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SYNDICALISME

Mise en place des CSE : une formation CGT pour une bataille majeure

17 avril 2018 | Mise à jour le 17 avril 2018
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Les CE, DP et CHSCT vont être progressivement remplacés par une instance unique : le conseil social et économique (CSE). Si le virage est mal négocié, la CGT pourrait perdre jusqu'à 60 000 mandats. La CGT met en place une formation de lutte pour inverser la vapeur lors de la mise en place des CSE.

Ce n'est un secret pour personne, les ordonnances Macron ont pour objectif politique d'affaiblir massivement les moyens des instances représentatives du personnel (IRP). Le remplacement progressif des délégués du personnel, des CHSCT et des comités d'entreprise par une instance unique, le Conseil Social et Economique (CSE) pourrait avoir pour conséquence de diminuer d'un tiers le nombre des élus et mandatés. Les CSE auront ainsi les compétences cumulées des trois instances qu'ils remplacent avec trois fois moins d'élus. Moins d'élus, moins de proximité avec les salariés, plus grande institutionnalisation… Certains syndicats s'en accommodent peut-être, pas la CGT.

Pour la Confédération, la mise en place d'un CSE nécessite d'engager une bataille et un rapport de force afin d'obtenir des moyens supplémentaires.  Cela implique des connaissances spécifiques que le pôle formation de la CGT a mis en place tout récemment via une nouvelle formation qu'il a pour l'heure expérimentée dans deux départements : le Gard, avec une première journée d'étude qui s'est tenue le 27 mars à Nîmes, et l'Ille-et-Vilaine avec une seconde expérience le 11 avril à Rennes, session où la NVO était invitée.

Engager la bataille du CSE

Le titre de la formation CGT organisée à Rennes est en soi évocateur : « Bataille à engager avant la mise en place de CSE ».  Loïc Morel, secrétaire général de l'UD CGT 35, se félicite de l'organisation de cette journée qui a réuni une trentaine de personnes : « Il y a ici des gens de tous les métiers ; transports, commerce, construction, organismes sociaux et même services publics. L'idée est que cette diversité apporte des débats contradictoires. Nous ne sommes pas tant dans la description technique que dans l'appropriation d'une démarche CGT.  Nous n'avons pas pu empêcher les ordonnances, mais plutôt que de les subir, on peut transformer les CSE en outils de progrès. »  L'enjeu est lourd car « si on n'y prend garde, la CGT perdra 60 000 élus », alerte Philippe Pussat, responsable de la formation de l'UD CGT 35. Mais le jeu en vaut la chandelle car « on peut au contraire gagner des élus et des heures de délégation, à condition d'impliquer les syndiqués et les salariés pour peser sur les négociations lors de la mise en place des CSE ». 

De nombreux paramètres changent avec les ordonnances. On peut ainsi passer d'un seul CE à plusieurs CSE de taille différente et avec des délégués de proximité, ou encore l'inverse. La certitude est qu'en l'absence de contre-propositions syndicales appuyées par les salariés la purge sera drastique. Mais, fait nouveau, tout est négociable et laisse donc une place importante au rapport de force. Christian Angel, responsable au niveau national du pôle formation CGT, explique la philosophie des journées d'étude : « La logique patronale tend à éloigner les IRP des salariés, or la CGT se bat pour des IRP efficaces et en proximité avec les salariés. Il faut créer une dynamique autour de la négociation d'accords de mise en place des CSE.  La formation que nous proposons se base sur la mallette qu'on peut trouver sur notre site et le guide intitulé : “Pour gagner la représentation des salariés efficace et de proximité”.  Je dis aux UD et fédérations que les journées d'étude sont une préparation pour mener des batailles ».

Études de cas pour gagner

Une méthodologie, somme toute assez simple est proposée aux stagiaires : il s'agit de comparer le nombre d'heures de délégation, le nombre d'élus actuels avec ce que prévoit la loi et qui sera le plus souvent l'option portée et revendiquée par les directions des entreprises. Mais, en face, il y a les vrais besoins, et la réalité qu'aujourd'hui même les heures de délégation sont loin de suffire. Du coup, mettre dans un pot commun les prérogatives des DP, du CE et du CHSCT doit aboutir à réclamer non pas moins, mais plus d'heures de délégation.

À Rennes, les « stagiaires » des entreprises présentes ont été invités à examiner concrètement ce que les nouveaux textes prévoient pour le passage des institutions actuelles au CSE.  Tous ne perdraient pas nécessairement en nombre d'heures de délégation, mais à chaque cas examiné c'est environ un tiers d'élus en moins, voire plus s'il y a un accord régressif en ce sens…  Ainsi chez Geodis Bretagne, qui avec cinq établissements passe de 14 élus (DP, CHSCT, CE) avec un total de 185 heures de délégation à 189 heures de délégation pour les – seulement – 9 élus du nouveau CSE.

Pour certains, c'est l'effroi lorsqu'ils découvrent ce qu'il pourrait subsister de leurs IRP dans leur entreprise. Que revendiquer exactement et sur quelle base ? C'est le but des exercices pratiques que proposent les journées de formation. Le formateur montre un cas d'école où une direction propose 220 heures de délégation.  Au vu des différentes missions spécifiques, il démontre que c'est le triple qu'il faut réclamer : 660 heures. L'écart est si grand que le scepticisme se lit sur les visages. Puis vient le temps de l'analyse et de la colère : « L'écart est grand, mais déjà maintenant nous n'avons pas assez de moyens et on se bat pour gagner pas pour perdre !» intervient un stagiaire. « Oui, répond Philippe Pussat, c'est bien cela, nous sommes dans la contre-attaque ».  Une riposte CGT qu'il faut va falloir faire grandir partout.