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TRANSPORTS

Ryanair : faillite sociale du modèle low-cost

14 août 2018 | Mise à jour le 17 août 2018
Par et | Photo(s) : © Silas Stein / AFP
Ryanair : faillite sociale du modèle low-cost

Grève des employés de Ryanair à l'aéroport de Francfort

Le conflit social qui agite la compagnie low cost depuis plusieurs semaines a franchi vendredi 10 août une nouvelle étape quand les pilotes allemands du géant du transport aérien se sont joints à la première grève simultanée des pilotes de Ryanair dans cinq pays européens.
Le soutien de la CGT Air France « Qui pourrait croire hormis les plus orthodoxes des néo-capitalistes que le modèle low cost peut avoir un avenir à long terme », interrogent le syndicat CGT et l'Ugict CGT (cadres) d'Air France dans un communiqué de soutien aux grévistes de Ryanair. « Pour croire cela, il faut penser que les salarié·e·s peuvent accepter d'être mal payé·e·s, travailler plus que de raison, être mal considéré·e·s et cela durant des années, sans rien dire. »
« Les mouvements de luttes des salarié·e·s de Ryanair sont profitables à toutes et tous au sein du secteur aérien et au-delà, car ils tirent vers le haut les conditions de travail et de rémunération, et mettent à mal la concurrence entre les uns et les autres.« 

Ces arrêts de travail, en pleine période de congés estivaux en Allemagne, en Belgique, en Suède, en Irlande et aux Pays-Bas ont affecté les voyages de plusieurs dizaines de milliers de passagers et entrainé quelque 400 annulations de vols. La grogne chez Ryanair avait déjà conduit à un premier mouvement européen, fin juillet, lorsque le personnel de cabine en Espagne, en Italie, au Portugal et en Belgique avait fait grève. Quelque 600 vols furent annulés, touchant 100000 passagers. Ce conflit d’une ampleur inédite dans le low cost aérien est suivi avec attention par les syndicats européens.  Les grévistes de Ryanair ont reçu le soutien de la Confédération européenne des syndicats (CES) qui regroupe 90 organisations nationales et dix fédérations européennes.

Flexibilité, précarité de haut vol

Les syndicats du numéro deux du transport aérien européen reprochent à la direction sa politique de l'emploi, le recours à des contrats précaires et au dumping social. La compagnie rejette ces accusations, affirmant mieux payer ses pilotes que ses concurrents, ce que les intéressés démentent. Car Ryanair impose quand il le peut, selon les syndicalistes, des contrats de travail irlandais plus flexibles aux membres du personnel naviguant, même s’ils vivent ailleurs en Europe. La compagnie fait valoir à ce sujet que la majeure partie du travail est effectuée à bord d’avions immatriculés en Irlande.

« Ryanair vend des billets à 39 euros et fait en même temps un bénéfice (…) ce sont clairement les employés qui en payent le prix » , juge dès lors un représentant du syndicat allemand Vereinigung Cockpit (VC), Janis Schmitt.

« Le problème de Ryanair est que tout fonctionne au fouet » , témoigne auprès de l’AFP un pilote belge sous le couvert de l’anonymat, reprochant aux dirigeants de Ryanair de « toujours mettre les employés sous pression« .
Les syndicats demandent des hausses de salaire, l’intégration des intérimaires ou encore des contrats de travail du pays de résidence des pilotes. Mais selon eux, Ryanair a exclu toute augmentation des dépenses. En Suède, ils réclament en outre d’être reconnus comme des interlocuteurs. « Ryanair n’a jamais eu de convention collective, il n’a jamais parlé aux syndicats en Suède et il le refuse encore » , dénonce auprès de l’AFP Martin Lindgren, à la tête du syndicat suédois des pilotes.

Toutes ces tensions sociales ont éclaté au grand jour en septembre 2017 lorsqu’un grave problème de planning des pilotes a conduit à des annulations portant sur 20.000 vols. Cette crise a forcé Ryanair à reconnaître des syndicats, ce que la compagnie avait toujours refusé jusqu’alors.