Fret ferroviaire : la CGT s'insurge contre un scandale d'Etat
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Dès le lundi 18 septembre et jusqu'à la fin de la semaine au moins, les usagers du train auront de la lecture. À l'occasion des très institutionnelles Assises de la mobilité qui commencent mardi 19 septembre, la fédération CGT des cheminots lance une grande campagne d'information sur la situation économique et sociale de la SNCF par le biais d'un journal gratuit au titre éloquent : « La vraie info ».
C'est que le constat est sévère, tant chez les usagers que chez les professionnels du rail. Détérioration de la qualité du service public, multiplication des dysfonctionnements, fin de la péréquation, tarification déconnectée de la réalité du transport… Les sujets de mécontentement sont légion. Mais, « à partir de ces dysfonctionnements, une grande entreprise de mystification s'est mise en place pour justifier une nouvelle réforme qui va encore plus loin que celle de 2014 et qui vise en fait uniquement à imposer l'ouverture à la concurrence du transport national de voyageurs par fer », explique Laurent Brun, secrétaire général de la fédération CGT des cheminots, lors d'une conférence de presse à Montreuil. Déjà, la SNCF n'est plus une entité mais se compose de trois établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) qui fonctionnent en quasi-autonomie. Résultat ? « Les services fonctionnent selon des relations “clients-fournisseurs” et ne savent plus coopérer dans le but commun de faire circuler les trains. » La situation ubuesque de cet été à la gare Montparnasse due à une panne du poste d'aiguillage de Vanves-Malakoff en est l'illustration (voir l'article Chassé-croisé : la pagaille).
Faut-il s'en étonner ? Non, à écouter Laurent Brun énumérer le nombre de trains supprimés à cause de ces couacs. Sur une semaine, 100 trains n'ont pas pu circuler dans le Limousin et, sur le premier trimestre 2017, plus de 600 ont été déprogrammés dans les Pays de la Loire. Pour le secrétaire national de la fédération CGT des cheminots, la concurrence est présentée comme une « solution miracle […] construite de toutes pièces depuis le début de l'année par une profusion de colloques et de rapports. C'est également la conclusion annoncée des Assises de la mobilité » qui doivent pourtant se terminer à la fin de l'année. De là à croire que les dés pourraient être pipés…
Les cheminots CGT se disent inquiets pour toutes les lignes considérées comme non rentables (voir notre enquête transport). Aux trains reportés, retardés ou annulés pour cause d'avarie, de manque de conducteur, de matériel défectueux et autres joyeusetés qu'a, un jour ou l'autre, à connaître tout usager de la SNCF s'ajouteront aussi — si la privatisation de la SNCF est actée — des lignes entières abandonnées aux cars Macron et aux transporteurs privés. Et ce, en totale incohérence avec les préconisations de la COP 21. Les usagers ne sont pas dupes, d'ailleurs, qui se battent, aux côtés des cheminots CGT, pour la sauvegarde de lignes comme le Paris-Portbou ou le train de nuit la Palombe bleue (sur la ligne Paris-Irun). Du Puy-en-Velay à Toulouse, en passant par Bordeaux ou Nantes, des rassemblements d’usagers et de syndiqués s’organisent pour dire qu'il n'y a pas que les TGV ou les LGV qui ont le droit de circuler dans l'Hexagone.
Mais ce n'est pas – et c'est peu dire – l'orientation actuelle du gouvernement. Le 1er juillet, en marge de l'inauguration de la nouvelle ligne TGV Le Mans-Rennes, Emmanuel Macron a exposé, devant quelques salariés de la SNCF triés par le directeur Guillaume Pepy, son projet pour la SNCF qu'il voit comme « un agrégateur de mobilité » (sic !). Au programme : ouverture à la concurrence et mort programmée du régime spécial de retraite des cheminots. D'ici le deuxième semestre 2018, il entend donner le feu vert à la retraite par point pour tous. « Tout le monde rentre dans le système ». Des propos polémiques qualifiés par Laurent Brun de « grosses ficelles » pour détourner les citoyens des vraies questions. « Les cheminots défendront leurs droits avec acharnement, car ils savent qu'ils ne sont pas des privilégiés et qu'ils ne volent rien à personne. Mais nous voulons surtout ramener le débat sur le fond du sujet : comment répondre aux besoins de la nation ? Si ce débat est mené sincèrement et que l'on écoute les spécialistes que sont les cheminots, alors la concurrence ne sera pas mise en œuvre, mais on améliorera réellement la qualité du transport ferroviaire. »
Autre sujet épineux : celui de l'endettement de la SNCF qui s'élève à 52 milliards d'euros. Pour la CGT cheminots, cette dette est avant tout une dette d'État que la France refuse de prendre à son compte, et ce, en totale opposition avec une directive européenne qui stipule que « les États membres mettent en place des mécanismes adéquats pour contribuer à réduire l'endettement des entreprises ferroviaires publiques ».
La CGT cheminots a réaffirmé sa volonté de redonner toute sa place au service public ferroviaire. Déjà, en 2014, elle avait fait des propositions pour développer le service public. Elle souhaitait le retour à une entreprise intégrée, proposait la création d'une « structure de défaisance » sur le modèle de ce qui a été fait pour les banques afin régler le problème de la dette et mettait l'accent sur la nécessité d'améliorer les conditions de travail et de rémunération des agents, qui sont loin d'être des privilégiés. Pour la CGT, cette réflexion urgente est à mener avec les usagers, pour construire ensemble l'avenir du rail en France. Dans l'immédiat, les cheminots seront aussi mobilisés contre la loi travail XXL et distribueront leur journal lors des prochaines manifestations.
Le train des sénateurs dérailleHervé Maurey, sénateur (UDI) de l'Eure, et Louis Nègre, sénateur (LR) des Alpes-Maritimes, ont présenté, le 6 septembre, la première proposition de loi mettant fin au monopole de la SNCF dans le transport ferroviaire de voyageurs à l'intérieur du territoire français. Une proposition qui entre dans le cadre du quatrième paquet ferroviaire européen que la France soutient. Or, cette directive entend mettre fin au monopole d'État du transport national de voyageurs à compter du 3 décembre 2019. Dans le collimateur de Bruxelles : les lignes conventionnées (régionales ou nationales considérées comme non rentables, le seul critère qui compte pour l'Europe). Ces lignes seront soumises à une concurrence effective au plus tard en 2023. « Finalement, dans cette affaire, on est plus macronistes que Macron » s'amuse M. Nègre, faisant allusion aux réformes radicales que le président de la République souhaite pour la SNCF, note le journal Le Monde.
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