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ÉNERGIE

Vent debout contre Hercule, les syndicats d’EDF à nouveau en grève

10 décembre 2020 | Mise à jour le 10 décembre 2020
Par | Photo(s) : Couturier / Abaca
Vent debout contre Hercule, les syndicats d’EDF à nouveau en grève

Déjà en grève le 26 novembre, les agents d'EDF seront à nouveau mobilisés ce jeudi 10 décembre pour protester contre le plan Hercule. À l'appel de l'ensemble de leurs syndicats, ils entament une bataille de longue haleine contre le démantèlement programmé de l'opérateur historique du service public de l'énergie.
Hors de l'interfédérale, Sud-Énergie appelle néanmoins l'ensemble des salariés à la mobilisation contre le plan Hercule et soutient la revendication de l'intersyndicale d'un service de l'énergie 100 % public.

Passée presque inaperçue des médias, la journée de grève du 26 novembre contre le projet Hercule avait pourtant rassemblé 31,7 % des agents d'EDF – d'après la direction du groupe – et jusqu'à 50 % (selon les sites) d'après la CGT. Dans les deux cas, ce n'est pas rien. Quoi qu'il en soit, la journée du 10 décembre, à l'appel de l'intersyndicale CGT-FO-CFE-CGC-CFDT d'EDF promet d'être plus suivie encore que la précédente. Plusieurs raisons à cela.

Le tarif règlementé, cheval de Troie d'Hercule

D'abord, parce que, au prétexte de renégocier l'AReNH (c'est-à-dire le tarif règlementé de vente de l'électricité nucléaire par EDF à ses concurrents, dont le prix fixé par Bruxelles à 42 euros le MW/h ne permet pas de couvrir les frais de production de l'énergie nucléaire), le président Macron et le PDG d'EDF, Jean-Bernard Levy, viennent d'entériner la mise en œuvre du projet Hercule.

Et ce, loin des débats parlementaires et loin du dialogue social pourtant attendus des représentants des salariés d'EDF et de leurs syndicats, lesquels restent unitairement opposés à ce projet. « La signature en quasi catimini du plan Hercule nous est aujourd'hui présentée comme la contrepartie exigée par la Commission européenne pour revaloriser le tarif de l'AReNH », ironise ainsi Philippe Page, élu du CSEC d'EDF.

EDF engagée dans un processus de privatisation

Ensuite, parce que, ainsi que l'ensemble des syndicats d'EDF l'avait analysé dès 2019, la signature du plan Hercule va dès à présent engager EDF dans un processus de privatisation du service public de l'énergie, de son réseau de transport (RTE) et de l'ensemble de ses services commerciaux. Un processus que l'intersyndicale qualifie de « désintégration », car il aboutira selon elle à la disparition pure et simple d'EDF, ce fleuron industriel public et stratégique où l'État détient encore 70 % des parts du capital. « On nous rejoue le même scénario que celui qui a conduit à la privatisation et au démantèlement de GDF », rappelle Philippe Page.

Créer un marché, pour le seul bénéfice d'acteurs privés

Ce scénario, sa finalité de privatisation d'un bien public sont désormais bien connus des agents d'EDF : Filialisation, fusion, division des activités au prétexte de préserver l'entreprise intégrée ou bien, d'investir dans le renouvelable, etc… Bref, autant d'éléments de langage politiques qui ne suffisent plus à masquer la finalité réelle du plan Hercule : céder les activités les plus rentables au secteur privé afin de permettre aux nouveaux entrants sur le marché de l'énergie de capter des parts de ce marché créé de toutes pièces aux frais de l'entreprise publique EDF et donc, aux frais des usagers et des contribuables. Le tout, au nom de la libéralisation du marché de l'énergie voulue par Bruxelles et de son fonctionnement basé sur une supposée mise en concurrence « libre et non -faussée » entre acteurs.

Sauf que voilà, ce type de manœuvre ne fait plus illusion. Pas même pour l'ancien dirigeant d'EDF, Henri Proglio qui, sur BFMTV, l'a appréciée en ces termes à peine sibyllins : « Aujourd'hui, toute forme de désintégration me paraît aller vers la désoptimisation ». Dans ce droit fil, mais plus lapidaire, le sénateur Michel Savin (LR) estime, lui, que « Le projet Hercule visant à réorganiser EDF en trois entités fait peser sur la souveraineté française un risque inacceptable ».

Démanteler le service public pour financer le secteur privé

« Bienvenue en absurdie, où EDF, tenue de financer ses concurrents, se trouve alors asphyxiée financièrement », résume ainsi l'intersyndicale dans son communiqué commun du 4 décembre. Une manière de dire que, dans la partie qui se joue via le plan Hercule, les dés sont pipés. D'où la colère rampante des agents, qui menace de se généraliser, voire d'enflammer l'ensemble des centrales et sites d'EDF dans les mois à venir.

Lors de la mobilisation du 26 novembre, les arrêts de travail ont abouti à une baisse de 14 000 MW/h en près de 24 h, « Ce qui a obligé la direction d'EDF à s'approvisionner sur le marché libre et à payer jusqu'à 900 euros le MW/h afin d'éviter les ruptures de charge dans la fourniture d'énergie électrique », précise Thierry Zendher (coordination FNME-CGT).

Déconstruire la logique du plan Hercule : une bataille de long terme

La détermination des agents va-t-elle monter d'un cran ce jeudi 10 décembre, ou bien succombera-t-elle au fatalisme ? De l'avis de Thierry Zendher, il faut s'attendre à tout : une exacerbation de la colère pour certains agents, versus un repli sur soi pour d'autres qui considèrent qu'avec la signature du plan Hercule, les jeux sont faits. C'est ce discours préconçu que la FNME-CGT s'attache à présent à déconstruire, pas à pas, et site par site.

« La bataille contre Hercule ne fait que commencer et l'action du 10 décembre n'est qu'une étape de sa construction », prévient Maud Matthieu (direction fédérale FNME-CGT) qui, dès mercredi 9 décembre, recensait déjà d'importantes tensions sur le réseau. Un signe, selon elle, d'une forte mobilisation des agents de la production nucléaire.

Également très mobilisés, les salariés de la branche hydroélectrique comme à la centrale de Cheylas (Savoie) où, entrés en grève dès le 9 décembre, les agents occupent leur usine, mise à l'arrêt total. À la centrale de Dampierre-en-Burly où 48 % des effectifs étaient en grève le 26 novembre, on s'attend à dépasser les 50 % de grévistes ce jeudi 10 décembre. Ici comme dans la plupart des centrales, des barrages filtrants seront déployés aux aurores, pour ralentir, sans le bloquer, le flux des entrées sur site. Des opérations de tractage, des rassemblements et des conférences de presse sont également programmés sur plusieurs sites afin de donner un maximum de visibilité à cette deuxième journée de mobilisation, qui en appelle bien d'autres à venir.

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