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Le décrochage de portrait doit être interprété comme le substitut nécessaire du dialogue impraticable entre le président de la République et le peuple ”

Tribunal correctionnel de Lyon
20 septembre 2019 | Mise à jour le 20 septembre 2019
Par et | Rédacteur
Décrocher un portrait de Macron a été jugé « légitime » au tribunal correctionnel de Lyon. L'attendu du jugement est à la fois original et bienvenu pour toute action militante pacifique.

Le juge unique du tribunal correctionnel de Lyon a invoqué lundi 16 septembre « l'état de nécessité » et le « motif légitime » pour relaxer deux « décrocheurs » d'un portrait d'Emmanuel Macron en février dernier, poursuivis pour vol en réunion. « C'est une première et un très très bon signal pour nous », a déclaré une porte-parole du mouvement Action non violente-COP21 qui a salué cette « décision historique » actant « le non-respect des objectifs climatiques de la France et la légitimité des actions de désobéissance civile face à l'urgence climatique ».

Le parquet a annoncé lundi soir avoir fait appel de la décision. Le 2 septembre, il avait requis une amende de 500 euros contre les deux militants, un homme et une femme âgés de 32 et 33 ans, qui avaient décroché le portrait du président de la République dans la mairie du 2e arrondissement de Lyon. « Le vol est constitué et il ne règle en rien le dérèglement climatique », avait alors grotesquement estimé la procureur Rozenn Huon.

Une valeur symbolique

Dans sa décision, lundi, le juge a reconnu que le vol de « l'objet d'une valeur fortement symbolique » était bien matérialisé. Mais, selon lui, la réalité du dérèglement climatique « affecte gravement l'avenir de l'humanité », ce qui légitime « d'autres formes de participation » des citoyens, « dans le cadre d'un devoir de vigilance critique ».

Pour lui, l'intrusion d'une vingtaine de militants dans la mairie d'arrondissement a troublé l'ordre public de manière « très modérée ». Le magistrat a estimé que l'action des militants a finalement constitué une interpellation légitime du président de la République.

Le décrochage et l'enlèvement sans autorisation de ce portrait dans un but voué exclusivement à la défense de cette cause (…) doivent être interprétés comme le substitut nécessaire du dialogue impraticable entre le président de la République et le peuple. Tribunal correctionnel de Lyon

« C'est la reconnaissance de plusieurs années de militantisme », a salué très émue la jeune femme relaxée, à la sortie de la salle d'audience. L'ancienne ministre du Logement Cécile Duflot avait défendu lors de l'audience début septembre « un acte citoyen au sens le plus noble du terme » et un scientifique du CNRS avait exposé « l'indiscutable urgence climatique ».

D'autres procès avec d'autres jugements

Le premier procès de « décrocheurs » s'était tenu fin mai à Bourg-en-Bresse. Un militant écologiste avait été condamné à une peine d'amende ferme de 250 euros et cinq autres à une amende avec sursis. Deux semaines plus tard, le tribunal correctionnel de Strasbourg avait relaxé trois militants qui avaient brièvement décroché un portrait du chef de l'État dans une mairie du Bas-Rhin.

La semaine dernière, huit militants écologistes jugés à Paris ont défendu cette action de désobéissance civile pour dénoncer « l'inaction climatique » au sommet de l'État, invoquant un « devoir moral ». « Nous espérons que les jugements des prochains procès percevront également le tournant historique que nous sommes en train de vivre et reconnaîtront que ce type d'action est nécessaire pour lancer l'alerte », a déclaré Cécile Marchand, porte-parole d'ANV-COP21, qui fait partie des militants poursuivis à Paris. Deux procès sont notamment prévus à Mulhouse et Nancy le 9 octobre, selon ANV-COP21.

L'exécutif choisit la posture outrée

La ministre de la Transition écologique et solidaire et ministre chargée des Transports, Élisabeth Borne a indiqué, elle, qu’il s’agissait de « comportements inciviques (qui) ne méritent pas d’être encouragés ». Continuant à placer ces actions non violentes dans un cadre uniquement délictueux, l’exécutif prétend faire croire à ses actions « pertinentes » dans le domaine de l'environnement et de la lutte contre le changement climatique plutôt que d’entendre les demandes des syndicats et ONG dans ce domaine.