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CINÉMA

Se jeter à l'eau

24 février 2015 | Mise à jour le 16 mars 2017
Par
Se jeter à l'eau

« Vincent n'a pas d'écailles », ni nageoires, branchies ou doigts palmés. Pourtant l'eau transforme ce jeune homme fluet et banal en superhéros aux forces décuplées, pas forcément pour son bien…

On ne sait ni qui est ce jeune homme mutique ni d'où il vient, si ce n'est qu'il débarque d'un train avec son petit sac à dos dans une région plutôt sauvage, boisée et très propice à assouvir sa passion aquatique. Pour survivre, il fait tous les boulots qu'il trouve, souvent sur des chantiers du bâtiment.

Dans l'eau, littéralement, Vincent se ressource. Cascades, torrents, lacs, fontaines, canaux, pluie battante, tout est bon. Les moments où il semble vraiment heureux sont ceux où il fait corps avec son élément de prédilection. Un peu comme le héros du roman de Jim Harrison « Nageur de rivière », Vincent est quelque peu gêné par cette différence et, comme le renard furtif rencontré sur la berge d'un étang, il redoute la trop grande proximité.

Jusqu'au jour où surgit dans sa vie la rieuse Lucie (Vimala Pons) qu'il n'ose pas aborder, mais qui, heureusement, est plus audacieuse que ce grand timide. C'est à Lucie qu'il confiera son secret, qu'elle découvre mi-amusée, mi-admirative sans pour autant être trop dérangée par cette particularité un peu magique. Mais un incident, sur un chantier, va obliger Vincent à se jeter à l'eau…

Auteur d'une poignée de courts métrages, Thomas Salvador incarne et réalise ici son premier long avec fraîcheur et fantaisie. Pratiquant l'acrobatie et la danse, il n'a pas été doublé pour les scènes nautiques ou terrestres qu'il nous vante « 0 % d'effets spéciaux numériques », et qui évoquent les pionniers du burlesque tel un Harold Lloyd suspendu à l'aiguille de l'horloge d'un building.

A l'inverse des blockbusters américains avec super héros en combinaison élasthanne venus sauver un monde qui n'en demandait pas tant, Vincent ne se sent investi d'aucune mission. Et le minuscule budget du film de Thomas Salvador fait la nique aux superproductions affichant leurs millions de dollars pour cacher leurs scénarios indigents. Poétique, original et décalé, cet OVNI cinématographique, bien qu'encore un peu inégal en matière de rythme, promet beaucoup.

 

« Vincent n'a pas d'écailles »,

de Thomas Salvador. 1h18