Où est passée la démocratie sociale ?
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À l’appel de trois organisations, dont la CGT, les collaborateurs parlementaires ont manifesté le 7 février. Ils exigent la reconnaissance de leur profession, un vrai statut, la compensation de la précarité de leur métier.
S'ils proclament haut et fort ne pas être des Penelope, c'est moins pour se distinguer des pratiques népotiques que pour réitérer leurs exigences de salariés. Car si le terme « fictif » colle injustement à leur métier comme un chewing-gum à la semelle, leur profession est bien réelle, leur travail bien tangible et quantifiable. Mais ils souffrent, disent-ils, d'une « insuffisante définition statutaire » et d'une « forte précarité ». C'est qu'en effet chaque renouvellement électoral entraîne un plan social silencieux.
Pour cette année 2017, entre les législatives et le renouvellement de la moitié des sénateurs, quelques 1300 personnes pourraient perdre leur emploi. Actuellement, les deux administrations qui gèrent ces salariés pour le Sénat et l'Assemblée préconisent que les parlementaires qui ne se sont pas représentés, ou qui ont perdu leur siège, procèdent à leur licenciement pour « motif personnel » à la fin du mandat.
Or, juridiquement, cette procédure signifie que le licenciement repose sur la personne du salarié, elle est inhérente à celui-ci ; en général, il s'agit de faute, d'insuffisance professionnelle, de mauvais comportement, de discipline, d'incapacité. « Si nous acceptons la précarité de nos contrats qui sont remis en jeu à chaque élection, en revanche, nous n'acceptons pas d'être jugés “responsables” de notre licenciement », explique Camille Naget, collaboratrice d'un sénateur et trésorière du syndicat CGT. Car, en l'occurrence, la fin du mandat s'apparente bien à l'impossibilité pour l'employeur de prolonger la relation de travail. Le licenciement résulte de la suppression de l'emploi.
Depuis des années, leurs syndicats – dont la CGT des collaborateurs parlementaires – réclament notamment l'établissement d'une convention collective, la requalification de la rupture de leur contrat de travail en fin de mandat en licenciement économique. Salariés comme les autres au sein d'une très petite entreprise formée par le parlementaire qui les emploie, ils réclament l'application du droit commun et se défendent de revendiquer des « passe-droits ». À travers la définition d'un statut, ils souhaitent que l'instauration d'un dialogue social et la création d'instances afin de traiter, par exemple, les questions de mutuelle, de prévoyance, de conditions salariales, de santé au travail, de 1% logement.
Des préoccupations qui ont peu à voir avec les vicissitudes de la vie d'une propriétaire de manoir détentrice de 17 comptes au Crédit agricole…
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