte est problématique », reprend Patricia Téjas. Pour la responsable confédérale, le triptyque qualifiant les migrations de « sûres, ordonnées et régulières » donne le ton de l'ensemble des vingt-trois recommandations supranationale. « La première d'entre elles concerne la collecte et l'utilisation de données, autrement dit de statistiques, avec un risque de fichage. En creux se pose la question des libertés individuelles, du droit d'aller et venir… »
Données inhérentes à l'humanité, les migrations ne vont pas s'arrêter, quels que soient les murs ou les barbelés que certains États veulent mettre (ou ont mis) en place. « Les enjeux migratoires vont perdurer parce que les désordres planétaires sont exponentiels. Or, le pacte ne contient rien sur la prédation capitaliste qui engendre ces drames : crise écologique, économique, guerre, trafic d'êtres humains, ventes d'armes… », reprend Patricia Tejas. Bref, aucune remise en cause des politiques économiques responsables de l'état du monde, notamment la course à l'armement qui engendre guerre, misère et désolation.
« Selon les données du Haut Commissariat aux réfugiés, en 2016 plus de 65 millions de personnes ont fui les guerres et les persécutions. Le pacte de Marrakech n'évoque ce contexte à aucun moment. Il répond juste à une situation migratoire mondialisée, sans remettre en cause ni l'ordre capitaliste ni les politiques nationales contre les migrants. » De l'art du grand écart pour un pacte sans grands impacts.