24 heures avec Camille Naget, collaboratrice parlementaire
Ces assistants multitâches, aussi disponibles qu’indispensables, œuvrent dans l’ombre des parlementaires. Des petites mains en mal de reconnaissance. Lire la suite
« J'ai débuté place de l'Opéra, dans un petit barnum en bois. À l'époque, en ne vendant que des journaux, je gagnais bien ma vie. Je travaillais seule. C'est ce que j'aime dans ce métier. Et il y a les clients. Tu discutes, tu refais le monde, tu deviens “leur” marchand de journaux. » Nelly s'interrompt. L'homme devant elle cherche ses mots, trahissant un accent italien. « La préfecture ? – Tout droit, boulevard du Palais. » « Comme on est un commerce de rue et qu'il n'y a pas de porte, les gens nous prennent pour un bureau de renseignement. On fait partie du tissu social. Le kiosque est un repère pour les touristes, les petits vieux, ceux qui vivent dans la rue… »
Jusqu'en juillet, Nelly œuvrait dans le quartier des Abbesses, dans le 18e arrondissement. En raison des attentats et de la chute de la fréquentation, elle a quitté Montmartre pour reprendre un kiosque dans le Quartier Latin. « Mais une clientèle ne se fait pas en six mois. Et puis, la crise de la presse est réelle. » Amorcée au début des années 1980 avec l'offensive des éditeurs dans le domaine des abonnements, la baisse des ventes s'est accélérée avec l'arrivée des gratuits (20 minutes, etc.), la commercialisation en grande surface et dans les boulangeries, ainsi que, plus récemment, l'avènement du numérique.
De fait, sans le hors-presse (chargeurs de téléphone, cartes postales, confiserie, porte-clés, plans indicateurs…), impossible de s'en sortir. Mais ce qui fait encore plus enrager Nelly et ses collègues, ce sont les stocks qu'ils sont obligés d'entreposer dans leurs espaces réduits. « On a ni le choix des magazines ni celui des quantités, qui sont imposés par les diffuseurs (Presstalis, Messageries lyonnaises de presse). On se retrouve à devoir faire toujours plus de manutention et, surtout, à exposer des revues qui ne se vendent pas, qu'on ne peut pas refuser, et qu'on paye d'avance. Non seulement les éditeurs se font de la trésorerie sur notre dos mais, parfois, il faut ramer pour se faire rembourser les crédits d'invendus. »
19 heures : Nelly fait l'inventaire des quotidiens. « Wall Street Journal : reçu un, rendu un. Le Financial Times : reçu quatre, rendu quatre… Si même ceux qui ont du pognon n'achètent plus de journaux ! », s'esclaffe la kiosquière. Une heure et demie plus tard, Nelly a rangé sa caisse. À peine plus de 60 euros net, pour onze heures de travail. « Si je songe à arrêter ? Pas du tout. J'aime toujours ce métier et je crois dans le pluralisme de l'information. En revanche, c'est vrai qu'on est pris en étau entre les diffuseurs et les éditeurs, qui se foutent éperdument que la majorité d'entre nous bossent douze heures par jour, parfois sept jours sur sept, pour moins de 4 euros de l'heure… »
Article paru dans Ensemble ! de janvier 2017
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