À venir
Votre identifiant correspond à l'email que vous avez renseigné lors de l'abonnement. Vous avez besoin d'aide ? Contactez-nous au 01.49.88.68.50 ou par email en cliquant ici.
HAUT
DESSIN DE PRESSE

Un album corsé

19 août 2016 | Mise à jour le 9 février 2017
Par
Un album corsé

Florilège des dessins de Tignous parus dans Charlie Hebdo ou Marianne et compilés par Chloé, sa femme, La Corse prend le maquis donne à voir un portrait complexe, drôle, mordant de l'Île de beauté et de ses habitants.

La Corse et Tignous c'est une longue histoire. Amoureux de la beauté sauvage de cette île préservée, mais lucide et critique face au comportement chaud bouillant de certains de ses insulaires, le dessinateur de Charlie Hebdo, décédé lors de la tuerie du 7 janvier 2015, se rendait au moins deux fois par an dans l'Île de beauté. Pour des vacances en famille et pour le travail lors du Festiventu, ce Festival du vent, qui se déroule tous les ans à Calvi à l'automne.

Alors, pour Chloé Verlhac, l'épouse du dessinateur, réaliser cet album posthume était devenue une évidence « parce que c'est important de continuer ce que Tignous n'a pas eu le temps de réaliser et qu'il aurait eu plaisir à faire ». Mais si « Tignous adorait les Corses », c'était à sa façon.

Sans se censurer sur ce qu'il avait à dire : la violence du FLNC, Colonna et le procès Erignac, les élections arrangées, Pasqua et les magouilles politiques, l’allergie prétendue au travail, la pollution par les sacs plastiques, le racisme latent ou exprimé au grand jour de nombreux insulaires… Tout y passe. « Il adorait les Corses mais savait aussi les égratigner. Mais, comme dit le proverbe, qui aime bien châtie bien. C'est le style de Tignous. Il a toujours eu ce regard sur la vie. Et puis des cons y'en a partout, même en Corse », s'amuse Chloé.

 


Dessinateur de presse mais aussi formidable chroniqueur judiciaire pour Charlie-Hebdo lors du procès Colonna, il avait travaillé durant des semaines sur ces assises hors norme. « Avec ce procès, il a gagné le respect des Corses. Cette bande dessinée, qui a eu le prix France-Info de la BD, a été saluée par la famille Erignac et par la famille Colonna. Je crois qu'à partir de ce moment-là, les Corses se sont rendu compte du regard critique mais bienveillant que Tignous portait sur eux et sur les gens en général », relate encore Chloé. Un regard fin, délicat d'une incroyable précision quel que soit les sujets. Tellement que ces dessins deviennent intemporels.

Ceux sur le racisme en Corse sont d'ailleurs terriblement d'actualité… « Malheureusement, on est dans les mêmes problématiques et on n'avance pas beaucoup sur le vivre ensemble», s'inquiète la femme du dessinateur. « Le message de ce livre c'est aussi de dire : les clichés c'est dangereux. Lui savait en jouer avec talent et doigté. C'est pour ça qu'il pouvait aussi éviter la bien-pensance qui veut qu'aujourd'hui on a peur de froisser l'autre. »

Sa gentillesse, son humilité, son absence de méchanceté lui permettaient de faire passer bien des messages. Chloé se souvient : « Des Corses m'ont même dit : “Tignous nous faisait pas de cadeau, mais en même temps, on ne peut pas lui donner tout à fait tort.” » Tout est dit.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La Corse prend le maquis, Tignous.

Éditions du Chêne, 96 pages, 14,90 euros.